Quatre ans après Et la Tendresse ? Bordel ! et 3 ans après le très amusant Rendez Moi ma Peau, Patrick Schulman sortait son troisième long métrage intitulé selon les époques et son exploitation Zig-Zag Story ou Et la Tendresse ? Bordel ? 2, un titre de suite essentiellement fait pour le marché de la vidéo. Un retirage un peu opportuniste mais qui écrase surtout sous le poids d'une pseudo suite ratée un film bancal mais sympathique à bien des égards.
Dans Zig-Zag Story il sera comme dans le premier film du réalisateur beaucoup question de couple et de sexe. Nous allons donc suivre la rencontre amoureuse de Gil un peintre daltonien un peu bohème et de Catherine une jeune animatrice de radio dirigiste et indépendante. Autour d'eux gravite l'ami de Gil, un photographe obsédé sexuel, et une sombre histoire d'enlèvement de jeune fille.
Je dois reconnaître que j'ai regardé le film avec la ferme conviction que c'était vraiment la suite de Et la Tendresse ? Bordel ? au point d'ailleurs qu'en recherchant en vain le film sur le site je pensais que sa fiche Sens Critique n'existait même pas. On ne va pas se mentir le film ne souffre d'aucunes comparaisons positives avec le premier film du réalisateur, d'autant plus qu'il n-y a aucunes raisons de véritablement en faire si ce n'est par quelques thématiques communes. Si Zig-Zag Story s'articule autour d'une liaison amoureuse et d'un ressort de comédie romantique classique en cinq actes (rencontre - amour - brouille - séparation - retrouvailles) le film comporte aussi un autre axe narratif un petit peu tiré par les cheveux avec une histoire d'enlèvement de gamine dont le héros va se retrouver accusé à tort. L'écriture globale du film est un peu maladroite et Patrick Schulman peine à faire complétement cohabiter ses deux intrigues distinctes en une seule. L'histoire d'amour est assez basique et l'on sent que le personnage du bon copain photographe obsédé sexuel, voyeur et érotomane interprété par *Fabrice Luchin*i va surtout servir à pimenter le tout d'un humour paillard propre au réalisateur. Encore une fois certaines scène feront grincer les dents y compris les miennes comme lorsque le photographe fait poser pour sa collection personnelle une gamine avec des jarretières (limite -limite). Ouvertement porté vers l'érotisme grivois le film offre un sacré défilé d'actrices dénudées passant sous l'objectif de notre photographe toujours prompt à inventer de nouvelles mises en scène. L'un des plus gros problème du film , outre son écriture un peu bancal, reste pour moi le comédien principal Christian François aussi peu charismatique que talentueux dans le rôle de Gil. Sorte de version cheap de Bernard Giraudeau le charme en moins, l'acteur ne m'a jamais semblé être bien convaincant à l'écran. Une vision visiblement partagé par d'autres puisque l'acteur ne fera jamais carrière devant la caméra et finira réalisateur pour la télévision notamment pour Plus Belle la Vie.
Là ou Zig-Zag Story fait mouche c'est lorsque le film part complétement dans un côté bien plus absurde et délirant. Et si cette histoire d'enlèvement arrive un peu comme un cheveu sur la soupe elle a le mérite d'introduire un personnage d'inspecteur de police génialement con interprété par le formidable Philippe Khorsand. Ce flic qui souvent ne comprend rien à rien voit une bonne partie ses pensées obscures et raisonnements étranges matérialisés dans des bulles qui s'animent au dessus de sa tête créant de formidables décalages humoristiques. Bien plus encore que dans Et la Tendresse ? Bordel ! le film est bourré de moments surréalistes, burlesques et étranges souvent très drôles et inattendues comme cette concierge qui se passe la patte derrière l'oreille en signe d'orage, ce ministre qui tire au fusil sur les ouvriers trop bruyants ou ce cul de jatte posé dans une cabine téléphonique. Dans ce même registre un peu fou on trouve dans le film un personnage très attachant interprété par Ronny Coutteure tellement timide et effacé qu'il n'apparait même pas sur les photos de lui même. Léger mais aussi acerbe Patrick Schulman montre à travers son film une certaine déshumanisation de la société dans laquelle on visite les prisons comme des zoos , on orchestre comme une scène de cinéma les déclaration médiatiques d'une mère désespérée, on jette les suspects dans des fourgons de police qui ressemblent à des camions poubelles et dans laquelle on pourrait mourir en pleine rue dans l'indifférence polie et générale. Le final du film pourra même se lire d'une manière assez sombre et désespéré achevant de faire de Zig-Zag Story un film certes bourré de défauts mais aussi bien singulier.
Sous le titre de Et la Tendresse ? Bordel ! 2 je ne mettrai guère plus que 05/10 au film, mais sous son titre original et à travers cette proposition de comédie aussi légère que sombre le film mérite largement d'être réévaluer d'un point .