[Actualisation : Cette critique reflète mon point de vue au moment où je l'ai écrite, et plus forcément aujourd'hui.]
The Passion of Ayn Rand est un biopic sur une partie de la vie de la romancière-philosophe adapté du livre de Barbara Branden portant le même titre. À ma connaissance il n'existe aucune version française, ce qui n'a rien d'étonnant, mais pas non plus de version sous-titrée. Vous ne pourrez donc le voir qu'en VO sans sous-titres à l'heure actuelle. Cela s'explique facilement du fait que pour les français, ce film a beaucoup moins de sens que pour des américains, qui connaissent Ayn Rand et dont une bonne partie a lu les œuvres les plus connues comme The Fountainhead (qui a été adapté en un excellent film avec Gary Cooper pour ceux que ça intéresse) ou encore Atlas Shrugged, l'étrange bible de l'auteur qui s'est vendu à des millions d'exemplaires, malgré les critiques et qui, de fait, a changé la vie de beaucoup d'américains. Ce livre est sorti en français il y a seulement quatre ans (soit plus cinquante ans après sa publication) sous le titre La Grève.
Il va de soi que pour regarder ce film, il est chaudement conseillé de connaître au moins un tout petit peu Ayn Rand, ses idées et ses œuvres, même très superficiellement. Sinon, l'intérêt me paraît limité.
À supposé que les faits narrés dans le film soient vrai, et je pense qu'ils le sont en grande partie même s'il ne s'agit que d'un point de vue, celui-ci en dit long sur la personnalité d'Ayn Rand (je dis bien sa personnalité, pas sa philosophie qui doit dans une certaine mesure être considérée indépendamment), dans ses bons comme dans ses mauvais aspects. Naturellement ce sont les mauvais aspects qui frappent le plus (On pourrait en parler longuement, mais je ne voudrais pas spoiler le film.) mais si l'on ne voyait que cette face sombre, on ne pourrait pas s'expliquer pourquoi tous ses proches sont des gens qui se sont rapprochés d'elle de leur plein gré. Ce n'est pas elle qui est venu à eux, mais eux qui sont venus à elle, et qui pour certains en ont fait leur maître à penser. C'est d'ailleurs probablement l'un des grands tort d'Ayn Rand d'avoir accepté et aimé ce rôle, qui a donné lieu à de terribles paradoxes. Phénomène symbolisé dès le début du film, lorsque le couple Branden vient à sa rencontre. Donc, non seulement les gens se sont rapprochés d'elle de leur plein gré, mais qui plus est, toute leur vies étaient focalisés autour d'elle. C'est un sentiment étrange que vous avez peut-être connu parfois dans votre vie, la fascination pour une personne que vous avez rencontré. Ce sont généralement des personnes exceptionnelles, totalement différentes de ce que vous avez connu jusqu'alors. Mais lorsqu'il s'agit d'une personnalité comme Ayn Rand, cette fascination peut donner le meilleur...comme le pire.
Le film est axé sur les relations sentimentales, sujet qui peut paraître futile et surfait en lui-même, mais qui prend un sens singulier avec la personnalité de Rand. Néanmoins, d'après ce que j'ai cru comprendre, le livre de Barbara Branden est beaucoup plus riche que cela.
Sur un plan strictement formel, j'ai trouvé les acteurs, surtout les quatre principaux, simplement exceptionnels. Mention spéciale à Julie Delpy qui crève l'écran. J'ai trouvé également la photographie, la lumière, la musique et le rythme de très bonne facture. C'est un film que je reverrais avec plaisir.
N.B. : La véracité des faits rapportés dans The passion of Ayn Rand (le livre de Barbara Branden) est sujette à caution. Cela a fait l'objet d'un contre-livre : The Passion of Ayn Rand's Critics: The Case Against the Brandens. Qui bien sûr est lui même sujet à critiques...