Après l'injouable Shadowgate qui n'a été terminé à la loyale que par une poignée de masochistes y jouant 18 heures par jour pendant un semestre, cette suite part avec un héritage lourd à porter. Il va pourtant sans sortir étonnamment bien. Si on retrouve tout le coté point'n'click agrémenté de nombreuses énigmes, le coté jeu d’aventure en temps réel apporte un plus indéniable qui change radicalement de son ainé.
On reste dans du Shadowgate donc c’est plutôt dur, mais loin d'être aussi frustrant que l'opus fondateur et sa difficulté ubuesque. Ici, point de système de torche pourri bon à te faire abandonner au bout de cinq minutes ni d'énigmes à la logique nébuleuse. Ces dernières sont bien calibrées, même si on échappe pas occasionnellement à quelques phases tests où l'on utilise le même objet un peu partout pour en trouver la fonction (cf le poivre). Il n'est d'ailleurs pas nécessaire de toutes les résoudre pour finir le jeu, mais c’est un plus non négligeable pour augmenter ses chances de réussites.
Le coté action en temps réel offre quelques phases beat'em all pas forcément très souple, à l'image du perso bien raide, mais les ennemis ne sont pas trop ardus une fois qu'on a pigé comment les battre. Par contre, le début du jeu te met direct dans le bain, et entre les groupes de gardes, les monstres et les premières énigmes, c'est une phase d'apprentissage par moment éprouvante. Mais une fois arrivé en extérieur, le plus dur est derrière soi, et l'on acquis une bonne compréhension du gameplay. Il est recommandé de sauvegarder souvent, les morts brutales et inopinés sont légions, avec certains pièges offrant un bel aperçu de la sournoiserie des développeurs.
Par contre le jeu est un peu salaud avec sa liberté. Certaines possibilités peuvent être bousillés par de mauvais choix auxquels on ne prête guère attention sur le coup, et il est possible de se bloquer définitivement dans sa partie si on est pas trop chanceux. J'y ai échappé de peu avec le coup des pièces d'ors limités en nombre en utilisant la dernière pour un objet qui m'a permis de terminer le donjon final. Mais j'aurais pu ne pas avoir cette chance.
Les environnements sont variés et offrent de nombreuses interactions, descriptions ou animations gratuites de la faune pour le coté fun. C'est statique car sous forme de peinture, mais ça rend bien et l'intégration des PNJ/bestioles est réussite. Les persos ont un style bande dessinée, et leurs expressions en sont parfois issues (les gros yeux et diverses grimaces). Et le jeu est assez gore, surtout dans les morts du héros. C'est sanglant et parfois crade.
Il y a gros travail sur les effets sonores, très reconnaissables, et les doublages dans les nombreuses discussions sont suffisamment honnêtes pour être compréhensible à l'oreille, mais il faut comprendre l'anglais car pas de sous-titres et les indications de vos interlocuteurs sont souvent vitales pour comprendre où aller ou quoi faire. Les très bonnes musiques ajoutent à cette ambiance dark-fantasy dans lequel cette univers baigne. Cela se passe d'ailleurs longtemps après le premier Shadowgate. Il y a de nombreuses références à cet opus et on apprend pas mal de chose sur l'univers de la licence, qui mine de rien, a un sacré potentiel. Dommage que ça manque au final de lore, pas mal de chose restant mystérieuses. Quelques bouquins à feuilleter auraient été bienvenues.