Pour nous français, il est difficile de cerner le phénomène Fred Rogers. Eléments incontournable de la culture télévisuelle américaine du début des années 60 à la fin des années 90, il est resté pour la majorité d'entre nous un parfait inconnu.
C'est alors que sort, il y a peu, le film "L'extraordinaire Mr Rogers" avec Tom Hanks en tête d'affiche. Ayant une sympathie toute particulière pour l'acteur de Forest Gump, je décide, intrigué, de regarder ce film un soir de désœuvrement. Je découvre ainsi un biopic sur un homme simple, ouvert, attentionné, emplie d'une tendresse débordante pour le monde qui l'entoure et ayant tout particulièrement à cœur le bien être des enfants. Même si le film en lui même n'est pas mauvais, j'ai du mal à croire à l'existence d'un être capable de faire preuve d'une tel bonté et il me semble être la somme totale et exagérée des bons sentiments qu'Hollywood nous donne à voir depuis de nombreuses années. Je ne suis pas un cynique acharné, j'aime, à peu près comme tous le monde, les bons sentiments. Cependant là, ça fait beaucoup, c'est trop gros, et le peu d'esprit critique que j'ai se révolte et émet un doute légitime.
Je décide donc de ne pas m'arrêter là et de pousser mon désir de vérité un peu plus loin. Je tombe ainsi sur ce documentaire, sorti deux ans avant le biopic, retraçant la vie de Fred Rogers à travers des images d'archives et des interview de personnes l'ayant connu. Je pensais y trouver un portrait plus nuancé, ou j y apprendrai les "part d'ombres" de ce personnage présenté de façon si lumineuse. Et là, surprise, je découvre que le portrait que traçait le biopic est encore loin de la réalité et que Mister Rogers, en plus de sa bonté véritable, était un homme courageux capable d'une volonté immense.
Plus le film avance et plus ma fascination et mon admiration augmente pour cette homme qui, dans un sens, est une anomalie. Rien ne le destinait à travailler dans la télévision et pourtant le voici. Son émission, fait de bric et de broc, de spectacle de marionnettes et possédant un tempo bien à elle a réussi à naviguer à contre courant et à garder son cap malgré l'évolution du média télévisuel. Ce qui a fait sa force toutes ses années c'est cette envie, voir même ce devoir de la part de son créateur d'apporter aux enfants, souvent les plus petits, un moyen de comprendre le monde qui les entoure dans ses aspect les plus simples aux plus complexes ( cela va de faire ces lacets à qu'est ce que l'assassinat), d'apprendre à maitriser leurs émotions, et surtout, surtout de donner à chacun d'entre eux la reconnaissance de sa propre valeur personnelle en dehors de tout jugement.
S'il y a eu une différence entre Fred Rogers et Mr Rogers celle-ci est fine voir presque indiscernable. Pendant tous le film, sa personnalité et ses manières douces et tranquilles nous éclaire et nous touche au cœur. Certain passages comme la rencontre avec Jeff Erlanger, la signification du 143 ou encor la chanson "Wonder if i'm a mistake" sont admirables et m'ont sincèrement émue. Et c'est là où se trouve l'atout principal du film: pas de voix off explicative et directionnel, le réalisateur se fait discret et laisse la place aux témoignages et aux images d'archives pour nous présenter Mr Rogers, ce qu'il était, ces actes de bravoure, de grandeur, ces découragements et ce qu'il représentait pour le peuple américain. Cette présentation moins classique pourrait en perturber certain mais l'énergie qui s'en dégage nous fait vite oublier ce "désagrément".
Quant à la part d'ombre? Et bien, là encore il y en a peu. Le documentaire nous peint un portrait quasi sans tâche de Fred Rogers et me laisse encore avec une parcelle de doute. Cela m'interroge: le film a-t-il délibérément fait l'impasse sur ses défauts et ses grandes fautes ou n'en a-t-il tous simplement pas trouvé? Difficile à dire. Point positif cependant, 17 ans après sa mort et bien qu'est eu lieux aux Etats-Unis des mouvements salvateurs de libérations de la paroles dans les milieux du show-biz et du cinéma, aucune voix ne s'est encore élevée pour dénoncer ce voisin au cardigan et au grand sourire franc qui à su être un ami pour de nombreux enfants. Il y a de l'espoir.
Voilà, si vous voulez vous faire du bien, prenez le temps de regarder ce film. Vous vous sentirez, je l'espère, un peu plus confiant dans la capacité qu'ont certaine personnes à aimer et à aider leurs voisins. Et qui sait? Peut être serez vous inspiré à faire de même.