L'intégration capillaire

Le film n'est pas incroyable, mais il se suit sans prise de tête, même si les personnages ne sont pas plus attachants ou intéressants que ça. Ce qui m'a surtout interpellé dans "Une femme de tête", c'est le message que le film tante de faire passer, à savoir s'accepter au naturelle quand on fait partie de la communauté afro-américaine, même s'il parvient à toucher les personnes de couleurs en général.

De nos jours, il est très difficile lorsqu'on est une femme de couleur de trouver un modèle auquel s'identifier, et il en est de même pour les hommes. Il n'y a que trois types de femme nous représentant dans les médias : celle à la peau très clair et aux boucles soyeuses, celle à la peau d'ébène au crâne rasé ou aux cheveux coupés courts, et celle à la peau noire et aux cheveux lissés. Bien évidemment, il y a des exceptions, mais elles restent encore trop peu présentes, justement.

Il est d'ailleurs important de constater que cela commence dès l'enfance, au moment où les enfants ont le plus besoin d'un modèle à suivre. Chez Disney, il y a bien Tiana dans "La Princesse et la Grenouille", mais elle passe 75% du film dans la peau d'une grenouille, alors ce n'est pas la meilleure représentation qui soit. Les chanteuses noires ou métisses sur le devant de la scène ne sont pas mieux, car elles ne sont que très rarement en public avec leur vrai texture de cheveux. Même si je n'ai rien contre, parce que c'est plutôt sympa de pouvoir changer de tête quand bon nous semble ; entre les perruques et les lissages ; on a plutôt tendances à les voir avec des coupes les faisant entrer dans la "norme".

Le pire, c'est qu'on pourrait penser qu'arrivé en 2019, on devrait en avoir terminé avec l'idée que "les cheveux bouclés, frisés, crépus, ..., ne font pas professionnel et n'aident pas à s'insérer dans le monde du travail", mais ce n'est malheureusement pas le cas partout. Ayant moi-même les cheveux coupés court pour les laisser reprendre vie et retrouver leurs boucles naturelles, j'ai souvent des réflexions telles que "Pourquoi tu ne les lisses pas ?", "Tu devrais te faire des mèches, ça serait plus sympa" ou autre et c'est vraiment pesant parce que je ne comprends pas en quoi laisser mes cheveux au naturel en tant que femme métisse ne devrait pas être aussi accepté que les laisser ainsi en tant que femme aux cheveux naturellement lisses ou ondulés.

Torturer ses cheveux pour les dénaturer ne devrait pas être considéré comme normal. On ne doit plus retrouver des écoles comme le Lycée Bel Air en Guadeloupe qui interdit des coupes de cheveux visant majoritairement des élèves noirs. On ne doit plus retrouver des critiques déplacés et racistes telle que celle de Giulina Rancic à propos de la coupe de cheveux, pourtant courante chez les personnes de couleurs et blanches, de Zendaya. On ne doit plus tomber sur des recruteurs qui vous font clairement comprendre qu'il faudra faire des chignons, parce que "ça passe mieux au sein de l'entreprise". Ah et, même si ce n'est pas méchant lorsque c'est demandé, on ne doit plus se retrouver confronté à des gens qui te sortent "Je peux toucher tes cheveux, on dirait des nuages !". A quel moment cette demande est adressé à d'autres personnes que des noirs ou des métisses ? Personnellement, je n'ai jamais entendu cette question adressée à un blanc, un asiatique ou quelqu'un d'une autre communauté à la texture de cheveux similaire.

Alors, je tiens à remercier Netflix pour l'initiative qu'ils ont eu d'aborder ce sujet, parce que le problème ne se pose pas seulement de la communauté noire face aux autres, mais souvent au sein de la communauté elle-même et c'est ce qu’il y a de plus triste.