En dépit d'un pitch qui n'est pas des plus orignal, Wake Wood est une des très bonnes surprises de cette édition 2011 de l'Etrange Festival. Réalisé par le peu productif David Keating – sa dernière fiction remonte à 1996 et n'avait par ailleurs rien à voir avec le genre fantastique – cette péloche en provenance du Royaume-Uni retrace l'itinéraire d'un couple face au deuil de leur petite fille qui, exilé dans la bourgade irlandaise de Wake Wood, découvre l'existence d'un rituel pouvant la faire revenir à la vie pour quelques jours.
Le premier point intriguant de Wake Wood est sa production, confiée à la Hammer. Alors que l'avis de décès de la mythique boîte anglaise semblait signé depuis longtemps, ce film marque son retour, peut-être pas fracassant, mais en tout cas tout à fait honorable dans l'horreur gothique. Car Wake Wood reprend beaucoup de symboles des anciennes créations sans oublier de les remettre au goût du jour. Ainsi, si la campagne irlandaise s'étend à perte de vue entre plaines et bois plombée par un ciel gris, des éoliennes viennent aujourd'hui briser son austérité. Malgré ces quelques clins d'œil à une modernité naissante, le temps semble lui s'être figé dans ce village peu accueillant, bercé de rituels ancestraux.
Sous l'autorité de l'ancien vétérinaire au flegme typiquement britannique (le très bon Timothy Spall alias Queudver dans la saga Harry Potter), ces rites païens nécromantiques auraient du reste mérité une attention plus soignée dans leurs description et historique. Ceux-ci se limitent en effet uniquement ici à une toile de fond qui frustre par son manque d'approfondissement. Toujours est-il que la mise en scène de ses liturgies rurales est remarquable, prenant le parti d'une représentation extrêmement réaliste, quasi organique. Les corps sont déchiquetés, broyés, triturés afin de perpétuer l'ancestrale succession vie/mort.
Keating évite donc les effets ésotériques de bas étages, préférant s'intéresser à la violente confrontation entre l'homme et la nature, celui-ci tentant vainement de la dompter. Nature sauvage qui est la cause de la mort prématurée d'Alice, dont la douleur aveuglante des parents les poussera à adopter une attitude irrationnelle et évidemment destructrice. Aidan Gillen et Eva Birthistle sont d'ailleurs plutôt juste en couple anéanti, permettant d'apporter la crédibilité nécessaire au récit.
Si la première partie de Wake Wood est donc irriguée de moments fantastiques agressifs très efficaces, la seconde plonge dans une horreur plus viscérale. Or c'est un style que Keating maîtrise beaucoup moins. Les meurtres s'enchaînent rapidement avec une rupture de rythme rendant le scénario assez confus. Les effets spéciaux accusent eux un budget réduit et l'effusion d'hémoglobine n'est pas réellement convaincante. On ressent également la limite du jeu d'Ella Connolly, incarnant la jeune Alice revenue des morts, la petite fille peinant parfois à sortir de son interprétation d'enfant glacial et absent qui, si elle s'avère bien entendu efficiente en terme d'angoisse, manque souvent de contrastes. Mais les dernières minutes du film annonçant un retour à la normale sont stoppées net par un cliffhanger bien vu et vraiment flippant, permettant définitivement à Wake Wood de s'élever au-delà de la série B basique.
Non sans rappeler The Wicker Man, autre film britannique avec un Christopher Lee adepte lui aussi du paganisme, Wake Wood réussit le tour de force d'être un bel hommage au cinéma de genre anglais tout en apportant une réelle fraicheur à la thématique de la sorcellerie pourtant déjà largement ressassée. Un film qui joue également habillement avec les mécanismes de la peur, se révélant bien plus effrayant que ce à quoi l'on pourrait s'attendre. On espère donc que la Hammer continuera sur cette lancée avec The Woman in Black de James Watkins (Eden Lake) prévu prochainement.