Quand le chien fou Kim-Jee Woon s'attaque à la comédie, il ne se contente pas de faire rire et prend le parti d'un subtil mélange des genres. Entre critique sociale, film sportif et comédie déjantée, The foul king est un film hors norme non dénué de défauts mais si généreux qu'il inspire d'emblée une sympathie qu'on lui portera pendant toute la séance. Cette sympathie est en grande partie véhiculée par Song Kang-Ho qui parvient, par son jeu et ses attitudes, à joliment retranscrire le manque d'assurance de son personnage, dont il ne se libère que lorsqu'il monte sur un ring et se prend des taloches dans la tronche. Énergique en diable lorsqu'il revêt son masque blanc strié de noir, il sait aussi jouer la carte de la subtilité pour étayer sans fausse note le côté critique qu'insuffle Kim Jee Woon à son film.
C'est cette carte sociale qui permet à The Foul King de convaincre autant. La petite thèse sur la vie de salarié qui accompagne le côté revanchard que prend le personnage sur sa vie via le catch permet au film de ne pas sombrer uniquement dans la success story évidente. D'ailleurs, jamais the fool king n'emprunte ce chemin enthousiasmant des habituels films sportifs, enchaînant vie misérable, entraînements difficiles et victoire ultime rédemptrice. Non, dans The Foul King, il n'y a pas véritablement de salut, si ce n'est celui de s'assumer. C'est dans cette optique que Kim Jee Woon conclut son propos, par une scène qui peut presque sembler hors de propos au prime abord alors qu'elle vient au contraire d'asseoir définitivement le film dans une réalité tout sauf idyllique. Le personnage de Song Kang-Ho passe un cap, mais sa vie ne change pas pour autant, ses peines de coeur restent intactes, son instabilité professionnelle également.
Kim-Jee Woon étant aux commandes, on s'attend à de la virtuosité caméra à l'oeil. C'est bel et bien le cas, le papa des ultimes A bettersweet life ou I saw the devil ne se cache pas derrière un sujet, léger sur le papier, pour justifier d'une mise en scène classique. Au contraire, il met une nouvelle fois au service de son film toute l'inspiration qui l'habite lorsqu'il doit placer sa caméra. Que ce soit pendant les combats, les mésaventures urbaines de son protagoniste et même lorsque ce dernier se contente de vivoter au boulot, Kim Jee Woon réfléchit ses plans et fait le nécessaire pour donner de l'impact à ses images. Le résultat n'en est que meilleur, et lorsque ses séquences se doivent d'exploser, elles le font. On est ainsi presque transcendé par le combat final, à l'occasion duquel une violence sèche et imprévue s'invite à la fête. La claque cingle, on fait le bouledogue en signe de respect.
A tous ceux qui pensent que le cinéma coréen n'est fait que de violence, je conseille la découverte de The Foul King. Il faut être un minimum ouvert à un cinéma différent, mais si tel est le cas, le plaisir sera vraisemblablement au rendez-vous, tant Kim jee Woon déroule généreusement son sujet, sans jamais se laisser aller à la simplicité. Et puis bien sur il y a Song Kang-Ho, et rien que pour sa dithyrambique performance, le film se doit d'être vu.