Qu'ont-ils d'étrange ?

Puisque le titre du film nous les annonce comme tels, forcément on s'interroge. Et comme les réalisateurs (Christopher Radcliff et Lauren Wolkstein) brouillent les pistes, on n'a pas facilement la réponse à ces interrogations. Ils se disent frères, mais le sont-ils ? Et sinon, d'où se connaissent-ils? Sont-ils complices et de quel méfait ? Y-a-t-il, malgré la différence d'âge (l'un a pas loin de trente, l'autre 14-15), un lien amoureux entre eux ? Le plus jeune des deux (qui se fait appeler Jeremiah) semble vivre en flashback un cauchemar récurrent dont on nous distille des bouts qui nous maintiennent longtemps dans l'incertitude. Et pourquoi semble-t-il jaloux des relations féminines de son aîné ? Et pourquoi celui-ci se laisse-t-il aller à des gestes brutaux à son égard ?
Comme le film adopte souvent le point de vue de l'ado, clairement désemparé mais sans qu'on sache trop pourquoi, le spectateur tâtonne et s'interroge. Le film ne répond qu'imparfaitement à ces questions. Il ne va pas au bout des choses. Il nous laisse trancher, reconstituer vaille que vaille la trame de ce qui s'est vraiment passé, mais au final, seul l'ado détient l'ensemble de la vérité. Naturellement, il est forcément sous le choc des événements, ce n'est qu'un tout jeune ado et toute une partie des faits lui semble indicible. Ne l'évoquant qu'en pensée, il la gardera pour lui et devra en porter seul le poids. Y parviendra-t-il ?

Difficile de ne pas sortir un tant soit peu frustré de la projection de ce film. On a le sentiment que les deux réalisateurs ont eu peur de traiter clairement les thèmes abordés qui, oui, sont des thèmes lourds : homosexualité, pédophilie, inceste, parricide, rien que ça. Le film en souffre : trop d'ellipses, trop de sous-entendus, de demi-hardiesses, demi-vérités. On espère jusqu'à la fin une scène qui, d'un seul tenant, nous dise tout, mais elle ne vient jamais. Même la fin est ambiguë, ouverte.

Ceci étant, la photo est belle, les deux acteurs principaux (Alex Pettyfer dans le rôle du "grand frère" adulte et James Freedson-Jackson dans celui de l'ado) sont bons et parfaitement crédibles.
Grâce à eux, et malgré le montage alambiqué d'une histoire insuffisamment exploitée, le film est une demi-réussite.