Preux qui restent
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Au risque d'apparaître comme un cuistre, je démarre par cette généralité : pas de bon film sans 1. un bon scénario mettant en scène des personnages pleins de caractère, qui ont en eux de quoi faire rebondir ou bifurquer l'intrigue de façon inattendue, 2. de bons acteurs pour faire véritablement vivre ces personnages et nous intéresser à ce qu'ils sont, ce qu'ils veulent, ce à quoi ils sont attachés, 3. un bon directeur de la photo pour visualiser l'histoire sous son meilleur jour, faire qu'il s'en dégage une atmosphère, une ambiance, un climat particuliers, spécifiques. À ces indispensables s'ajoutent trois éléments subsidiaires : des décors, une bande son, un montage adéquats. Le Winter Break d'Alexander Payne coche les six cases, d'où qu'il fonctionne si bien.
Le réalisateur situe son histoire en Nouvelle-Angleterre, il y a plus de cinquante ans. Barton est un collège huppé du Vermont qui n'admet, sauf exceptions, que les fils de la très bonne bourgeoisie étatsunienne ou internationale. Le film s'ouvre sur le dernier jour du premier trimestre de l'année scolaire 1970-1971 (le pays est donc en pleine guerre du Vietnam). Collégiens et professeurs s'apprêtent à partir en vacances de Noël (ou d'Hanouka). Seuls cinq collégiens ne peuvent être accueillis par leurs familles et sont contraints de rester au collège. Et il faut bien qu'un professeur s'occupe d'eux pendant ces deux semaines de pause hivernale ; ce sera le plus détesté d'entre eux, par l'ensemble du collège : le professeur d'histoire ancienne M. Hunham, qui sévit à Barton depuis des lustres. L'imposante directrice de la cantine, Mary Lamb, dont le fils de 19 ans vient d'être tué au Vietnam, a choisi également de rester sur les lieux ; elle passera Noël là où son fils a grandi, en souvenir de lui.
5 + 2 = 7, qui restent seuls dans l'immense bâtisse et son campus (outre le gardien et homme à tout faire du lieu).
Mais bientôt 4 des 5 collégiens peuvent profiter d'une opportunité et partent en vacances de neige. Un seul (Angus Tully) reste coincé à Barton, en tête à tête avec son "baby-sitter" Paul Hunham et Mary, la cheffe des cuisines.
Ces trois solitaires, on ne peut plus dissemblables, vivront ou connaîtront toutes sortes de péripéties, d'états d'âme... qui peu à peu les rapprocheront. Au démarrage du 2ème trimestre, ils n'appréhenderont plus le monde, leur vie, de la même façon.
Je réitère ce que j'ai dit au début : le scénario est excellent, d'apparence simple mais, en fait, très étudié (particulièrement, au niveau des rapports entre Hunham, Mary et Angus), et prenant pas mal de virages, prévisibles ou inattendus, au fil des 134 minutes du métrage.
Trois acteurs, très différents en âge, physionomie, caractère et expérience, excellent dans des rôles difficiles. Paul Giamatti est Paul Hunham (sans lui, le film n'aurait pas la même saveur), Da'vine Joy Randolph est Mary, et Dominic Sessa : Angus. Ils font qu'on croit à l'histoire et qu'on la vit à côté d'eux.
Le directeur de la photographie est Eigil Bryd (jamais entendu parler de lui avant). Ses images réussissent un impossible retour en arrière et parviennent à nous restituer la mélancolie douce-amère de ces seventies depuis longtemps englouties.
Bien construit, super bien joué, surprenant, drôle, émouvant, mélancolique, Winter Break s'avère être un des meilleurs films américains de l'année. Encore une fois, on est, pendant les 134 minutes du métrage, véritablement dans l'histoire, on rit, on a une boule dans la gorge, on est touchés, ravis au sens premier du terme. Bref, c'est le meilleur film de Noël qu'on puisse voir en cette fin d'année.
P. S. Et c'était ma 500ème critique SC ^^
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Créée
le 24 déc. 2023
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