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Tuer l'indien dans le cœur de l'enfant par Christine Deschamps

Civilisation : "État de développement économique, social, politique, culturel auquel sont parvenues certaines sociétés et qui est considéré comme un idéal à atteindre par les autres." Cela ne concerne-t-il donc aucun pays de notre planète ? Le gentil Canada, patrie du sirop d'érable et des chanteurs à voix, modèle de quant-à-soi face à l'encombrante Amérique de Trump, havre de paix de la Servante Écarlate, horizon professionnel idéal pour les émigrants français, le gentil Canada, disais-je donc, avec ses caribous et ses jurons délicieusement surannés, vient de faire un vilain bruit d’œuf punais tombant de sa boîte sur le carrelage de la cuisine. Car lui aussi s'est construit sur l'éradication à bas bruit de ses premiers habitants, à coups d'acculturation forcée et de mauvais traitements qui ont culminé avec les tortures infligées aux enfants indigènes dans des pensionnats destinés à "tuer l'indien dans le cœur de l'enfant", comme l'indique le titre de ce documentaire glaçant. Pensionnats tenus par les thuriféraires de Jésus, pour parachever le tableau. On n'en est plus à une hypocrisie près, n'est-ce pas ? On connaît, depuis les lugubres affaires irlandaise ou bostonienne l'appétence de certains prédateurs pour les ordres. On sait que le scandale est mondial, même si on commence seulement à en découvrir le systématisme épouvantable. Eh bien oui, les missionnaires cachaient dans leurs rangs des hyènes se repaissant de la douleur des plus faibles. Et leur hiérarchie a toujours couvert leurs exactions, parce que les hyènes gravissent facilement les échelons et savent s'entourer d'aveugles et de sourds. Et oui encore, l'actuel gouvernement canadien, en dépit de déclarations retentissantes, n'assume pas vraiment ses responsabilités et rechigne à procéder aux compensations coûteuses qui s'imposeraient. Mais ça n'est pas tout, même si ça suffirait déjà à notre édification et à notre écœurement : aujourd'hui encore, après la fermeture en 96 seulement du dernier des pensionnats de l'horreur, les femmes amérindiennes sont victimes de disparitions inquiétantes, sur lesquelles n'enquêtent que paresseusement les policiers canadiens. Pourquoi ? Parce que les hyènes gravissent facilement les échelons et savent s'entourer d'aveugles et de sourds dans les forces de police aussi. Il faut que quelqu'un trouve intérêt à maintenir le statut de victime d'une communauté entière pour que cela puisse arriver, encore et encore, sur des siècles. Sinon, ça se serait éteint de soi-même, comme tout le reste. A qui profite le crime ? Le documentaire tourne son objectif vers les forces de police elles-mêmes... C'est l'un des grands intérêts de cet excellent reportage : de mettre des visages sur des comportements tellement monstrueux qu'ils en deviennent presque abstraits. Il y a le regard fuyant de Justin Trudeau qui fait une déclaration tonitruante de bonne foi factice devant ses pairs, à l'interpellation des autochtones. Il y a aussi la goguenardise d'un enquêteur véreux qui tente de la dissimuler sous une sollicitude factice aux journalistes français venus interroger la responsabilité de la police locale. On s'attendait aux larmes des victimes; c'est infiniment plus choquant d'être confronté à la mauvaise foi et à l'intransigeance des bourreaux. Et à leur banalité; ce sont des gens qui ressemblent... à des gens. Mais le verni craque à la première occasion tant ils sont sûrs de leur avantage, parce qu'ils jouissent depuis toujours d'une impunité qui les rend présomptueux. Ces faux-semblants, on saura désormais les reconnaître, ils sont décelables à quelques signes vraiment ténus, mais ce documentaire sert de révélateur et d'entrainement et, rien que pour cela, est hautement recommandable. Le vent tourne, un jour ou l'autre.

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le 16 avr. 2021

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