Retour à l’abattoir !

Pour bien comprendre le bien... et le MAL !

Ah l’an 2000 ! La dernière année du XXème siècle ! Une année de folie en terme de fantasy ! C’était l’année d’un premier trailer pour le Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, l’année où sortait une nouvelle version de Warhammer (Le Jeu des Batailles Fantastiques) et surtout l’année où allait se déverser plusieurs titres vidéoludiques considérés presque unanimement comme des incontournables ou des chefs-d’œuvre dans leur genre : Planescape: Torment (sortit en janvier 2000 chez nous), Thief 2: The Metal Age, Icewind Dale, Baldur’s Gate 2: Shadows of Amn, et bien sûr en ce qui nous concerne ici : Diablo 2 !
Bilan : une année jouissive mais particulièrement éprouvante pour un mordu de fantasy comme moi devant les centaines, les milliers, voire les dizaines de milliers d’heures de jeu que nous offraient tous ces titres…
Si je préfère néanmoins le genre du RPG pur à la Baldur’s Gate, à celui du pur Hack’n’slash à la Diablo, je ne peux pas nier toutes les excellentes choses qu’a pu nous offrir ce Diablo 2. En plus, comme pour beaucoup de personne de ma génération, son prédécesseur avait été notre tout premier contact avec de la fantasy sur ordinateur… Un PMT (Porte Monstre Trésor) qui prenait aussi pour moi la relève de ce bon vieux Heroquest plateau. Bref, des souvenirs impérissables avec la musique de Tristram en fond.
Les Diablo c’étaient surtout de gros défouloirs très addictifs et sans prise tête en rentrant des cours.

Magie, magie et vos idées ont du génie !

L'impact de Diablo 2 est difficilement quantifiable. Pour énumérer tout ce que Diablo 2 a apporté au genre et bien au-delà, il faudrait plusieurs pages et ce n'est pas vraiment le sujet ici.
Ceci ne devrait pas être une critique du Diablo 2 d’origine. Mais peut-on vraiment dissocier ce Resurreted de l’original sur le fond ?

Je ne me permettrais pas ici de mauvaises critiques anachroniques comme on en voit beaucoup trop, sauf une qui ne l’est pas, en rapport avec un certain type de classe et l’une des innovations majeures du titre : l'arbre des compétences.
Ce système, repris dès lors un peu partout dans l’industrie vidéoludique, a pour but de bien compartimenter chaque classe avec ses capacités et son style de jeu propre et de diversifier encore le tout avec toutes les constructions possibles. Un excellent système en soi devenu tellement banal aujourd’hui !
Sauf qu’à la sortie du titre l'arbre des compétences me posait problème en terme de plaisir vidéoludique avec l’un de mes archétypes de classe de fantasy préféré. Un archétype que l’on pourrait désigner sous des appellations aussi diverses que « sorcier, mage, magicien, enchanteur, etc. »
En ce qui nous concerne ici : la sorcière et le nécromancien.
Bref, pour faire simple : moi je préférais la mécanique de jeu qui consistait à trouver et apprendre ses sorts (voir à les acheter) via les parchemins comme dans Diablo 1 ou Baldur’s Gate. C’est aussi l’une des raisons qui me fait préférer les Icewind Dale sur ce point.
Je pense que pour un « magicien » trouver ses sorts c’est comme trouver une belle arme ou armure pour un « guerrier ». Ce sont leur vraie récompense, leur véritable trésor. Et comme l’essence d’un Diablo peut se résumer à une course à l’équipement et à la puissance, j’aurais aimé que certains sorts fassent partie du butin…
Néanmoins, je comprends que les concepteurs aient fait le choix pour toutes les classes de garder l’uniformité de la mécanique reposant sur l’arbre des compétences. Comme je l’ai dit, c’était déjà une belle innovation pour l’époque !

Pour continuer mon propos, si j’aime que les magiciens et leur magie soient bien puissants (ce qu’ils demeurent ici au travers de la sorcière ou du nécromancien avec leurs sorts bien jouissifs) ce sont aussi des archétypes ou des classes qui ne dépendent justement pas trop de leur équipement grâce à cette puissance. Il ne fallait donc pas s’étonner qu’une sorcière à poil (ou même un nécro) soit balèze d’entrée de jeu. Et je ne parle même pas une fois bien équipé.
Sans même rentrer dans les détails d’équilibrage entre les différentes classes ou les différents « builds » (certaines sont clairement au dessus du lot en terme de puissance et les deux concernées en font donc partie), vous comprenez peut-être mieux pourquoi trouver certains sorts les plus puissants (au delà du plaisir de la découverte), auraient aussi permis de mieux rééquilibrer le jeu ainsi que le plaisir de montée en puissance qui en découle. Le sort « Teleport » on en reparle ?

Je finirai cette illustration sur un contre-exemple : le Paladin (Hammerdin ou pas), la classe considérée (sans trop de contestation) comme la plus puissante en fin de jeu est aussi celle qui offre l’une des meilleures montée en puissance car elle repose sur un bon équilibre entre compétences débloquées et équipement à acquérir.
Maintenant la puissance ne fait pas tout et le plaisir et la maîtrise du gameplay offert par une classe prime avant tout le reste (testez la Bowazon !) et qu’à long terme si vous êtes bien équipé et que vous savez un minimum jouer, en mode "Enfer" vous aller tout poutrer…

En ce qui concerne la version Resurrected maintenant (ce qui nous intéresse vraiment ici) :

- Est-ce un bon "remaster"?

Pour moi, c’est du tout bon, de l’excellentissime même ! La réhausse graphique est de toute beauté et fait plus qu’honneur à la version d’origine et à sa vision artistique, en permettant de redécouvrir dignement ce monument sur les supports actuels avec l’ajout de nouvelles fonctionnalités de confort pour le joueur (pour la plupart désactivables)… et le plus important : sans dénaturer l’œuvre d’origine et sans l’ajout de nouveaux contenus supplémentaires anachroniques. Car on est ici -stricto sensu- dans ce qu'on appelle un "remaster". Merci Blizz… heu Vicarious Visions !
On aurait aimé voir le même niveau de qualité et de sérieux pour la saga Baldur’s Gate tient ! Hein Beamdog ! Avec leurs bidouillages digne d'un papi Lucas...

- Est-ce un bon "remake" ?

Ce n'en est pas un et ça n'a jamais été vendu comme tel.

Les critiques les plus acerbes et souvent pleines de haine (pas toujours justifiée) envers ce "remaster" viennent de joueurs qui auraient souhaité plus que tout un "remake" du titre avec l'ajout de contenu supplémentaire, un équilibrage des classes, des stratégies de boss revues et corrigées, etc. Néanmoins (en mettant de côté les critiques anachroniques et à postériori), je peux comprendre la frustration de certains car moi-même j'avais souhaité le même genre d'expérience sur leur World of Warcraft: Classic et je pourrais faire la même critique que pour ce dernier : aujourd’hui tout est référencé - des meilleurs « builds » aux meilleurs équipements - alors qu’à l’époque tout était à découvrir et à expérimenter sans l’aide de tout ce qui est maintenant disponible sur la toile et que trouver les meilleurs « builds » pouvait aussi représenter l’un des intérêts du jeu.

- Blizzard des fainéants ?

Ce n'est plus un secret pour personne. L'âge d'or du studio est loin, très loin... Pour bien faire les choses ils auraient pu proposer un "remake" en complément de ce "remaster" (comme ils auraient dû le faire selon moi pour WoW Classic) mais c'eût été beaucoup beaucoup trop leur demander... et puis ils sont trop occupés sur Diablo 4 ou avec leurs ennuis judiciaires. Mais après l'échec cuisant de Warcraft 3 : Reforged, heureusement Blizzard fait sous-traiter ici par des pros - Vicarious Visions - sans oublier au passage d’empocher quand même les sous...

Mais si je prends ce Resurrected pour ce qu'il est, c'est à dire un "remaster", mon seul vrai reproche (minime) tient aux cinématiques. Certes, c’est refait en HD tout beau, tout frais, etc. Mais la définition ne fait pas tout. Je me rappelle encore ma découverte de la cinématique de l’Acte 1 à l’époque, que je regardais en boucle tellement son impact était fort… et que lors de ma première partie j’étais plus pressé de passer à l’Acte suivant pour découvrir la nouvelle cinématique que par tout le reste (grande force de Blizzard à l'époque, réitérer sur Warcraft 3 ensuite).
Bref, alors que la cinématique de 2000 me fait toujours le même effet, celle de 2021 en HD - sans être à jeter aux chiens, loin de là - est moins percutante. Cela tient aux lumières, aux modèles et expressions des personnages,… le tout apparait beaucoup moins étrange et bizarre quand bien même le tout semble coller trait pour trait à l’originale.

Pour finir, je prends beaucoup de plaisir à refaire Diablo 2 sous cette version, n'ayant pas eu le temps à l'époque de totalement "polisser" le jeu. L'ambiance est toujours excellente, les classes et les compétences toujours aussi jouissives et ça reste un excellent défouloir en rentrant... du boulot !

A moins que vous ne soyez totalement réfractaire au genre du Hack'n'slash (ce que je peux comprendre), à la dark fantasy, ou plutôt au fait de filer votre pognon à une entreprise devenue nauséabonde avec le temps, essayez cette mouture dépoussiérée de Diablo 2, l'un des titres qui a surement conditionné le plus l'industrie vidéoludique ces vingt dernières années pour le meilleur... comme pour le pire !

Meuh ! Meuh ! Meuh !