The Legend of Zelda: A Link to the Past
8.6
The Legend of Zelda: A Link to the Past

Jeu de Nintendo EAD, SRD et Nintendo (1991Super Nintendo)

L’une des premières aventures de sa génération, impressionnante et innovante

Considéré comme un jeu culte parmi les jeux les plus cultes de l’histoire du jeu vidéo, The Legend of Zelda A Link to the Past, ou Zelda 3 pour les intimes, débarque en 1991 alors que la Super Nintendo compte encore peu de jeux d’aventure / de rôle, son succès critique et commercial était donc déterminant pour Nintendo. C’est aussi le premier Zelda dirigé exclusivement par Takashi Tezuka, même si Miyamoto ne devait pas être loin en qualité de producteur quand les grandes décisions se prenaient. Néanmoins, je suis loin d’être le plus grand fan de Zelda 1 et de Zelda 2, que j’apprécie tout de même bien entendu, voyons si ce troisième épisode est le premier à recevoir mes louanges, moi qui le découvre bien après sa sortie. Pour le savoir, je vous propose pendant la lecture l’écoute du sensationnel Song of Hylia inspiré par Zelda’s Lullaby qui fait sa première apparition dans cet épisode.



GAMEPLAY / CONTENU : ★★★★★★★☆☆☆



Le premier parti pris ludique du titre est le retour à la vue de dessus, partiellement abandonnée dans Zelda 2 et beaucoup plus appréciée des joueurs, mais ça ne signifie pas pour autant une régression au maniement du premier titre. Le combat à l’épée est un peu plus technique avec la possibilité de maintenir l’épée brandi face à soi dans une direction donnée tout en se déplaçant dans n’importe quelle autre direction. L’IA ennemie et son patern sont assez variés d’un adversaire à un autre. Le jeu introduira pour la première fois des items et capacités qui deviendront emblématiques comme le grappin ou les bottes de pégase fluidifiant grandement l’exploration et améliorant le plaisir de jeu.


Le mapping des touches a juste comme défaut de ne pas permettre de s’équiper de plus d’un objet / magie à la fois et de forcer des allers-retours dans le menu, alors que les boutons L et R ne sont pas utilisés et qu’un raccourci pour la map aurait pu être mis dans le menu de pause par exemple. Par ailleurs, nous avons perdu le système de points d’expérience de Zelda 2, pour une légère perte d’additivité dans la progression que j’aurais tout de même bien aimé retrouver à titre personnel, d’autant que l’ampleur de l’influence de ce jeu-là précisément expliquera sans doute l’abandon de cette mécanique pour le reste de la saga. Mais encore une fois, c’est un léger reproche personnel compensé qui plus est par la fragmentation des cœurs supplémentaires à glaner.


Pour en revenir au positif, la courbe de difficulté est étudiée de manière à enseigner des mécaniques fondamentales de manière incontournable et avec subtilité, comme lorsque le prologue oblige à rentrer dans un trou pour progresser afin de faire comprendre au joueur qu’un trou n’est pas toujours un piège à éviter. Le jeu limitant les possibilités d’exploration du joueur avant de les étendre afin de s’assurer qu’il assimile bien les mécaniques voulues, c’est un savant compromis entre linéarité guidant pas-à-pas et liberté d’explorer qui est recherché. C’est vraiment apporté par cet épisode tout particulièrement et ça sera une pierre angulaire du game-design des jeux Zelda suivants et d’une très grande partie des jeux qui s’en inspireront.


La séparation du jeu en deux grande parties, la première servant de gros prologue à la seconde est dans cet état d’esprit puisqu’elle permet de découvrir le jeu en douceur et de n’être plongé dans un monde plus vaste, et donc potentiellement plus difficile à appréhender, que lorsqu’on a forcément appris un minimum à se débrouiller. Si la désignation de l’emplacement de tous les donjons sont inscrits sur la carte qui fait aussi son grand retour, l’exploration reste de mise quant à pouvoir y accéder, un peu trop même à mon goût. On retrouve des énigmes à la résolution difficile mais impérative pour débloquer l’accès à des donjons qui semblent ne rien avoir en commun avec la quête, ce qui est clairement un parti pris, le jeu guidant plus en début d’aventure, mais je pense qu’il y avait mieux à faire pour que le compromis entre linéarité et liberté soit aussi efficace sur tout le jeu.


On retrouve cette inégalité avec les mini-jeux par exemple, certains relèvent de l’aléatoire et sont donc peu intéressants, d’autres peuvent être l’occasion de s’entraîner à bien utiliser certaines capacités et s’insèrent ainsi très bien dans le game-design global. Là où cette ambition se voit et se concrétise le plus c’est avec le level-design des donjons qui a été très travaillé de manière à nettement les distinguer en leur insufflant des mécaniques uniques et des constructions différentes. De plus, ils intègrent une certaine verticalité, au sein d’un même étage et entre plusieurs étages, pour permettre un ensemble de raccourcis intelligemment répartis. Néanmoins, on a le même problème que dans Zelda 1, certains objets très importants ne sont pas nécessairement récupérés pour finir le donjon dans lequel il se trouve et sont dépourvus de lien avec le donjon ou le boss, c’est dommage que la cohérence item et donjon ne soit pas toujours respectée, surtout quand elle le peut l’être parfaitement dans un autre donjon du même jeu.


L’existence de deux mondes parallèles est aussi une ambition vidéoludique puisque ce qui est fait dans un monde peut impacter le level-design de l’autre, et c’est aussi avec quelques écueils malheureux. L’idée du miroir magique pour voyager entre les mondes est mal exécutée, sujet à de nombreux bugs dont certains ne peuvent être résolus que par un reset de la console, ça aurait mérité d’être peaufiné. The Legend of Zelda A Link to the Past est truffé d’ambitions vidéoludiques et de fulgurances qualitatives admirables pour son époque, mais il est encore loin de la maîtrise absolue de son sujet à mon sens et je ne peux pas être aussi dithyrambique que beaucoup d’autres sur la question, quand bien même il est généreux, ambitieux et de bonne qualité dans l’ensemble, ce qui est l’essentiel. Par contre, je serais beaucoup plus élogieux quant à la réalisation et et à l’esthétisme.



RÉALISATION / ESTHÉTISME : ★★★★★★★★★☆



Le jeu n'a pas pris une seule ride visuellement avec un niveau de détails et une palette de couleurs absolument irréprochables, ce qui est particulièrement notable pour un jeu à la licence si prometteuse alors que la SNES doit encore prouver ses capacités face à la Mégadrive. Le nombre d’animations sur le personnage de Link, la luminosité qui évolue progressivement selon le nombre de torches que l’on allume, la réverbération des bruits de nos pas dans les cavernes, l’effet de pixellisation quand Link reçoit un coup de jus, l’effet de transparence vis-à-vis des nuages et du brouillard…


La maîtrise exceptionnelle du rendu permet d’ailleurs autant d’effets visuels impressionnants que de se mettre au service de la lisibilité du titre, permettant de guider nos actions en nous indiquant subtilement si elles sont encouragées ou non par le jeu, en mettant en évidence la verticalité du level-design… La seule chose qui a un peu vieilli c’est sa map réalisée avec le mode 7 évidemment, qui peut avoir quelques soucis de lisibilité par ailleurs, mais franchement c’est pas si mal que ça et c’était important de montrer en début de vie de la console cette utilisation possible de ce mode graphique innovant, comme pour la Triforce en 3D avant l’écran titre.


Un certain sens de la mise en scène se retrouve avec le moteur du jeu pour les événements les plus importants de la trame, comme un climat nuageux et des couleurs froides dominantes s’évanouissant pour laisser place à une éclaircie et aux couleurs chaudes alors que l’on s’empare de la Master Sword. Je n’arrive peut-être pas à rendre justice à la qualité de cette mise en scène à l’écrit mais elle est pour moi une très grande force du titre et le jeu se réclamant être une référence du jeu d’aventure, c’est le genre de chose à ne pas négliger.


La présence de 2 déclinaisons artistiques opposées, la lumière et les ténèbres, pour tous les environnements est une superbe idée esthétique. Les arbres en sont l’exemple le plus courant et flagrant, d’un côté un design très jovial et apaisant, de l’autre terriblement anxiogène et malaisant. Certains décors sont carrément macabres et très audacieux tout en étant toujours très soignés. Pour le design des ennemis, il est assez respectueux des intentions du premier volet en corrigeant certains designs un peu loufoques pour mon plus grand plaisir, mais ce sont surtout les boss qui ont retenu mon attention avec des sprites massifs, dynamiques et détaillés.


Si je ne suis pas fan du chara-design de Link en jeu, assez éloigné qui plus est de celui des artworks du même jeu, l’évolution de sa tenue au fil des équipements collectés est assez notable. C’est dommage tout de même que l’on ait pas droit à une version obscure de Link dans le monde des ténèbres, ils ont fait le choix de l’excentricité en le transformant en lapin rose inoffensif pour la blague. Heureusement, cette touche d’excentricité qui peut complètement désamorcer les intentions artistiques sombres est suffisamment mise en retrait pour que ça ne pose pas trop problème dans le cas présent.


Sur le plan sonore, ce qui devient le cahier des charges des effets sonores des jeux Zelda se confirment avec cet épisode mais surtout l’OST, signée par Koji Kondo qui fait son grand retour ayant manqué le deuxième épisode, comprend beaucoup plus de thèmes musicaux avec le passage à cette génération, des thèmes parmi les plus emblématiques de la saga : le thème du village Cocorico, la berceuse de Zelda, la musique des fées… Que ce soit pour donner le sentiment de partir à l’aventure, d’être apaisée dans une zone de repos, d’être sous tension dans une situation dangereuse… l’OST sera toujours efficace. Ça ne sera peut-être pas le cas pour les questions scénaristiques et narratives.



SCENARIO / NARRATION : ★★★★★★☆☆☆☆



L’univers du jeu présente une guerre passée qui a va impacter le présent, deux univers parallèles, plusieurs antagonistes… Le passage d’une génération a une autre, et accessoirement l’arrivée d’un nouveau scénariste pour la série en la personne de Kensuke Tanabe, est aussi marquée par une densification du récit qui apporte des intrigues inédites tout en étoffant l’univers de la saga, en revenant par exemple sur les origines de la fameuse Triforce. C’est une volonté qui concorde bien avec la traduction française intégrale et de bonne qualité du titre.


En effet, si le deuxième jeu Zelda poursuivait les aventures du premier opus de façon linéaire, A Link to the Past est le premier jeu Zelda à complexifier la trame de l’ensemble de la saga en opérant un retour dans le passé, même s’il n’est pas encore question des différentes et controversées timelines. C’était un choix original et audacieux pour l’époque qui distingue le titre de sa concurrence, mais c’est une ambition qui n’ira malheureusement pas très loin au-delà de ces premières qualités.


La fin qui revient sur le dénouement de chaque intrigue annexe que l’on a pu rencontrer illustre à la fois l’ambition première et le peu qui en fait finalement. Cette fin récapitulative est une bonne idée en soi mais finalement elle n’apporte pas beaucoup d’informations très intéressantes, reflétant la pauvreté scénaristique de l’ensemble, ou alors les apporte de façon trop facile et bancale, comme la survie un peu ridicule de l’oncle qu’on avait autant oublié que le jeu jusqu’à cet ending.


D’ailleurs, cet oncle permet aussi de voir que la passivité totale de Link pendant les dialogues demeure un peu problématique par moment : alors que son seul parent connu semble mourir sous ses yeux, Link demeure impassible et quand il récupère son épée il semble bien content de la récupérer, il y avait peut-être moyen de rendre ça un peu moins invraisemblable, ou alors en éjectant tout simplement l’oncle du scénario parce qu’en l’état il ne sert vraiment à rien. Et ce n’est pas le seul point sur lequel la narration peut être limitée.


Le schéma narratif séparant un donjon du suivant se répète ad nauseam avec le petit texte qui te réexplique la même chose comme s’il s’agissait d’une grande révélation, te demandant si tu as bien compris alors que ça n’a rien de compliqué… Ambitieux et original de prime abord, ses apparentes densification et complexification ne masquent pas un récit finalement très classique au schéma narratif quelconque. L’intensité de l’aventure ne vient pas pour moi des qualités scénaristiques et narratives de ce titre qui restent passables, qui ne désacralisent aucun élément central de son univers mais qui constituent pour moi le point le moins travaillé de cet épisode.



CONCLUSION : ★★★★★★★☆☆☆



Incontestablement, The Legend of Zelda A Link to the Past est un incontournable de sa saga, de sa console, de sa génération… tant il fut innovant dans ses mécaniques de jeux, généreux dans son contenu, impressionnant techniquement et à l’esthétisme soigné, l’ampleur de son influence sur les jeux d’aventure lui succédant parle pour elle-même. Personnellement, je n’adhère pas à tous les choix qui ont pu être faits, je pense que la formule n’est pas encore tout à fait maîtrisée et ce n’est pas encore le premier Zelda à se hisser parmi mes jeux préférés, mais ça reste une grande aventure 16-Bits, l’une des toutes premières.

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le 5 avr. 2020

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damon8671

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