Ceci n'est pas un jeux vidéo. Ceci est un syndrôme de Stockholm.

Encore un jeu qui me démangeait d'essayer par son originalité et par la façon de raconter une histoire par média-vidéo ludique. Après le jeu dont l'histoire se créé sous la forme d'un faux chat interposé, voici, Her Story, un jeu qui nous propose de retracer l'histoire d'une femme (dont on suppose que son mari a été assassiné) en regardant les vidéos de ses interrogatoire au poste.

Alors, c'est une façon étrange de remettre au goût du jour le "jeu en FMV" une mode proposant de faire des jeux à partir de vidéos interactives et qui n'a jamais vraiment fonctionné, de Night Trap au nanardesque Plumber don't Wear Ties.

Pourtant ici, ça fonctionne du feu de dieu. Sans doute parce que l'on met le joueur face à une interface complètement minimaliste : un bureau qui semble fonctionner sous un faux Windows 95 (avec un jeu de casse tête qui traine dans la corbeille) et une base de données de vidéos, très très découpées (allant d'1 minute 30 à quelques secondes) montrant la femme, face caméra, répondant à aux questions des policiers (que l'on entend pas.) Les sessions d'interrogatoires s'étant étalée sur plusieurs jours du 18 juin au 4 juillet 1994

Les 271 vidéos sont dans le désordre complet et l'on a accès en cherchant un mot clé spécifique basée sur les mots qu'elle prononce. Là où cela se corse c'est qu'on a accès qu'aux 5 premières vidéos basées sur ce mot clé : ainsi si l'on tape le prénom de son mari ou son prénom, on tombe sur les vidéos du premier témoignage et pas ce qu'on cherche.

Et c'est tout. C'est au joueur de reconstituer lui-même le puzzle : en notant les indices, les noms des gens et des lieux qu'elle lâche, son récit, la façon dont elle se comporte et d'autres petits indices en espérant retrouver une vidéo qu'on aurait pas vu.

Au bout de deux heures, il s'est créé deux effets bizarres :

1) J'avais un récit totalement décousu au point qu'il m'arrivait de taper des mots au pif en anglais en espérant tomber sur une vidéo que j'aurai pas vu. ("car" "window" "celling" etc...) Au bout d'un moment, s'est installé une sorte de boulimie de témoignage, celle de tenter de voir les fameuses 212 vidéos, même si au fond, j'avais vu une grosse partie du jeu.

2) Je pense que j'ai eu une forme de syndrome de Stockholm pour cette femme. A force de ne voir qu'elle, de l'entendre parler, j'ai fini par oublier limite que c'était une actrice qui jouait un rôle (le fait que ça ne soit pas quelqu'un de très connu y joue pour beaucoup.) Et de collecter tous les petits moments insolites, comme celui où elle joue de la guitare au poste de police ou fait tomber du café sur elle. Finir par l'apprécier, elle. Je finissais par avoir l'impression de la connaître comme s'il s'agissait d'un témoignage radio d'une personne me parlant de sa vie.

Du reste, il n'y a pas une "bonne façon" de faire ce jeu et c'est assez unique. Au bout d'un moment si l'on a vu un certain nombre de vidéos clés, le jeu nous propose d'arrêter (ce que l'on peut faire ou non) et déroule le crédit de fin (avec une micro-révélation.) Ce qui fait qu'au final, selon les joueurs, la façon dont ils ont déroulés l'histoire, selon leur sensibilité et leur intuition, plusieurs théories sont possibles.

Bref, Her Story est très bien pensé au delà de son concept initial (résoudre une enquête par un ensemble de vidéo) pour raconter une histoire qui nous touche et va nous désorienter. Il y a un vrai travail d'écriture derrière ce jeu et c'est ce qui en fait toute sa force.

Après, le jeu est court (en vous démerdant bien vous materez ce qu'il y a à mater en une après midi) et totalement en anglais. A chopper une fois de plus sur Steam en période de soldes. (Après, le jeu est à 5 euros il me semble.)

JEU FINI EN 5H A 100%