Un good german
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En plus de se fendre d'une critique acerbe de la guerre en la tournant en ridicule, Denys de la Patellière signe avec un taxi pour Tobrouk une très belle histoire humaine. Qu'elle soit contée du point de vue français par l'intermédiaire de 4 personnages bien colorés menés par le succulent Ventura, ou Allemand via les yeux d'un pauvre intrus parachuté dans le précédent groupe bien malgré lui, le cinéaste engage avec subtilité les rouages de vains affrontements qu'aiment se livrer les hommes.
Pour donner de la force à son propos, il isole, dans un espace immensément vide, les différents personnages de son histoire, en faisant preuve d'une farouche inspiration pour composer ses cadres au moyen d'une photographie splendide. A l'origine de chaque plan de son film s'impose un véritable savoir faire, un oeil affûté qui parvient à saisir la force graphique d'un espace pourtant privé de frontières. Les noirs et blancs sont très travaillés et génèrent des ambiances qui témoignent, avec beaucoup de réalisme, du côté aride des paysages désertiques dans lesquels prend place l'histoire. Ce sens de l'image permet une mise en valeur solide de tous les personnages qui n'ont plus qu'à rendre honneur au talent certain de leur metteur en scène.
Et le moins qu'on puisse dire c'est qu'ils ne manquent pas le coche. Un taxi pour Tobrouk est un véritable film d'acteurs, ces derniers sont tous complètement investis et animés avec beaucoup de justesse par un réalisateur qui sait ce qu'il veut. Ils sont aussi servis par des dialogues on ne peut plus savoureux, d'une saveur toujours aussi particulière inhérente à la marque de fabrique de l'inimitable Michel Audiard. Qu'ils composent des punchlines fleuries ou des traits d'esprit croustillants, ils savent se faire cinglants pour apporter au film une ambiance de franche camaraderie qui fleure bon l'authenticité et qui, en plus de provoquer le sourire à de multiples reprises, interrogent également sur les absurdités de l'acte même de la guerre avec intelligence.
Denys de la Patellière joue en effet la carte de l'humour pour asseoir l'antimilitarisme dont il fait preuve avec Un taxi pour Tobrouk, mais il n'en oublie pas pour autant qu'il traite d'un sujet grave et choisit de ne pas le banaliser en se contentant de faire rire. Bien au contraire, l'ambiance détendue qu'il a su instaurer n'a pour seul but que de surprendre à l'occasion d'un final des plus ravageurs, qui par son parti pris sans concession, apporte au film une aura bien particulière. En effet, si le sourire est de circonstance pendant près d'une heure et demie, c'est une note d'intention résolument sombre, de celle qui vous glace le sang et vous noue la gorge, qui ferme la marche.
Pour en prendre plein les mirettes, c'est par ici !
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de moins de 1h30, Les meilleurs films français et Un cacheton en N&B pour les intégristes de la couleur
Créée
le 16 févr. 2016
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4 commentaires
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