Mettons immédiatement les points sur les « i » : sur Switch, les performances du jeu oscillent en permanence entre le « médiocre » et le « mauvais », avec des graphismes tellement aliasés qu’on ne distingue parfois plus la route. C’est vraiment une honte, même pour moi qui suis habituellement très tolérant, et d’autant plus dommage que le jeu est plutôt fun, mais vous risquez comme moi de rager un peu de ne pas réussir à rattraper un bon nombre de dérapages à cause de la latence d’affichage. Globalement, le jeu manque gravement de finitions : j’ai subi un plantage, les menus affichent parfois des erreurs, il manque des options de base, certains concepts ne sont pas expliqués ou à moitié implémentés…
Euro Truck Racing vous propose de vous faire une place lors de votre carrière dans deux catégories : ETRC avec les camions européens « carrés », et World Series, avec les camions à l’américaine avec un « gros nez », sur les 14 circuits du championnat officiel de 2019, qui mélange les grands classiques (Laguna Seca, Le Mans…) et les moins courants (Misano, Most, Zolder…). Tous les pilotes officiels sont présents, mais je n’ai aucune idée du nombre de véhicules : on ne sélectionne que les pilotes, le jeu ne nous dit pas ce qu’ils conduisent ; à vue de nez il semble y avoir 5 ou 6 modèles dans chaque série. Les modes de jeu sont classiques : carrière, course rapide, championnat, écran partagé, contre la montre, mais il n’y a pas de multijoueur, ni local ni en ligne.
Le mode carrière commence par un permis : 15 épreuves à réussir pour avoir le droit de piloter, et qui servent de tutoriel pénible, répétitif et trop long. La progression du reste de la carrière est probablement la plus étrange que j’aie vu : on commence par passer une année en électron libre en signant un nouveau contrat chaque weekend de course, et c’est seulement la seconde année que l’on aura un contrat fixe pour toute la saison. Le choix de l’écurie se fera totalement au hasard : on n’a aucune idée des performances du véhicule, ni même de la marque ou le modèle ! Les contrats sur toute la saison demanderont d’améliorer mais aussi de réparer les véhicules ; en revanche, les améliorations se bornent à investir des sous jusqu’à ce qu’une jauge atteigne 100%. Autre concept étrange, les carrières ETRC et World Series se déroulent en parallèle, et vous pouvez être champion du monde ETRC depuis 3 saisons mais devoir quand-même démarrer en bas de l’échelle des WS, en n’ayant pas accès aux sous ni à la réputation de l’autre série. On ne peut pas mélanger les deux sur le même calendrier, on ne peut pas piloter un camion ETRC sur une piste WS, et certainement pas s’affronter en direct.
Le jeu suivant scrupuleusement le règlement officiel, les weekends de course se déroulent en 2 fois 2 manches avec essais, qualifs, super pole, course aller, course retour, et rebelote le lendemain. Toutes les étapes sont obligatoires (sauf les essais), ce qui rend les courses particulièrement interminables : j’aurais apprécié une option pour ne faire qu’une seule journée, et démarrer en milieu de pack en sautant les qualifs, d’autant plus que la super pole est vraiment inutile : elle sert « en vrai » à départager les 10 premiers sur 30 pilotes en lice, mais comme le jeu est limité à 12 véhicules sur la piste, c’est assez ridicule. Il y a également une coupe parallèle (la Grammer Cup) mais à part voir des pilotes sur un podium en fin de course, je n’ai aucune idée de comment influer dessus ou y participer : encore une idée qui aurait mieux fait d’être laissée de côté.
La conduite dans Euro Truck Racing me semble plutôt crédible, bien que la physique ne soit pas vraiment réaliste : une approche de « simulation accessible » un peu à la GRID Autosport. Evidemment, je n’ai jamais conduit un camion, alors qu’est-ce que j’en sais ? Le jeu propose plusieurs originalités : une limitation de vitesse à 160km/h (officiellement « pour la sécurité ») qui empêche de doubler dans les lignes droites (les entrées et sorties de virage deviennent cruciales), ainsi que la gestion du refroidissement des freins à coup de jet d’eau avec une réserve dont on doit surveiller le niveau (ce qui est désactivable). En revanche, aucune gestion de l’usure des pneus, ni de l’essence, ni des dégâts de collision ! Impossible également de contrôler l’accélération avec le stick droit : on est obligé de tapoter la gâchette pour faire des petites accélérations, et entre l’inertie du bestiau et les performances graphiques, il est assez facile de partir au tas. On se console avec des courses sous diverses conditions (pluie, nuit, etc.), ce qui est toujours plaisant.
Autres règles suivies scrupuleusement, le système complexe de pénalités : le jeu nous rajoute du temps lors d’un choc arrière sur un concurrent, une coupe de virage, mais aussi la touche de « plots de pénalité » posés à l’entrée, à l’apex et à la sortie de chaque virage. Tout est désactivable en mode course libre, mais pas en carrière, ce qui est rapidement énervant, particulièrement avec l’IA très bourrine et tricheuse.
En effet, l’IA n’est clairement pas soumise aux mêmes contraintes que nous : non contente de faire des accélérations et freinages hallucinants, elle coupe allègrement les virages, défonce les marqueurs et percute tout le monde, sans subir la moindre pénalité. La difficulté de l’IA est d’ailleurs très variable : parfois le premier file à toute allure et met 10 secondes au tour à tout le monde, parfois on arrive premier sans problème avec 30 secondes d’avance, y compris entre deux essais sur le même circuit. Une chose est constante cependant : elle ignore totalement ce qui l’entoure et percute tout le monde pour passer, en nous envoyant allègrement valser dans le décor. Et je ne parle pas des bugs, comme cette fois où 3 concurrents se sont arrêtés en pleine ligne droite, probablement pour prendre un café.
Avec un gameplay plutôt fun et un concept original, et malgré une impression tenace qu’il n’est qu’à moitié fini, Euro Truck Racing aurait pu être un petit jeu de niche rigolo. Mais tout est gâché par de très mauvaises performances, une IA nulle et un système de pénalités insupportable. Si on arrive à passer outre, on peut y trouver quelques heures d’amusement, de préférence sur une autre plateforme que la Switch.
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