Utawarerumono: ZAN
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Utawarerumono: ZAN

Jeu de Aquaplus (2019PlayStation 4)

Quand ton jeu à petit budget sensé toucher le grand public manque d'ambition

(Test originellement publié le 23 septembre 2019 sur GameHope.com)


La série Utawarerumono existe depuis quasiment 20 ans au Japon mais n'est arrivée dans nos contrées occidentales qu'il y a deux ans avec l'épisode Mask of Deception sorti sur PS4 (et qui nous avait plutôt bien convaincus) : ce visual novel, ponctué de quelques phases de RPG tactique, a aujourd'hui droit à une version raccourcie avec Utawarerumono Zan, un jeu d'action qui a (peut-être) pour but de ratisser un public plus large.


Avant de commencer ce test, figurez-vous qu'on s'est livrés à une expérience intéressante : la personne qui a testé Mask of Deception n'est pas la même que celle qui teste la nouvelle adaptation de cet épisode. En effet, n'étant pas personnellement très friand de visual novel, je me suis dit qu'une version condensée serait plus à même de me servir de "teaser" pour me donner envie de parcourir le reste de la série si j'accrochais à l'univers. Mais la question qu'on se pose de prime abord en lançant le jeu est : est-ce qu'une histoire qui s'étend sur une trentaine d'heures peut avoir autant de charme et être aussi captivante sur une adaptation qui est cinq fois moins longue ?



Un scénario rythmé par Haku



On ne va pas revenir longuement sur le scénario (puisque notre test du jeu d'origine le faisait très bien), mais pour le résumer en quelques mots : vous suivez les pérégrinations de Haku, un jeune homme ayant perdu la mémoire et qui intègre une troupe de joyeux lurons qui va remplir toutes sortes de quêtes dans un Japon féodal. On sent très rapidement les origines du titre que l'on a entre les mains puisqu'on est vite rattrapé par des phases de dialogues très similaires à celles d'un visual novel : un personnage (ici en 3D au lieu de la 2D habituelle) très peu animé devant un décor. Notre personnage principal (à gauche sur le screenshot plus haut) nous laissera parfois entrevoir ses pensées, et ces dialogues seront régulièrement entrecoupés par un narrateur qui remettra un peu de contexte à ses aventures.


Mais si les dialogues sont plus agréables qu'un visual novel classique (car les animations se font de façon plus fluides qu'en 2D), tout en étant supplantés par des doublages japonais convaincants, tous les néophytes de la série en viendront au même constat une fois la manette posée : le scénario ne prend malheureusement pas son temps. En effet, on se retrouve vite face à une avalanche de noms et de personnages qui se confondent, dont les quêtes personnelles et les péripéties s'enchaînent sans y accorder assez de valeur... et tout cela pour atteindre un dénouement final qui ne fera que lever un sourcil au joueur.



Kuon se le dise, ça sent l'Atuy



Si vous êtes un peu rebutés dès les premières minutes de jeu par la localisation française quasi-inexistante, puisque seul le dos de la boîte est traduit dans la langue de Molière (le reste est en japonais avec une interface et des sous-titres en anglais... et parfois du vieil anglais que les non-bilingues auront du mal à suivre), il est possible de se consoler un peu avec le côté "action" du titre. Vous avez ici à votre disposition douze personnages déblocables au fur et à mesure de votre aventure, avec des attaques et coups spéciaux propres à chacun pour défourailler insectes géants et soldats en tous genres, et avec la possibilité de switcher de l'un à l'autre à la volée en plein combat. Vous aurez même l'occasion d'améliorer ces personnages si vous remplissez des objectifs bonus pendant vos missions, le tout servant à améliorer leurs points de vie, d'attaque, de défense, etc.


Cependant, tous ces personnages et ces options à votre disposition tombent un peu à l'eau face à la difficulté peu présente tout au long du titre. Par exemple, même si tous les combats du jeu sont limités à 20 minutes chacun, vous risquez de ne pas passer plus de la moitié pour atteindre l'objectif. D'autre part, les ennemis s'enchaînent assez rapidement sous vos yeux et n'ont visiblement pas assez de temps pour vous mettre des bâtons dans les roues, à l'exception des 2-3 boss (situés à la moitié et à la fin du jeu) qui vous mettront une petite misère si vous n'avez pas assez "farmé" de points d'expérience sur le reste de l'aventure. Une difficulté en dents de scie qui pourra en rebuter plus d'un à voir la fin de l'aventure.



Un peu Maroro d'avoir l'arrière-train entre deux chaises



Avec un cahier des charges situé à mi-chemin entre le visual novel et le jeu d'action, il est dommage de voir que Utawarerumono Zan n'arrive pas à remplir les objectifs du genre de l'un ou de l'autre : avec une durée de vie "en ligne droite" située entre 5 et 6 heures, l'aventure laisse le joueur sur sa faim et il aurait été préférable qu'elle dure deux fois plus longtemps pour que l'on s'attache davantage aux personnages et au système de combat. En plus de cela, le rythme est malheureusement un peu haché puisque, sur les 18 missions du jeu, une petite moitié d'entre elles ne consiste qu'à vous servir des phases de dialogues tandis que les autres sont agrémentées d'une phase "d'action".


Cependant, si jamais vous souhaitez prolonger l'expérience, le jeu met à votre disposition des missions annexes consistant à vous refaire les phases de combat précédemment terminées, mais avec quelques ennemis et objectifs en plus. De même, vous pourrez jouer à ces missions en coopération en ligne jusqu'à quatre joueurs, pour profiter ensemble de la musique entraînante du titre. D'ailleurs, petite mention spéciale à la bande originale du jeu qui accompagne bien ce qu'il y a à l'écran, notamment grâce à ses thèmes d'intro et de fin vraiment convaincants, mais aussi des musiques de combat "électro-pop" et des musiques en fond des phases de dialogues plutôt agréables.



Mais Ougi s'adresse ce jeu ?



Si on peut voir le potentiel d'une telle adaptation, il semblerait qu'elle ait cruellement manqué de moyens pour s'accomplir complètement : on aurait tellement aimé beaucoup plus de cinématiques joliment mises en scène pour sortir du cadre "visual novel" du jeu d'origine... Vous savez, celles avec des mouvements de caméras et des animations soignées (comme c'est le cas ici pour "l'opening" ainsi que pour les cinématiques de début et de fin de jeu). Cependant, au lieu d'être la norme, ces jolies cinématiques sont ici l'exception. De même, le joueur a droit à une petite variété de décors, mais avec un level design assez plat et pauvre (ou peu exploité), tandis que les ennemis peinent eux aussi à se renouveler.


Mais, tout au long du jeu, on ne peut s'empêcher de se demander : à qui s'adresse cette adaptation ? Si les fans du jeu d'origine pourraient être contents d'avoir un gameplay de combat sympa (mais un peu trop "basique") qui va offrir une nouvelle perspective sur les affrontements de l'aventure de Mask of Deception, ceux qui veulent découvrir la série pour la première fois ne comprendront pas grand-chose du scénario (pourtant le cœur du jeu et pourtant prometteur), et ne seront pas plus emballés par ce que le titre veut offrir par ailleurs.



Conclusion



Résultat des courses, il est compliqué de voir l'intérêt d'Utawarerumono Zan auprès de son public déjà acquis ou auprès des joueurs qui veulent se lancer dans cette aventure un peu fantastique dans un Japon féodal : le scénario ne va pas assez loin et peine à captiver l'intérêt, tandis que le gameplay n'arrive pas à faire beaucoup mieux. On sent qu'il y a un fond riche et complexe dans cet univers, mais Zan n'est clairement pas une bonne adaptation "grand public" de visual novel : il y a beaucoup trop d'éléments qui manquent à l'appel, et la forme ne fait pas assez honneur au matériau d'origine pour que l'on puisse vous le recommander les yeux fermés... surtout à 60€ à sa sortie.

Ratchetlombax
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le 6 mars 2021

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