Pépite du film noir, Un si doux visage allie l’intérêt d’un scénario habile à une esthétique d’une grande maîtrise. Comme son titre l’indique, toute l’intelligence des personnages passe par leur faciès, qu’il soit d’ange ou non. De ce point de vue, le choix des comédiens est d’une grande perspicacité. Jean Simmons est extraordinaire de séduction machiavélique, toujours sur le fil : mutine lorsqu’elle séduit, admirée par son talent à obtenir ce qu’elle désire, fascinante durant les séquences récurrentes qui la voient jouer au piano. Quant à Mitchum, il se retrouve piégé par le personnage qu’il campe, resucée assumée de son jeu sempiternel ici retourné contre lui-même : désabusé mais manipulé, homme à femme devenu jouet d’une perverse, il tente de conserver la face alors qu’il ne maîtrise aucun des enjeux du récit. Plus on avance, plus il semble s’en sortir, plus inextricable devient le traquenard.
La grande force du film est de se passer dans une atmosphère dénuée de réel pathos : sans fioritures, sans excès, chacun joue son rôle et pense connaitre ses répliques, ainsi que l’issue du drame. Mais perversement, les événements s’enchainent selon un contrôle légèrement différent qui, à mesure que les dénouements s’imposent, rendent impossible une résolution sereine. La maîtrise rigoureuse des cadres, le recours fréquent mais très cohérent aux panoramiques et aux zooms insiste sur ces déplacements désaxés entre les protagonistes jusqu’à la trajectoire finale, annoncée tragiquement et fondamentalement inévitable.
Un archétype du genre, donc, doublé d’une grande rigueur formelle.
Sergent_Pepper
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le 3 nov. 2013

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Sergent_Pepper

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