Landes douillettes de Troy
Comme beaucoup d'enfants de ma génération, j'avais beaucoup apprécié Troy quand je l'avais vu pour la première fois. Bien sûr, je me doutais aussi qu'en le regardant de nouveau aujourd'hui,...
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le 6 déc. 2022
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Comme beaucoup d'enfants de ma génération, j'avais beaucoup apprécié Troy quand je l'avais vu pour la première fois. Bien sûr, je me doutais aussi qu'en le regardant de nouveau aujourd'hui, pratiquement deux décennies plus tard, je serai bien plus critique sur ledit film. Ayant lu l'Iliade très récemment, et de surcroît, appris l'existence d'une Director's Cut, cela m'a donné envie de revoir ce film.
Alors ? Que vaut ce Troie Director's Cut ?
Globalement, le long-métrage s'en tire plutôt bien, on n'est pas non plus face à quelque chose de très original, mais le visionnage s'est révélé agréable.
Déjà, il y a des partis pris intéressants (et logiques) au niveau du scénario. L'histoire est ici ancrée dans le réel ; contrairement à l'Iliade, on ne voit pas ou n'entends pas les dieux : seule une scène de dialogue entre Achille et sa mère Thétis se montre un poil implicite à ce niveau-là. C'est plutôt une bonne chose, car outre le fait que ç'aurait sûrement encore allongé la durée du film, cette version dure déjà plus de troy heures (oui, j'ai osé faire cette blague), ça l'aurait probablement rendu très kitsch par moment. Pour le coup, je pense qu'il faudrait se tourner vers l'animation si on souhaiterait avoir une adaptation fidèle de l'épopée d'Homère.
Forcément, sans la présence des dieux, il a fallu justifier de nombreux choix, notamment la manière dont se conclut de nombreux combats comme que le duel entre Paris et Ménélas, ainsi que la présence d'Achille, qui ici se bat pour la gloire, dans l'unique de voir son nom graver dans l'histoire.
Ce dernier choix coïncide, par corollaire, avec un autre parti pris par les scénaristes : être du côté des Troyens.
En l'occurrence, là où Homère ne se montrait pas manichéen, bien que plus du côté des Argiens que des Troyens, le film Troie prend quant à lui très clairement parti pour le camp d'Hector. Exit donc la scène dans laquelle ce dernier est prêt à sacrifier ses soldats dans le but de livrer le cadavre de Patrocle à ses chiens, exit aussi la scène dans laquelle Achille court derrière Hector tout autour de la Cité de Troie (je ne vois pas comment cette scène aurait pu passer au cinéma de toute façon). À la place de cette dernière, on retrouve le désormais mythique duel très chorégraphié (trop peut-être), mais tout de même très agréable à visionner, entre Achille et Hector.
Les Grecs étant présentés comme les méchants de l'histoire, on suit ici un Achille qui n'hésite pas à massacrer les fidèles d'un temple, un Ajax qui semble avoir autant de neurones que de flèches dans son carquois (il n'utilise jamais d'arc au cas où vous n'auriez pas compris la vanne), ainsi qu'un Ménélas qui justifie à lui seul le départ d'Hélène. Sans surprise, Agamemnon, qui est déjà un bien beau connard dans l'épopée, l'est encore plus dans le film.
L'absence des dieux rend d'ailleurs les héros bien plus vulnérables. La réponse d'Achille à l'enfant qui lui demande s'il est réellement invincible, s'il est le fils d'une déesse, est plutôt bien trouvée : effectivement, pourquoi s'encombrer d'un bouclier si on est invincible ? Cette réplique se montre d'autant plus pertinente quand on sait que la légende entourant l'invulnérabilité d'Achille était probablement étrangère à Homère.
Au niveau des héros d'ailleurs, sans aucune surprise, beaucoup n'apparaissent pas : Diomède, Ajax fils d'Oïlée, Sarpédon, Idoménée… pour le coup, ses absences sont pleinement justifiées : ç'aurait soit fait doublon avec d'autres personnages, soit leur présence est liée à une ou plusieurs divinités bien spécifiques.
Le rôle, la potentielle mort et le destin des différents personnages, sont, eux aussi, complètement différents. Par exemple, en plus de tuer Ménélas afin de sauver son frère, Hector assassine Ajax tout juste après. Agamemnon se fait quant à lui tuer par Briséis à la fin du film : ce qui m'a énormément fait plaisir.
Forcément, l'Iliade se concluant sur les funérailles d'Hector, le film a dû aller un peu plus loin afin de pouvoir donner au spectateur une fin plus satisfaisante. Ainsi, Troie semble (vous noterez le « semble », n'ayant pas encore lu ces ouvrages) aussi s'inspirer de l'Éthiopide et du Sac de Troie d'Arctinos de Milet ainsi que de la Petite Iliade de Leschès de Pyrrha, notamment pour que le long-métrage puisse se conclure après les scènes de l'entrée du cheval dans Troie, de la mort d'Achille et de la fuite des derniers Troyens.
Sans être aussi gore que l'épopée, le film est surprenamment bien plus violent que je n'aurais pu le croire. La version Director's Cut accentue, parait-il, le côté « sans pitié », mais force est de constater qu'outre les nombreuses profusions de sang, que les soldats grecs ne font absolument aucun cadeau aux civils troyens lorsqu'ils prennent la Cité : ils foutent le feu aux habitations, assassinent tout ce qui bouge, pendent des gens au hasard, violent les femmes, jettent les bébés dans les flammes… bref, de quoi passer un bon moment en famille !
Film « d'époque » oblige, on a affaire à quelques anachronismes. À la limite, ce n'est pas ce qui me dérange le plus : ce n'est pas comme si on pouvait être très précis sur les événements relatés dans l'Iliade. Au cas où le sujet vous intéresserait, je ne peux que vous conseiller de visionner cette vidéo.
J'ai été plus choqué par l'illogisme derrière certaines scènes, notamment la manière dont certains personnages tiennent leurs armes et leurs boucliers : défaut très présent lors du duel entre Achille et Hector justement. Aussi, le coup de la flotte grecque cachée derrière une côte Troade : pour le coup, on aurait pu faire moins ridicule.
Heureusement, certaines scènes s'en tirent mieux. Pour le coup, je ne peux que penser au moment où Priam rend visite à Achille afin de pouvoir récupérer le cadavre de son fils, probablement l'une des scènes les mieux réussies du film, qui, de surcroit, rend honneur à un Peter O'Toole qui semblait en avoir bien besoin dans sa carrière.
La composition de James Horner n'est pas mauvaise, mais pas des plus inoubliable non plus (ce n'est forcément pas aussi mémorable que la BO de Titanic) : certains thèmes revenant en boucle sans pour autant nous marquer.
Pour le coup, je pense que s'il y a bien une personne à saluer, c'est le scénariste David Benioff, principalement connu aujourd'hui pour son travail sur la série Game of Thrones : adapter l'Iliade n'était pas chose aisée, et pour le coup, il s'en est vraiment très bien tiré.
Enfin, n'étant pas un amateur du cinéma de Wolfgang Petersen, difficile pour moi de voir une thématique récurrente ni de placer cette œuvre dans sa filmographie : j'ose espérer que vous pardonnerez mon manque de connaissance sur le sujet.
Un bon film qui n'a rien de mémorable en somme, pas aussi épique qu'un Gladiator sortit quelques années plus tôt, mais je n'ai pas non plus eu cette sensation d'avoir vu un film de commande. De toute façon, si vous voulez voir un péplum relativement récent, vous n'avez pas énormément de choix.
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le 6 déc. 2022
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