Yi Yi sonne comme le chef d'oeuvre du cinéma taïwanais des années 2000, le film-somme d'un cinéaste parti trop tôt, qui avait encore tant à apporter à l'édifice qu'il avait lui-même bâti au cours des années 80, une époque annonçant la nouvelle vague d'auteurs taïwanais particulièrement concernés par leur pays. Dans Yi Yi on y trouve aussi bien le Taïwan moderne et ses businessmen cherchant le moindre profit que celui qui vit grandir toute une génération d'enfants et d'adolescents devenus ce qu'ils sont maintenant. Entre les contraintes professionnelles et familiales, tout ce beau monde continue de vivre, d'évoquer la vie, la mort, la famille mais aussi le souvenir, mêlant ainsi passé, présent et futur au sein d'une narration juste parfaite et emplie de grâce.

La question de la dualité (en référence au titre du film) confronte ainsi deux générations mais aussi l'idée du double, le double de NJ et Sherry avec son fils et celle qui irradie sa vie. Edward Yang juxtapose donc deux histoires (une infinie? 1+1=2, 2+2=4, nous, vous) presque identiques vécues à deux époques bien différentes, première magie, montre sous un aspect tout simplement déchirant les aléas de la vie (la grand mère sur son lit de mort, un espoir et un modèle pour sa petite fille), deuxième magie, narre avec une noirceur toute poétique l'amour de plusieurs petits groupes de personnes, des jeunes mariés qui vivent un calvaire à une famille décomposée pour déplacement professionnel et raisons médicales, en passant par la tendre étape de l'enfance où les garçons font peur aux filles (voir l'inverse) et où l'on manque son coup en jetant une bombe à eau sur la tête de son professeur tyrannique, troisième magie.

Une magie omniprésente au sein du procédé narratif. Plus spirituelle encore est la quête du petit Yang Yang, consistant à capturer la nuque des gens à l'aide de son appareil photo afin de leur montrer ce qu'ils ne peuvent pas voir, leur autre facette. Ainsi on serait également tenté de dire que Yi Yi grappille également quelques places au sommet de la grâce cinématographique rien qu'avec cette petite idée. Enfin, que dire de plus lorsque la mise en scène réglée au millimètre, inouïe de cohérence avec son sujet, délivre des instants de grâce absolue, de la première photo de mariage -sous un réarrangement musical sidérant de pureté, à l'enterrement final? Assurément l'un des plus beaux films du monde.
XavierChan
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le 27 févr. 2011

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XavierChan

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