C'est bath Mann
Un Anthony Mann avec James Stewart, rien de plus classique. Sauf que le personnage principal est une winchester 73. Carabine à 15 coups, surnommée "the gun that won the west », elle attire à elle...
Par
le 26 janv. 2011
51 j'aime
15
Winchester 73 marque le premier chapitre d’une collaboration fructueuse entre Anthony Mann et James Stewart : le comédien sera l’un des plus brillants interprètes du cinéaste, à même de restituer la complexité de ses personnages, souvent hantés par un passé et en proie à des accès de violence difficilement répressibles.
Ce western joue avec brio la carte de la tragédie. Les deux ennemis, réunis à la faveur d’une coïncidence dans un concours de tir, se ressemblent trop pour que leur haine soit commune, et passeront la majeure partie de l’intrigue à se poursuivre. Entre temps, le récit s’attachera à suivre le parcours de l’arme éponyme, symbole du prestige et de la perfection, et qui passera de mains en mains, l’occasion de portraits croisés des différentes figures de l’ouest, du cowboy aux hors-la-loi en passant par l’indien.
L’univers est sombre, souvent nocturne, et la grandeur du personnage principal ne peut se fonder sans zones d’ombre. C’est ici la densité qui prime, et pour l’exprimer, le visage de Stewart, et plus particulièrement son regard, sont des alliés essentiels. Son caractère torturé reste toujours en toile de fond, et offre des accès de violence d’une rare intensité, alors que Mann offre au spectateur ce qu’il est en droit d’attendre face à un western : cavalcades, fusillades, attaques d’indiens, dans une gestion superbe des espaces, notamment grâce à un travelling on ne peut plus fordien aboutissant sur une crête où se tiennent les apaches.
La réussite du film tient dans l’alliance de deux classicismes : celui, d’abord, du genre, où rien ne manque au cahier des charges, et où la galerie de personnages secondaires compose un portrait parfait de l’Ouest ; celui, ensuite, plus littéraire et séculaire, de la tragédie, par les évolutions de la relation entre le héros et son ennemi.
La révélation tardive sur leur lien, en forme de twist, permet un véritable coup de sang dans l’intrigue. Frères ennemis liés à jamais par le meurtre du père, le récit rétrospectif permet une relecture habile de la symbolique pesante sur le concours de tir initial, et ces cibles impeccablement criblées par les deux rivaux.
Le duel final prend ainsi une résonance particulière quant à ses enjeux, et se trouvera d’autant plus magnifié par sa maîtrise formelle : dans des roches qui annoncent le final brutal de L’homme de l’Ouest et prouvent la prééminence du paysage chez Mann, la lutte se conduit avec un parti pris esthétique singulier. Dans la majorité des plans, le cadrage permet de voir les deux combattants, pourtant fortement éloignés, dans une union fratricide superbe de panache et de dramatisation.
Le fil conducteur du récit aura été plus qu’un symbole : quête des personnages, objet de convoitise, figure du progrès de l’ingénierie et du savoir-faire humain, la Winchester 73 reste avant tout une arme.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Western, Violence, Les meilleurs westerns, Les meilleurs films sur les relations fraternelles et vu en 2017
Créée
le 16 déc. 2017
Critique lue 897 fois
35 j'aime
8 commentaires
D'autres avis sur Winchester 73
Un Anthony Mann avec James Stewart, rien de plus classique. Sauf que le personnage principal est une winchester 73. Carabine à 15 coups, surnommée "the gun that won the west », elle attire à elle...
Par
le 26 janv. 2011
51 j'aime
15
Lorsque deux silhouettes à cheval filmées dans un superbe noir et blanc parcourent un terrain en relief lors d'un générique introductif dépourvu d'une chanson salvatrice, il apparaît comme une...
le 4 sept. 2021
35 j'aime
10
Winchester 73 marque le premier chapitre d’une collaboration fructueuse entre Anthony Mann et James Stewart : le comédien sera l’un des plus brillants interprètes du cinéaste, à même de restituer la...
le 16 déc. 2017
35 j'aime
8
Du même critique
Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...
le 6 déc. 2014
774 j'aime
107
Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...
le 14 août 2019
715 j'aime
55
La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...
le 30 mars 2014
617 j'aime
53