En parlant de Romero à travers "Le jour des morts-vivants", je n'avais pas encore revu "La nuit des morts-vivants" et "Zombie", ce qui fut un peu cavalier... Maintenant que c'est fait, je dois être un peu objectif (un minimum) car il y a bien une bande de voyous qui slaloment entre des zombies en tirant gaiement à la sulfateuse ici, ce qui contredit le fait que quand les zombies sont là, la mort est là. Puisque quand cette bande est là, la mort c'est eux.
Je me rappelais qu'ils se faisaient tous bouffer mais en fait non, juste une poignée d'entre eux, les autres repartent en frimant après que le héros black ait observé avec un air presque admiratif leur efficacité à dézinguer du mort-vivant. Il en shoote à la lunette pour faire bonne mesure. C'est finalement la seule scène un peu too much à revoir. Elle passe parce qu'elle est fun et soulève d'autres questions comme la bestialité entre hommes notamment, mais vient tout de même égratigner un instant la bonne logique dangereuse du zombie chez Romero. En plus, le chef porte un casque allemand comme pour signifier la solution finale... Dans "La nuit des morts vivants", on avait aussi les rednecks chasseurs de la fin qui exterminent sans hésiter, mais pour une bonne raison, un final choc. Dans Zombie, Romero montre davantage qu'il approuve le choix de foncer dans le tas tout de même, ce qu'il confirmera dans son fade "Land of the dead" (revu aussi, toujours aussi plat). Tout comme il approuve bien que nos deux militaires se la jouent par instants exterminateurs détendus. Ce ne sera pas le cas dans "Le jour des morts vivants" encore plus sombre et tendu finalement.
Pour le reste, même si je vois bien que les acteurs sont de seconde zone, que les effets spéciaux et le montage ont parfois du mal et que le discours anticapitaliste est aussi fin que celui d'un chasseur, Romero distille comme personne cette odeur de fin du monde où une loque à priori inoffensive constitue une terrible menace ce qui est très bien expliqué d'ailleurs. Ils n'ont pas l'air dur à exterminer mais ils sont nombreux, de plus en plus innombrables. Et plus ils sont nombreux, plus ils vous tombent dessus à chaque recoin, plus leur proximité devient étouffante. S'ils se reproduisent aussi vite, c'est qu'ils sont avant tout humains. Ils semblent facile à tuer mais le sont beaucoup moins lorsque qu'il s'agit d'un proche ou d'un enfant qu'il faut descendre en pleine tête sans hésitation avant d'être mordu(e). Faut-il aussi savoir qu'une simple morsure suffit et que le temps joue contre nous. L'Homme est ainsi partagé entre discuter, trouver une solution humaine qui n'amène que la prolifération du zombie ou en finir au plus vite, sous entendu aussi se suicider pour ainsi les affamer. Cette question n'est jamais complètement tranchée et fait le corps fataliste d'un Romero. Le choix est faussé. Nos héros ne peuvent que se terrer dans les meilleures conditions de sécurité possibles ou fuir sans repos pour le même résultat, la mort.
(Ce qui me rappelle que L'armée des morts en recopiant un maximum Zombie s'en sortait pas si mal finalement...)
Zombie fonctionne donc très bien sur la peur des zombies même s'il sont lents et inefficaces. Ce qui compte, c'est leur nombre, en croissance constante. C'est un peu le seul film où l'on se surprend à guetter la proximité des mâchoires de zombies avec les membres de nos protagonistes.
Du refuge le plus sûr et reculé au grand hall luxueux et exposé, la découverte méthodique du supermarché montre bien l'omniprésence de la mort à chaque recoin, dès le premier plan du film avec une moquette murale comme de la viande hachée sur une musique bizarre. Leur possible surgissement plane jusque dans le studio de télé. Zombie dépasse ainsi son côté artisanal et impose sa marque dans la terreur filmée, tout comme La nuit des morts-vivants.
ps : par contre, contrairement à L'armée des morts, ici, ils arrivent en hélicoptère par le toit, parce que c'est déjà trop dangereux à terre.