True Story fait preuve, à chaque instant, d’un narcissisme dégoûtant qui ne semble avoir d’autres motivations que de prouver – à qui ? – que ses deux acteurs centraux, figures essentiellement comiques, sont capables du tragique le plus politique et brutal qui soit. Ainsi, le film s’ouvre sur un ralenti à l’image superbe où le spectateur peut voir une peluche balancée dans une valise contenant, entre autres, le corps mort d’une petite fille. Cette scène initiale pose d’emblée problème tout en annonçant la couleur de ce qui suit : une esthétisation complaisante de la violence ici traitée au profit d’un parcours « d’introspection » (selon les mots du journaliste) dont la finalité n’est guère de condamner l’horreur, mais de mettre en scène une guérilla psychologique entre un reporter fraudeur et un meurtrier aussi convaincant dans son rôle qu’un poisson mort dans son bocal. En inscrivant de prime abord son récit dans le cadre d’une « histoire vraie » (selon les mots employés par le titre), en le refermant par les traditionnelles images d’archives avec écriteaux, le film s’octroie le droit ô combien usurpé de placer le massacre d’hommes, de femmes et d’enfants en toile de fond que l’on va, de temps en temps, raviver pour engendre moult larmes ; son cœur battant n’est autre que le rapport de fascination entre deux hommes clichés dont les enjeux dramatiques respectifs paraissent empruntés à d’autres œuvres. Dans ce vaste kaléidoscope d’images trafiquées et d’émotions mal fabriquées, pas le moindre mystère ; car il s’avère plutôt paradoxale qu’une histoire vraie semble aussi fausse, et donne lieu à une telle masturbation misérabiliste dont le dessein – paradoxal, et manqué – consiste à créer des icônes. Effarant.