Lecteur, avant d'aller plus loin, mettons les choses au point. Je ne vais pas faire une critique de The Neon Demon. D'abord, il y en a tellement d'autres, bien mieux écrites que ce que je pourrais jamais faire, parfaitement argumentée, et tout et tout. Allez les lire.
Ce qui va suivre est purement subjectif. Ça se rapproche plus d'une impression de lecture.
Allons-y.


Voyant les notes pour le moins contrastées de mes éclaireurs (notes qui recoupent tous les degrés, de 1 à 10) et les discussions enflammées sur le film, il était temps que je me fasse un avis personnel sur ce fameux Neon Demon. Je n'en avais pas fait une priorité pour le moment, Refn n'étant pas mon cinéaste préféré, loin de là (à vrai dire, je n'en avais vu que deux films jusqu'à présent, et en découvrant Only God Forgive, j'avais l'impression de voir un réalisateur qui s'apprêter à tomber dans le panneau de l'esthétisme vide), mais la fin d'année approchant, il fallait faire le point sur les films de l'année. Alors, allons-y pour The Neon Demon.


Le moins que l'on puisse dire, c'est que le film pose des questions. C'est peut-être là son principal atout, son intérêt majeur. Qui est réellement cette Jesse qui débarque comme une fleur en Californie ? Est-elle aussi innocente qu'elle le paraît ? Elle a parfois des petits sourires en coin, des regard qui semblent dire qu'elle est autre chose. Comme cette panthère retrouvée dans sa chambre de motel...
Avec cette panthère, justement, on peut aborder un des défauts majeurs du film, son symbolisme lourd. Sauvagerie, bestialité, vampirisme, violence, opposition noir-blanc (une scène nocturne sous-éclairée enchaînée sans transition avec une scène surexposée jusqu'à l'aveuglement, une robe blanche contrastant avec la robe noire d'une autre mannequin)... Refn dispose ses effets avec la lourdeur d'une colonne de chars d'assaut. Pour aboutir à quoi ? Un portrait sanguinaire du monde de la mode ? C'est tout ?


Voilà l'un des mystères du film. Quel est son propos exact ? Une attaque virulente contre un certain milieu ? Un parallèle fait avec le monde carnassier de Hollywood (il y a, sous certains aspects, des détails qui rappellent Eve, de Mankiewicz, toutes proportions gardées, bien entendu) ? Jesse est-elle une représentation de Refn lui-même à son arrivée en Californie ?
Ou alors, tout cela est-il uniquement vain ? C'est là la question qui me turlupine depuis que j'ai vu The Neon Demon. Faut-il prendre ce film au sérieux ou est-ce simplement du foutage de gueule ? La beauté esthétique et la représentation des obsessions doit-elle renvoyer à l'intelligence du cinéma de Lynch ou à la vanité d'un Gaspard Noé ? A-t-il quelque chose à nous dire ou cherche-t-il seulement à en donner l'illusion ?
Plus j'avançais, plus j'avais l'impression d'une sorte de long clip où les images n'auraient rien à apporter qu'elles mêmes, sans lien avec ce qui raconté.
Mais, d'un autre côté, jamais je ne me suis ennuyé pendant les presque deux heures du film. Il y a un rythme quasi-hypnotique dans The Neon Demon, et les énigmes multiples posées par l'histoire et sa réalisation incitent à avancer, à aller plus loin. Plus que jamais, nous pouvons parler ici d'une intrigue.


Au final, The Noen Demon m'est apparu comme une énigme. Le mystère n'est toujours pas résolu. Et c'est peut-être là, à mes yeux bien entendu, que réside la qualité principale du dernier long métrage de Refn. Là où tant de film sont bêtement explicatifs et tuent toute forme de mystère, et donc toute poésie, le cinéaste danois livre ici un film certes imparfait, maladroit, prétentieux, œuvre d'un artiste dont les chevilles ont pris la taille de Central Park, mais un film dont le caractère fascinant a exercé une force hypnotique sur moi. Plus que jamais, The Neon Demon est un film où la personnalité du spectateur se livre toute crue : je comprends aussi bien ceux qui l'ont mis sur un piédestal que ceux qui l'ont descendu en flammes. Le dernier opus de Refn mérite les deux. Et plein d'autres choses encore.

SanFelice
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le 28 nov. 2016

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SanFelice

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