Après Psychohydrography, Peter Bo Rappmund réalise un second opus qui apparaît rétrospectivement comme le brouillon rococo du troisième. Il installe la thématique des frontières en s'attachant au Nevada, état des USA en touchant sept autres. Contrairement aux deux autres films et documentaires de Rappmund, celui-ci est un court. Il propose une demi-heure de pure contemplation, en compilant des paysages capturés dans ces sept « intersections », pour finalement nous perdre dans un ciel mauve et saumon.
La bande-son se compose de bruits improbables, comme ces éclat de voix de basse-cours, ces vents, tous accentués et souvent en décalage avec les lieux à l'écran ou les mouvements suggérés. Cette particularité est assortie au travail visuel, les teintes étant saturées, le time-lapse principalement usé pour décupler des effets saccadés. Rappmund tend au symbolisme et au surlignage. Il alourdit, exagère, en gardant une distance qui donne un effet dissocié, entre le caractère éthéré des territoires et l'hystérie confuse des forces vives qui s'agiteraient en-dessous.
Le film n'est pas orienté faits (ou êtres) mais choses, avec une franchise servant sa démonstration. Rappmund semble attaché à trouver des traces (détritus mécaniques) donnant un avant-goût de profanation de cimetière en période post-apocalyptique. L'auteur se sent manifestement très libre et n'éprouve pas le besoin de gonfler son film en thèse apriorique, contrairement à ce qui se produira sur l'opus suivant Tectonics. Il aura certes une allure plus éloquente, une texture relativement policée, mais ses ambitions « métaphysiques » ne feront que créer un gouffre entre la donne objective et le justificatif dont elle se pare – qui ne fait qu'acheter le respect.
https://zogarok.wordpress.com/2016/03/03/rafale-de-courts-n11/