(Remarques listées en août 2020, modifiées en Janvier 2021)
"Rencontre amoureuse avec une langue charnelle ou comment le yiddish fait poésie et captive aujourd'hui une nouvelle génération..." (Manou Farine sur France Culture dans La Compagnie Des Poètes du 08/01/2021)
Des passionné(e)s de Yiddish expliquent à Nurith Aviv qui ils sont, comment ils sont arrivés au Yiddish, ce qu'ils en aiment, ce qu'ils en préfèrent, partagent des anecdotes autour de cette langue et histoire puis en lisent un poème. C'est bouleversant et leur enthousiasme est totalement convaincant: on le ressent comme une onde.
Surtout ils me font découvrir et entendre certains noms pour la première fois.
On pense à une des langues dans 'Avatar'.
Il me rappelle le documentaire 'La Fantasy : toute une histoire' où je découvrais un autre passionné de langues, chargé d'en inventer de nouvelles pour des films. Un David J. Peterson qui a créé des langues pour Thor, Doctor Strange et Game of Thrones.
La poésie va nous sauver:
Un des poètes qu'ils aiment pense que la poésie a un pouvoir "explosif et matériel" sur nos vies.
Il a l'occasion de le vérifier lorsqu'il fuit un ghetto avec sa femme et un ami et qu'ils se retrouvent à traverser un champ de mines. Il décide alors de se réciter ses vers et "de marcher à leur rythme"...convaincu que la Poésie et ses vers les sauveront. Ce fût le cas.
Amélie Poulain a le même genre de pensée magique.
Mais ici, c'est un Avrom Sutzkever, déjà présent sur SC, passionné de nature (il a vécu son enfance proche d'elle en Sibérie, bien avant Sylvain Tesson...):
De la forêt:
Tout est précieux pour mon oeil en sa course
tout est cher, essentiel pour ma stance :
les herbes, les arbres, la terre, une source,
et du sommeil la lointaine nuance.
Et dans tout je rencontre un éclat
de l'infini.
Nous formons un tout avec la terre:
Poème pendant la 1e Guerre Mondiale dont le rapport à la nature rappelle bien avant l'heure le concept beaucoup plus tardif de l'"hypothèse Gaïa" (née en 1970?) ("L'ensemble des êtres vivants sur Terre formerait ainsi un vaste super-organisme — appelé « Gaïa » ").
L'un des interviewés (à tête de Michel Onfray et surjouant un peu ou vraiment passionné lors de la lecture...) me fait découvrir Célia Dropkin et notamment ses poèmes érotiques. Dont "Le Baiser", un poème vampirique avant l'heure (dont d'autres écriront des assez similaires plus tard??...si j'ai bien compris les explications de ce Dory Manor qui a un très beau site.).
Et j'en ajoute sur SC un prochain documentaire d'un Eli Gorn: "Rediscovering Celia The Life and Art of an Erotic Yiddish Poet" prévu pour 2021.
La dernière interviewée me fait découvrir le nom de Deborah Vogel et son poème sur les yeux:
_"Les yeux peuvent luire comme deux châtaignes dures,
Deux noyaux dures de tristesse
Dans la poêle en tôle jaune des rues.
Parfois, ce sont deux dattes tranquilles.
Des dattes faites de lourdes gouttes d'attente,
Qui t'attirent dans des rues vides aux lanternes jaunes.
Jusqu'à ce qu'ils deviennent des tâches de velours brun
Et tombent lourdement, douces gouttes de renonciation,
Sur les rues, les lanternes et les corps,
Dont plus rien ne peut sortir".
J'ai aimé cette dernière interviewée aussi car elle se rappelle exactement où et quand sa passion est née et quand elle a découvert son premier ouvrage de cette Deborah Vogel: "Je me souviens du moment où je me suis assise la première fois dans la Bibliothèque et commencé à lire ses 'Montages en prose' (...elle m'a) complètement passionnée".
(Autres extraits à suivre au fur et à mesure que je tente de suivre leurs multiples éclairages. Doc visible jusqu'au 19/09/20 sur france.tv ).
Ajout du 08/01/21:
Pour plus d'informations, et surtout plus ordonnées, je conseille l'écoute de l'émission de France Culture "La Compagnie Des Poètes" du 08/01/21,
_où on apprend que la mode du Yiddish, cette "langue du marginal", reviendrait comme "un retour du refoulé chez les petits enfants de déportés" mais aussi passionne "le mouvement gay/queer".
_où on entend Arnaud Bikard , le chanceux "mari de Valentina Fedchenko" interviewée dans ce doc.
_où la passionnante réalisatrice, Nurith Aviv, explique à partir de la 37e minute pourquoi elle les a filmés en train de rentrer chez eux.
(Emission "avec Gilles Rozier, éditeur et auteur de l’introduction des Histoire des temps passés et à venir d’Isaac Leib Peretz (L’Antilope, 2020) ainsi que la cinéaste Nurith Aviv et Arnaud Bikard - Maître de conférences en langue et culture yiddish, codirecteur du département d'études hébraïques et juives à l'INALCO et auteur de l’ouvrage La Renaissance italienne dans les rues du Ghetto (Brepols, mars 2020) -, à propos du film Yiddish dont Les protagonistes, certains juifs, d’autres non, parlent de leur relation personnelle au yiddish et à un poète qu’ils aiment particulièrement. Et c’est ainsi que nous découvrons ou redécouvrons ceux qui furent les promoteurs d’une esthétique nouvelle : Peretz Markish, Anna Margolin, Celia Dropkin, Debora Vogel, Avrom Sutzkever, Moysh-Leib Halpern…")