Un found-footage d'épouvante français ! Même si "The Follower" arrive un peu après la grande vague de prolifération de ce sous-genre (on a toujours un peu de retard en tant que français, c'est bien connu), la chose est déjà assez rare pour être saluée et on aurait plutôt envie de la défendre dans le sens où le film a quelques qualités qui n'ont pas grand chose à envier aux productions US (le long-métrage est d'ailleurs tourné en anglais).
Mais le mot "quelques" a hélas aussi une importance considérable que notre fierté chauvine ne peut ignorer...


Un podcasteur, spécialiste des phénomènes étranges, part enquêter dans une vieille maison au fin fond des bois où vivent une jeune femme étrange et sa grand-mère recluse dans sa chambre...


Un postulat classique mais efficace et prometteur de quelques belles envolées niveau trouillomètre donc. Ce sera d'ailleurs le cas dans la première partie du film. Similaire à un "Paranormal Activity" en plus nerveux, l'installation de caméras dans toute la maisonnée pour filmer d'éventuelles manifestations surnaturelles permet évidemment ces plans fixes créant une attente silencieuse souvent brisée par des parasites et un bruit de fond dense annonciateurs d'un danger imminent. Et ça fonctionne plutôt : généreux en phénomènes louches et même carrément stressant lorsque la caméra du héros s'attarde sur la porte de la chambre de cette grand-mère cloitrée dont le mystère est sujet à tous les fantasmes, "The Follower" navigue en terrain connu mais le fait de manière suffisamment convaincante pour que l'on se laisse prendre une énième fois au jeu. L'atmosphère aurait même pu être parfaite avec le personnage de la petite-fille, Carol, aux comportements schizo-versatiles ajoutant un peu plus de perspectives étranges à l'ensemble. Seulement, le jeu bien trop appuyé, pour ne pas dire exagéré, de son interprète Chloé Dumas vient souvent briser le sentiment d'immersion que le film tente d'installer.


Puis, à la suite d'une décision surprenante mais finalement étonnamment rationnelle pour ce genre d'intrigue, vient une ellipse pour nous emmener dans un cadre différent et explorer des ramifications imprévues à toute cette histoire. Mais, à partir de ce moment, "The Follower" va perdre à peu près tout ce qui se faisait sa force en ne réussissant pas à concrétiser ses bonnes intentions de départ.
Pour résumer, le film est construit en trois temps et, si, comme dit précédemment, la première avait des arguments pour convaincre, la deuxième va stagner dans des développements parfaitement inutiles (la séquence de l'ex-petite amie), introduire des personnages joués par des acteurs plus que discutables (aïe, le meilleur ami... aïe, ouille, le médium...) et se priver de tous les éléments qui fonctionnaient jusqu'ici. Les apparitions fantomatiques perdent en force sans le décor de la vieille maison, les parasites et sons annonçant leur venue virent au procédé artificiel et répétitif, le héros perd en empathie en tergiversant bêtement sur la bonne décision à prendre (les séquences où il réfléchit seul face caméra deviennent gênantes) et le film se prive bêtement du personnage énigmatique de Carol qui, malgré son interprète, était un apport considérable à son ambiance... Bref, il n'y a plus grand chose qui tienne la route et on prie très fort pour qu'enfin le héros retourne faire un tour dans la maison des débuts pour repartir sur de bons rails. Ce sera évidemment le cas, sauf qu'entre-temps, sans vendre la mèche, "The Follower" aura basculé dans le thriller en ne se servant plus que du surnaturel comme d'une toile de fond et ne délivrera qu'un troisième acte très conventionnel et finalement bizarrement expédié au vu de la longueur inutile du deuxième.


On restera donc sur un sentiment de gâchis car, si "The Follower" ne prétendait pas révolutionner le genre, il cherchait à s'y inscrire efficacement et sans prétention. La bonne volonté de son intrigue de jouer sur plusieurs registres avait en fait tout de la fausse-bonne idée et a peut-être eu raison de lui autant que ses bizarreries de développement lors des deux derniers actes ou ses piètres acteurs (seul le principal, Nicolas Shake, tire son épingle du (mauvais) jeu). Dommage... Néanmoins, l'effort mérite d'être salué vu la frilosité habituelle autour de ce type de projet dans nos contrées et les ambitions que l'on sent toujours sincères derrière ce long-métrage de Kévin Mendiboure font tout de même entrevoir de belles promesses pour l'avenir.

RedArrow
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le 6 mars 2018

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