Nintendo a besoin d’un grand jeu pour le succès de sa première console de salon sur le point de partir à la conquête de l’occident, la NES, c’est alors que la saga Super Mario naît et qu’un petit plombier moustachu va s’imposer comme emblème de l’un des plus importants éditeurs constructeurs de l’histoire du jeu vidéo, va instaurer des règles vidéoludiques impactant grandement la suite des productions vidéoludiques de sa génération et au-delà… Revenons un peu sur ce phénomène pour en découvrir ce que j’en pense, je vous propose l’écoute de ce remix orchestral des thèmes du jeu pendant la lecture.
GAMEPLAY / CONTENU : 8 / 10
Nous sommes à une époque où le jeu vidéo se cherche encore des normes ludiques, Super Mario Bros est souvent cité comme une référence majeure sur la question. Ce n’est pas seulement pas ce qu’il a adopté plein de mécaniques qui sont devenus normes par chance, mais parce qu’il a su les rendre si logiques et si intuitives qu’elles en deviendront synonyme de bon sens. Par exemple, Mario est d’abord montré comme unique personnage à l’écran, il est à gauche et avec le regard vers la droite, impossible de ne pas comprendre le principe de toujours aller à droite et qu’on contrôle directement ce personnage là précisément.
C’est pareil au premier ennemi rencontré, impossible de le passer sans sauter par-dessus, donc on comprend tout de suite l’importance de cette mécanique, puis les tuyaux à passer sont de plus en plus haut pour montrer les différentes hauteurs de saut possible, puis seulement apparaît le premier trou puisque l’on vient d’assimiler cette mécanique, et ainsi de suite. Super Mario Bros fait preuve d’une pédagogie efficace et naturelle à tout instant pour être d’une grande accessibilité, dans le bon sens du terme.
Et si le maniement ne se compose que du saut, du déplacement et d’une attaque, le gameplay est beaucoup plus technique et fin qu’on pourrait le croire pour un jeu de cette époque. On peut déjà noter la très bonne réactivité du personnage qui agit aussitôt la commande rentrée, sans qu’une animation n’alourdisse trop la chose, bien qu’elle existe après une course. Ça permet de donner beaucoup de dynamisme au maniement qui pouvait être beaucoup plus rigide dans les jeux de plates-formes l’ayant précédé ou même l’ayant suivi, pour un confort de jeu optimal.
Mais la richesse de ce maniement se trouve surtout dans la gestion de la vitesse pour l’inertie du personnage, le saut dépendant de la vitesse de course le précédant et de la pression de la touche saut alors qu’on peut continuer d’orienter la trajectoire une fois en l’air, que la vitesse à laquelle on retombe dans la deuxième partie du saut en est impactée... Dans beaucoup de jeux de cette époque, mêmes de bonne facture comme Castlevania, la touche saut était beaucoup plus simpliste que ça, une seule hauteur quelque-soit la pression sur la touche, impossibilité de modifier la trajectoire jusqu’à l’atterrissage….
On peut également retrouver cette richesse dans la partie action du titre avec la trajectoire particulière des boules de feu à lancer ou la possibilité de les tirer régulièrement ou par deux mais c’est surtout dans les ennemis variés au patern très différent que cette richesse se trouve. Ces patern forcent vraiment à ne jamais se comporter de la même manière pour se défaire d’une situation périlleuse avec une courbe de difficulté progressive très maîtrisée, à part les frères martos trop imprévisibles à mon goût je les trouve tous réussis.
Les situations de jeu varient considérablement d’un niveau à un autre en plus de ça, avec même des passages subaquatiques, des petits labyrinthes... pour un rythme ultra soutenu et un contenu qui ne se recycle quasiment jamais ou alors avec la variable le justifiant. Beaucoup de secrets à trouver motivent la rejouabilité, d’autant que ça peut être des passages de jeu inédits qu’il serait dommage de manquer et l’occasion de récompenser le joueur ayant pu garder une grande taille jusqu’à un certain point du niveau. Les Warp Zones permettent d’aller plus vite vers la fin sans devoir tout se refaire à chaque run, compensant un peu l’absence de système de sauvegarde ou de mot de passe.
Néanmoins, il y a quelques secrets tellement bien cachés qu’ils me semblent trop bien cachés, le coup du bloc invisible sans aucun raison logique de l’y trouver à son emplacement est assez typique du problème, mais ce n’est jamais le moyen incontournable pour poursuivre ou un contenu conséquent, donc ce n’est pas bien grave. Dans l’ensemble, le gameplay de Super Mario Bros mérite bien toute l’importance qu’on lui attribue dans l’histoire du jeu vidéo et sa qualité est indéniable, ce qui est aussi le cas pour la réalisation et l’esthétisme du titre.
RÉALISATION / ESTHÉTISME : 8 / 10
Bien évidemment qu’un jeu de 1985 sur NES vieillit avec le temps, mais ce n’est pas pour ça qu’on ne peut pas juger de ses qualités graphiques, même techniques, il avait de grandes qualités à faire valoir à l’époque et elles sont toujours vraies à l’heure où vous lirez cette critique. Par exemple, beaucoup d’astuces très discrètes ont permis d’économiser des ressources sans que ça ne pose problème, comme les buissons et les nuages qui sont en fait une seule et même texture mais autrement positionné et de couleur différente.
C’est le genre de petit détail qui témoigne de la volonté de bien faire sans que ça ne s’accompagne de compromis gênants, ce qui traduit un état d’esprit qui rend l’expérience de jeu si agréable. Le jeu de couleur et les éléments composant le décor parviennent à retranscrire des ambiances assez différentes les unes des autres, sous les eaux, au sommet des arbres, à travers des souterrains, au sein d’un château… Il y a vraiment une belle diversité environnementale que peu de jeux pouvaient offrir avec les graphismes standards de l’époque.
Ce n’est pas négligeable car c’est source d’ambiances ressenties, le château gris et sa lave rouge seront plus oppressants que des arbres au feuillage vert avec un ciel bleu en arrière-plan, ce qui concorde avec la difficulté et les enjeux du niveau en question. Ça peut paraître très basique dit comme ça, mais c’est le fruit d’un choix des couleurs optimal compte-tenu des capacités de la machine et de la faible connaissance de celle-ci par les développeurs, nous ne sommes encore qu’en 1985 et la quasi-totalité des grands jeux de la console ne sont pas encore sortis, même au Japon.
Le chara-design des ennemis peut paraître assez curieux de prime abord mais trouve systématiquement une explication ludique et constitue au final un univers original et amusant, ce qui est probablement le plus important. Et quand on voit que la plupart seront repris des décennies après pour la licence avec toujours autant de succès, même s’ils sont bien sûrs retravaillés, déclinés en différentes versions… difficile de relever ça comme point faible sans passer à côté de quelque-chose.
Le titre est également bourré d’effets sonores efficaces pour récompenser ou sanctionner une action. Un même effet sonore peut être en deux variables selon il est positif ou négatif comme pour le changement de taille, enchaîner les pièces récupérées procurent un feed-back plaisant alors que sinon les pièces n’ayant pas grand intérêt on n’y ferait pas gaffe, on sent une réelle différence de puissance en cassant une brique qui autrement peut nous humilier… Il manque peut-être quelques effets comme lorsque Mario trouve le bon chemin dans un labyrinthe, mais c’est rare.
Et bien entendu, les musiques composées par Koji Kondo, dont c’est quasiment le premier gros projet par ailleurs, ont acquis un statut culte intemporel et sont tout aussi efficaces que les couleurs choisies pour caractériser les différentes ambiances. Comme pour le design des créatures, il n’y a qu’à voir à quel point ce travail sera repris par la suite de la saga pour s’en convaincre. En somme, Super Mario Bros est un des premiers titres aboutis techniquement de la NES et de la troisième génération de consoles, réalise des choix esthétiques originaux et pertinentes tout en profitant qu’une OST mémorable.
CONCLUSION : 8 / 10
Super Mario Bros est un titre majeur de l’histoire du jeu vidéo en arborant un gameplay accessible et technique dans un univers original et soigné. Il marque le lancement de Nintendo sur le marché des consoles de salon, les premières heures de gloire de sa machine et le commencement d’une saga majeure pour Nintendo qui ne saura jamais s’en séparer. Merci Shigeru Miyamoto et Takashi Tezuka, qu’on oublie peut-être un peu trop pour son rôle ici d’assistant, pour nous avoir réalisé ce super jeu de plates-formes.