Wolf Man
5.3
Wolf Man

Film de Leigh Whannell (2025)

Les films de loup-garous suscitent toujours en moi un peu d’attente, car trop rares par rapport aux vampires et autres zombies. Mais la réussite est rarement au rendez-vous (An American Werewolf in London, The Howling, ou le méconnu The Wolf of Snow Hollow si l’on est déviant), livrant souvent des films tout au plus sympathiques (Ginger Snaps - sans doute référencé par le prénom de la gamine - , Dog Soldiers…). Il est donc possible que je sois plus indulgent dans mon appréciation, trop heureux de voir une revisite du mythe portée sur nos écrans. Et en même temps, j’avais plutôt apprécié le travail de Leigh Whannell sur Upgrade et The Invisible Man, ce dernier tentant déjà d’actualiser une des figures mythiques des Universal Monsters. Il était donc naturel que je laisse sa chance à ce Wolf Man malgré les premiers retours plus que mitigés.


Et en parlant de naturel, l’ambition naturaliste du cinéaste est affichée d’entrée de jeu, dans une séquence introductive où des fourmis dévorent une guêpe en défense de leur territoire, montrant la prédation sous sa forme organique, une chaîne alimentaire témoignant d’un ordre biologique et d’une approche aux antipodes de l’urbanisme technologique de ses deux précédents films. Et si j’ai eu un doute passé l’incipit (un poncif narratif néanmoins efficace dans sa mise en scène), alors que l’on nous présente la petite famille de protagonistes à San Francisco, on reviendra vite se perdre dans la verdure claustrophobe de l’Oregon.


Cette ambition accompagne tout le métrage, Whannell allant au bout de son idée. La progéniture prend la place de son ascendance par le parricide dans une analogie léonine. On s’éloigne du canon religieux traditionnel pour adopter une croyance amérindienne plus proche de l’infection, établissant au passage de nouvelles règles, dont une transformation progressive, par étapes. Elle est d’habitude traitée comme la scène clé des films de lycanthropes, permettant la bascule dans l’horreur et l’exposition d’artistes tels que Rick Baker ou Rob Bottin qui se font un malin plaisir à déformer les chairs pour épater la galerie. Ici, elle constitue le fil rouge de l'œuvre, démarrant très tôt et finissant très tard, et rappelant la lente transformation de Seth dans The Fly (mais sur une nuit). Et là aussi, elle est accompagnée d’un design sonore organique qui fait grogner les robinets, rugir le bois du chalet et hurler le vent dans les arbres, participant à l’expérience sensorielle. On émettra juste un bémol sur la vision du lycan, le rendu en néons et négatifs étant douteux, bien que l’idée soit originale. Enfin, on appréciera l’usage parcimonieux de la CGI au profit de maquillages et de prothèses qui apportent une tessiture elle aussi plus naturelle. Et le spectacle final de cette vallée au petit matin ne fera que conclure l’exercice en toute logique.


Non, vraiment, il y a de l’idée dans la conception, et une volonté honnête d’hybrider du Cronenberg à du Herzog dans le style. Mais une hybridation du pauvre.


Car si Wolf Man va au bout de ses idées sur la forme, il en manque cruellement sur le fond. L’absence de jumpscares putassiers ou de personnages sceptiques clichés n’empêche pas aux thématiques familiales d’être au ras des pâquerettes. Les relations père-fils qui s’enveniment par une incapacité à communiquer qui se répercutent plus tard sur l’union maritale à la ville, pour se conclure par une incompréhension littérale lorsque l’homme devient finalement bête, ça ne vole pas bien haut. D’autant plus quand on y adjoint un discours sur la peur générée par une surprotection qui fait office de boomerang peu finaud.


Un discours suffisamment éculé pour que l’on prête attention à des bêtises scénaristiques qu’une immersion complète aurait effacé. Comme la décision débile d’un local qui avertit contre les sorties nocturnes mais rentre tout de même dans le camion des citadins pour leur indiquer le chemin, sous-entendant qu’il a prévu de rentrer à pied dans le noir, seul, dans la forêt, alors qu’il aurait pu les guider avec son propre véhicule. Ça, l’idée de se réfugier sur une serre bâchée de deux mètres de haut, ou la séquence interdite où la nuit devient jour entre deux plans. Du pinaillage qui n’aurait pas lieu dans un film plus tenu.


Alors Wolf Man tombe dans cet entre deux malheureux, où les trouvailles de départ se heurtent à des bégaiements dans l’exécution. Au moins je ne m’y suis pas ennuyé, mais je l’oublierais sûrement, cette œuvre aux idées mi-bonnes, mi-floues.


Créée

il y a 4 jours

Critique lue 8 fois

Frakkazak

Écrit par

Critique lue 8 fois

D'autres avis sur Wolf Man

Wolf Man
RedArrow
6

Le Loup de Whannell Street

Passé de scénariste très doué à cinéaste ne cessant de monter en puissance en l'espace de quelques années, Leigh Whannell était forcément attendu au tournant avec "Wolfman", sa deuxième relecture...

le 18 janv. 2025

9 j'aime

4

Wolf Man
EricDebarnot
6

La violence du père

Il n’y a que les « véritables » cinéphiles qui s’en souviennent, mais il y a cinq ans, Leigh Whannel nous offrait une réussite mémorable avec son Invisible Man, remarquable réécriture de l’histoire...

le 20 janv. 2025

6 j'aime

2

Wolf Man
Legend-Knight84300
7

Critique de Wolf Man par Legend-Knight84300

Malgré quelques petites lenteurs par ci par là "Wolf Man" s'avère être un film de genre plutôt efficace.En même temps son réalisateur, Leigh Whannell, maîtrise le domaine horrifique. D'abord en tant...

le 17 janv. 2025

6 j'aime

1

Du même critique

Assassin's Creed: Mirage
Frakkazak
4

Mi-rage, mi-désespoir, pleine vieillesse et ennui

Alors qu’à chaque nouvelle itération de la formule qui trône comme l’une des plus rentables pour la firme française depuis déjà quinze ans (c’est même rappelé en lançant le jeu, Ubisoft se la jouant...

le 10 oct. 2023

21 j'aime

Spiritfarer
Frakkazak
8

Vague à l'âme

Il est de ces jeux qui vous prennent par la main et vous bercent. Des jeux qui vous entraînent dans un univers capitonné, où de belles couleurs chaudes vous apaisent. Spiritfarer en est. Le troisième...

le 9 sept. 2020

13 j'aime

2

Returnal
Frakkazak
9

Gen of Tomorrow

Cinquante heures pour le platiner, et c'est d'ailleurs bien la première fois que j'arrive à aller aussi loin dans un roguelite. Non pas qu'il soit facile, il est même étonnamment ardu pour un triple...

le 30 juin 2021

12 j'aime

6