Marion Cotillard et chef opérateur souffrant d'instagramite, le film réunissait pourtant de solides arguments pour me faire rebrousser chemin. Pourtant, dès les premières images j'ai été subjugué par la beauté de la photographie et de Marion Cotillard. Comme quoi il ne faut jurer de rien.

Phoenix est un proxénète bien implanté sur Ellis Island qui vient y faire directement son marché, monnayant un agent d'immigration. Il a repéré Ewa (Cotillard), immigrante polonaise, qu'il embauchera comme "actrice" en lui faisant miroiter la sortie prochaine de sa sœur, venue avec elle et retenue à l'infirmerie de l'île, contre finance. Il s'occupe d'elle, la choie. Il est comme un reposoir pour elle. Tout au long du film il fera tout pour la garder auprès de lui (jusqu'à aller la chercher une seconde fois sur Ellis) car de fait, il l'aime. D'un amour véritable, c'est certain, mais d'un amour qui ne l'empêchera pas d'exploiter sa beauté, celle d'une Mary Pickford ou d'une Olive Thomas (nous sommes au début des années 20) Ce qu'il ne pourra supporter en revanche c'est qu'elle se rapproche de son magicien de cousin. C'est lui l'élément perturbateur du film. Il apparait comme par magie après une heure et les rapports de force s'inversent ; Bruno, aux abois, supplie Ewa de revenir, elle, accepte à condition de toucher 50% : le maquereau dominateur du début s'écrase et la prostitué soumise s'élève. Elle est désormais le reposoir sur lequel il s'appuie, le dos toujours courbé. Car il boit, se bat, trébuche et prend des coups en permanence pour celle qu'il aime. Au détour d'une oreille indiscrète près d'un confessionnal et surtout après avoir commis l'irréparable il découvre le remord et la rédemption. Elle le mènera au sacrifice et à sa perte, elle la mènera, avec sa sœur, vers la liberté.

Il souffle sur le film un vent de tragédie et de romanesque. Les sentiments misent en jeu sont assurément littéraires. Le triangle amoureux fait tomber les masques : Bruno souffre autant qu'il fait souffrir, Ewa plie mais ne rompt pas : elle est la Liberté, sa statue. Emil s'invite comme un songe à la danse.
Artistiquement c'est un sans faute. Je me serais volontiers laissé emporter une heure de plus dans l'atmosphère sépia et ouaté du New York des années 20 à regarder ses êtres se battre. Phoenix continue de tenir la comparaison avec Brando, Renner lui tient la dragée haute et, surprenant, Cotillard m'émeut pour la première fois.
Gray confirme que s'il est habile dans le polar, il excelle dans le mélodrame. La dernière scène est magnifique.
Je ne suis vraiment pas de l'avis de mes éclaireurs.
blig
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le 2 déc. 2013

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blig

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