Deux jeunes campagnards quittent la ferme familiale, par ennui, pour se rendre en train à Kaliningrad, bourgade industrielle donnant sur la Baltique. Bartas s'évertue à sublimer un paysage nonchalant de l'extérieur par une mise en scène attachante de lieux de promenades citadines.
Errant sur la côte, deux femmes accompagnées d'un aliéné s’assoient sur le béton gris. Le rythme s'effiloche, les mots perdent de leur sens, perdent leur place dans ce cinéma. La saveur de la rencontre terne et séquentielle s'alimente de regards furtifs entre les deux duos que l'on est amené à suivre. Un intérêt réciproque et sans attaches se dessine.
Les jeunes hommes déambulent aux côtés des femmes, tantôt par deux, tantôt à quatre, parfois aussi seuls. Dans ce cas, la solitude l'emporte le plus souvent, pour le plus grand bonheur du spectateur. Bartas suit ces péripéties avec une minutie profonde.
La maison de jeunes gens perdues leur refuse une chambre, une des jeunes femmes ayant causé des soucis par le passé, quand elle rentrait accompagnée. Une crise d'angoisse commence et se résout rapidement, lentement, follement ; sur un éclat de rire incessant. Tandis que leur chemin se voit agrémenté de tuiles à gravir pour finalement retomber au fond du trou de l'habitation déjà insalubre.
La présence dans la cour de l'hôtel d'un homme accroché péniblement à sa canne est d'abord évasive, avant d'alimenter subitement un moment divinatoire au cours d'une discussion, alimentée d'un drôle d'alcool avec un des jeunes de la troupe, autour de la quiétude comme horizon d'attente.
Les errances post-adolescentes captées par un mouvement perpétuel et ondulatoire rendent propices au visionneur de s'adonner à une contemplation sur ses propres mémoires, ses propres bribes de passé. Le reflet de l'éternel retour dans la vitre d'un train en partance est à ce titre exemplaire de la profondeur de l'image poétique que propose ce film radical dans son esthétique, authentique dans sa description d'un voyage quelconque, puissant dans les manières d'être de campagnards en lutte contre l'ennui de l'univers campagnard, familial, traditionnel.
Ce film exigeant se médite pas à pas. Si tant est que l'on s'assoit dans le bon fauteuil, tranquillement, et sans attente quelconque.