Pour appréhender Far Cry 2 sereinement il faut oublier qu'il s'appelle Far Cry. Les créateurs de la licence, Crytek, ont vendu la licence à Ubisoft et sont parti faire l'excellent Crysis de leur côté. Une licence qui change de créateur ce n'est jamais très bon, et ça l'est encore mois lorsque les caractéristiques de licence disparaissent : adieu Jack Carver (le gentil idiot en chemise à fleur qui servait de héros), adieu les îles paradisiaques, adieu les monstres et manipulations génétiques, adieu n'importe quel type de lien scénaristique... Far Cry 2 est une usurpation de licence caractérisée. Ceci étant établi ça n'en fait pas un mauvais jeu pour autant puisque le titre d'Ubisoft Montréal recèle un certain potentiel.
La seule filiation qu'entretien Far Cry2 avec son aîné est la liberté. Les maps ouvertes et gigantesques font désormais place à un univers ouvert et continu façon sandbox avec des villes, des forêt, des montagnes, etc... La justification des véhicules devient encore plus naturelle et primordiale avec cette orientation.
L'Afrique de Far Cry 2 est jolie, surtout sur PC, avec sa faune sauvage, sa végétation changeante et ses jolies paysages baignant dans une lumière toute aussi jolie.
Elle est aussi dangereuse car peuplés de dangereux trafiquants, de fourbes complots et de factions séparatistes aux motivations obscures. Au beau milieu de tout ça notre avatar doit traquer le chacal, LE marchand d'arme qui permet à tout ce beau monde de s'entretuer sur fond de trafic de diamants de sang.
Une histoire traitée au premier degré et qui aborde des thèmes difficiles. Un choix audacieux qui soutient l'orientation réaliste de la direction artistique mais qui n'est jamais réellement traité, faute à un scénario extrêmement dilué, qui lance des idées en l'air sans rien en faire (comme la maladie du héros qui ne sert finalement à rien de plus que créer artificiellement de la tension).
Côté combats les sensations des armes sont plutôt bonnes et les gunfights sont nerveux mais l'IA ne suit pas toujours. Parfois elle est trop conne pour nous repérer derrière un buisson et parfois elle nous snipe à 500 mètres avec un simple pistolet. Malgré ces aléas elle reste assez agressive et sait offrir un certain challenge quand elle est en surnombre. Le système de santé à base de barre de vie qu'il faut recharger de façon active (avec des piqures magiques) et de blessures graves (qui doivent être soignées impérativement sous peine de saigner à mort) évite le syndrome du "je me cache derrière un caillou 5 secondes et ça repart" récurent dans l'immense majorité des FPS modernes.
La vraie originalité du gameplay vient d'une utilisation concrète du feu, on peut en effet embrasé la moindre brindille pour bloquer une issue, brûler ses ennemis ou créer une diversion. Dans les faits l'intérêt se révèle assez limité et les incendies sont souvent accidentels mais ce danger permanent, et aléatoire, rajoute une bonne dose de fun dans les affrontements. Quand on connait l'efficacité des armes explosives (le lance-grenade !!!) ça ouvre des possibilités sympathiques.
Comme dans n'importe quel open world le joueur doit récupérer ses missions à différents endroits de la carte pour aller les résoudre à l'autre bout. Si ces trajets assurent une certaine immersion ils deviennent vite trop systématiques. Au bout de la 25ème mission qui nous oblige à récupérer un paquet à l'opposé de la map on commence doucement à être lassé. Les trajets sont pimentés par les innombrables points de contrôle gardés par des miliciens belliqueux. Là encore la crédibilité de l'univers n'en est que plus forte mais le procédé a tendance à saoulé à la longue.
Il y a une poignée de type de missions et le jeu multiplie les déclinaisons sans rien changer d'autre. Très vite la sensation de faire toujours la même chose dans des décors différents s'installe. Les rares missions "uniques" et originales sont dispersées trop sporadiquement dans le déroulement pour briser la monotonie. Le monde ouvert deviens alors la fausse bonne idée puisque les principaux changements qu'il induit sont des missions copier/coller ad nauseam et des aller-retour incessants et plutôt longs (car elle est grande cette carte !) pour les faire.
Far Cry 2 est le genre de titre qui a de bonnes idées mais qui les exploite mal.
D'un point de vue graphique rien à redire, comme souvent chez Ubi la direction artistique tient la route, l'ambiance est originale et saisissante et, en tout cas sur PC, le jeu est vraiment beau. L'emballage soigné ne masque hélas pas longtemps les lacunes du titre. Avec son histoire trop rigide et sa narration trop diluée le jeu peine à maintenir l'intérêt sur la longueur. Il n'y a aucun personnage mémorable, on ne différencie pas vraiment les différentes factions, le déroulement piétine... bref difficile de se sentir impliqué. A cela on peut rajouter les mécanismes répétitifs (les barrages systématiques, des situations copiées-collées, une IA bancale qui empêche de varier les approches malgré le monde ouvert) qui participe aussi à la baisse d'intérêt progressive.
Un intérêt qui n'est pas spécialement relancé par le multijoueur. Pas franchement emballant même si distrayant les temps des premières parties.
Dommage, car les échanges musclés dans la savane inflammable ont un certain charme mais la lassitude fini par l'emporter.