Impossible de voir "Un chant d'amour" sans avoir le contexte en tête. En 1950, l'homosexualité est un délit. Jean Genet, homosexuel assumé, tourne une histoire de 24 minutes sur l'amour et le désir entre deux prisonniers.
L'intrigue est extrêmement simple : on suit le surveillant qui regarde les prisonniers à travers l’œilleton de la porte, et parfois la caméra s'échappe avec l'esprit des prisonniers.
Le film commence de façon assez crue, et vous aurez une perception différente selon que vous êtes (ou non) sensible au charme des acteurs. 25 minutes sur ce tempo seraient totalement vaines, rien d'autre qu'un film érotique, mais au bout de 10 minutes, on bascule dans la poésie. Par la grâce d'une paille, d'un trou dans le mur et d'une cigarette, la relation entre les deux prisonniers devient autre chose qu'un fantasme, et touche à l'universel sur le thème de l'amour impossible.
L'image est plutôt maîtrisée grâce à la caméra de Jacques Natteau, chef opérateur de Jean Cocteau. Il s’accommode des conditions de tournage (3 bouts de ficelle, les extérieurs sont tournés dans le jardin de Cocteau). Quant à la bande son, c'est très simple, il n'y en a pas. C'est un film muet et sans musiques, même si Gavin Bryars s'amusera à en ajouter une en 1973.
Un chant d'amour est une curiosité cinématographique intéressante, trouvable très facilement sur Internet. Attention les yeux pour les plus jeunes, tout de même.