Mother est sorti en 1989, et il est mécaniquement très proche de ses contemporains : encounter rate très élevé, inventaire très limité, grands donjons plutôt confus, et des compagnons pas forcément évidents à trouver. Là où il se distingue radicalement de la concurrence c’est du côté de ses thèmes, de son histoire, et de son aspect insolite en général.
On incarne en effet un jeu garçon doué de télékinésie évoluant dans une imitation excentrique des USA de 1990, qui va être témoin d’étranges évènements et va décider d’aller enquêter pour voir de quoi il retourne. Difficile d’en dire plus sans trop spoiler, alors je me contenterai de vous dire que le premier ennemi est une lampe de chevet et le deuxième un hippie vous attaquant sur fond de Johnny B Goode version chiptune. Ça pose le décor.
Mais si on part de ce postulat pour se dire que Mother est un jeu idiot, et bien on a tout faux. Le jeu joue sur de nombreux registres émotionnels, et les éclats de rire du début du jeu cèderont bientôt la place à l’interrogation, à la perplexité, et plus tard à la mélancolie.
Difficile de ne pas mentionner le fait que le jeu devient de plus en plus sérieux et adopte un ton de plus en plus sombre au fur et à mesure de notre progression. Entre ce village habité seulement par des enfants tristes d’avoir perdu leurs parents, ce héros qui sera grièvement blessé, et les derniers instants avant le boss final, on sent une volonté des développeurs de ne pas édulcorer leur propos.
Bref Mother jouit d’une qualité d’écriture certaine, mais des défauts viennent quand même émailler le tableau :
Comme mentionné plus tôt, l’encounter rate couplé à la complexité atroce des donjons rend certains passages inutilement longs (l’exploration de l’usine est une véritable gageure), et les compagnons arrivent un peu trop tardivement. A cause du manque d’indices menant à ces personnages secondaires, mais aussi parce que le monde plutôt vaste est associé à une carte imprécise (et encore une fois l’encounter rate élevé rend difficile l’exploration de ces zones plutôt grandes). La healer, notamment, arrive si tard qu’elle sera constamment en retard en niveaux par rapport au héros, et si on couple ça à sa fragilité intrinsèque, et bien elle est toujours en train de mourir… Heureusement la pénalité en cas de Game Over n’est pas trop importante, mais ça fait toujours perdre du temps.
L’inventaire limité à 8 objets est également source de frustration, dans un jeu où les objets ne s’empilent pas, 8 c’est vraiment peu.
Heureusement le jeu ne comporte aucun moment bloquant en terme d’enigmes ou de « qu’est-ce que je fais moi maintenant ? ». Ce qui fait que j’ai pu le finir sans soluce, et ça c’est cool pour un RPG 8 bits.
Par contre, un cliché de l’époque dont on se serait bien passé, c’est le donjon final rempli d’ennemis possédant des sorts tuant en un coup. On en est pas au stade de Dragon Quest II ou de Final Fantasy II, encore heureux, mais c’est vraiment une idée de design que je trouve nulle. Parce que certes, si les dieux du RNG y consentent, ça finira bien par passer, mais c’est pas exactement fun d’attendre cet alignement de planètes…
Bref Mother est un jeu qui brille par son univers mais qui pâtit de mécaniques de jeu parfois un peu trop frustrantes. Une belle expérience quand même.
14/20