Weird Science impressionne par la valeur prophétique qu’il tend à acquérir aujourd'hui, à l’ère du tout-numérique où la virtualité se confond de plus en plus avec le réel, où les créatures de charme construites sur ordinateur ou dans un décor dépouillé de ses aspérités – villa, draps blancs, piscine – s’invitent dans les fantasmes individuels au point de contaminer et d’homogénéiser l’imaginaire singulier. Car en incarnant un assemblage informatique sous forme d’une femme véritable, John Hughes propose un acte de foi optimiste en l’humanité, l’idée selon laquelle la révolution informatique dont le cinéaste est le contemporain se transformera en garante de l’éducation sexuelle, voire en grande-soeur capable de transmettre son expérience et ainsi dévier la trajectoire initiale de l’adolescent, de rectifier le tir. Le long métrage est un récit d’apprentissage, comme toutes les oeuvres de John Hughes en somme : comment renoncer non pas à ses fantasmes mais à l’aveuglement qu’ils peuvent créer afin d’investir le vivant, de vivre pleinement sa vie ? Et c’est ainsi, il me semble, qu’il faut comprendre la résolution quelque peu puritaine des conflits mis en scène dans ses films : comme quelque chose à garder, une petite morale, un retour au calme après le déchaînement des pulsions et des désirs.


Si Weird Science pèche par une surcharge en pop culture, multipliant les références qui n’ont pour seul effet que de participer au chaos et à l’accélération du rythme, si le surjeu des deux comédiens principaux donne lieu à quelques scènes dissonantes, le long métrage offre une fable intelligente sur notre relation au numérique et atteste le talent de Hughes dans la mise en scène, le découpage des scènes, leur agencement dans un crescendo burlesque savoureux.

Créée

le 15 oct. 2020

Critique lue 107 fois

4 j'aime

2 commentaires

Critique lue 107 fois

4
2

D'autres avis sur Une créature de rêve

Une créature de rêve
Gand-Alf
7

Frankenweirdo.

Qui n'a pas rêvé un jour de créer l'homme ou la femme parfaite, une créature de rêve dont l'unique raison de vivre serait de réaliser nos fantasmes lubriques les plus fous ? Venant tout juste de...

le 2 nov. 2013

15 j'aime

Une créature de rêve
Fatpooper
8

Fantasme Adolescent

John Hughes, décidemment, est celui qui arrive au mieux à comprendre et représenter les fantasmes adolescents masculins sur grand écran. Il se souvient bien qu'à 15 ans, le loser boutonneux qu'il a...

le 22 avr. 2012

14 j'aime

2

Une créature de rêve
Alligator
5

Critique de Une créature de rêve par Alligator

Bordel que ce film a vieilli... ou que j'ai vieilli. J'étais fou de ce film... parce que j'étais fou de Kelly Le Brock et la petite blonde que j'ai retrouvé me semble dans l'épisode de la limousine...

le 25 déc. 2012

8 j'aime

Du même critique

Sex Education
Fêtons_le_cinéma
3

L'Ecole Netflix

Il est une scène dans le sixième épisode où Maeve retrouve le pull de son ami Otis et le respire tendrement ; nous, spectateurs, savons qu’il s’agit du pull d’Otis prêté quelques minutes plus tôt ;...

le 19 janv. 2019

89 j'aime

17

Ça - Chapitre 2
Fêtons_le_cinéma
5

Résoudre la peur (ô malheur !)

Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point...

le 11 sept. 2019

78 j'aime

14