Depuis la sortie de LEGO Star Wars en 2005, le studio britannique Traveller's Tales prend un malin plaisir à adapter toutes les licences existantes à la sauce Lego : Indiana Jones, Batman, Harry Potter, Pirates des Caraïbes, Le Seigneur des Anneaux, Marvel, Jurassic Park... tout le monde a eu droit à son jeu d'aventure accessible faisant la part belle à la parodie. Une formule qui est presque devenue un genre à part entière tant les codes sont précis, et qui se renouvelle finalement assez peu au fil des innombrables épisodes. Parallèlement à ce phénomène, un autre genre est apparu il y a quelques années avec Skylanders, suivi par Disney Infinity et autres Amiibo : les "Toys to Life games". En bon français nous pourrions appeler ça les jouets vidéo. S'adressant principalement au jeune public, ces jeux requièrent la possession de figurines physiques que l'on doit placer sur un support adapté. La technologie NFC faisant le reste, la figurine est instantanément matérialisée dans le jeu vidéo sous les yeux ébahis du joueur qui peut alors s'amuser avec. Succès immédiat chez les enfants et les collectionneurs compulsifs. LEGO Dimensions marque l'arrivée attendue de la célèbre marque danoise dans le secteur.
Et le moins que l'on puisse dire c'est que Lego a mis les petits plats dans les grands. Si Disney Infinity a dégainé le premier en s'accaparant les juteux univers Star Wars et Marvel, la riposte de la marque aux briques ne s'est pas faite attendre. Dans LEGO Dimensions, ce ne sont pas moins de 14 univers qui se rencontrent, dont plusieurs inédits dans la famille Lego. Les franchises maison Ninjago et Chima n'intéresseront sûrement pas grand monde contrairement aux personnages issus de Lego Movie au fort capital sympathie, mais comment rester de marbre face à un jeu mêlant Le Seigneur des Anneaux, DC Comics, Retour Vers le Futur, Doctor Who, Portal, les Simpson, Scooby-Doo, le Magicien d'Oz, Jurassic World et Ghostbusters ? Dimensions reprend donc la formule qui a fait ses preuves dans les jeux Lego et s'articule autour d'une campagne scénarisée jouable seul ou à deux, découpée en niveaux mélangeant avec vigueur les univers sus-cités. Vous ne vous êtes jamais demandé ce qu'il se passerait si Sauron envahissait Metropolis ? Les gens de Traveller's Tales l'ont fait pour vous. On se marre tout au long de cette aventure déjantée au fan service omniprésent réservant son lot de surprises et de saillies qui font très souvent mouche. Voir Batman s'en prendre à l'inoffensif épouvantail du Magicien d'Oz dès les premières minutes de jeu permet de réaliser tout le potentiel comique de ce joyeux bordel, bien que quelques inégalités soient toutefois à déplorer. Si certaines licences ont bénéficié du plus grand soin et sont brillamment exploitées pour le plus grand plaisir des fans qui se délecteront de chaque détail (Portal et Doctor Who en tête), d'autres ne manqueront pas de décevoir, le pire étant sûrement le traitement réservé à la franchise Simpsons : absence de la célèbre musique de Danny Elfman, voix de Homer se limitant à des extrait d'épisodes, Bart carrément muet (!!) et design bâclé font de l'escapade à Springfield un moment peu mémorable de l'aventure. On pourra aussi regretter que Jurassic World soit complètement à l'écart du reste et ait été choisi au détriment de Jurassic Park. Mais au delà de la promesse d'un cross-over improbable, c'est surtout par l’utilisation des figurines que LEGO Dimensions se démarque à la fois de sa propre série vidéoludique et de ses concurrents directs.
La marque Lego jouissant de la réputation qu'on lui connait dans le domaine des jouets de construction, il va sans dire que le jeu était particulièrement attendu sur ce point. Le concept est le suivant : le pack de démarrage contient le jeu vidéo, un socle NFC (appelé Toy Pad), une centaine de briques Lego et les minifigs de Wyldstyle, Gandalf, Batman et sa Batmobile. Ces trois personnages sont les protagonistes principaux de l'aventure et sont les seuls indispensables pour terminer le mode histoire. Si ce pack suffit pour profiter de l'expérience globale, certains passages secrets ne se débloquent que grâce à certains personnages ou véhicules particulier. Et contrairement aux précédents jeux Lego et leur myriade de personnages à débloquer en jouant, il faudra ici posséder les figurines physiques correspondantes pour pouvoir en profiter en jeu. Au grand dam de notre portefeuille. Il suffit alors de poser une minifig sur le Toy Pad à n'importe quel moment pour qu'elle soit instantanément jouable, apparaissant à l'écran avec une punchline bien sentie et autorisant toutes les folies comme Wonder Woman chevauchant un vélociraptor ou bien Gollum au volant de la DeLorean. Mais la grande force de LEGO Dimensions, c'est lorsque le jeu demande de jouer "réellement". Comme lorsqu'au tout début de l'aventure un manuel Lego apparaît à l'écran, invitant le joueur à poser sa manette pour construire un portail à l'aide des briques incluses dans la boîte. Ou encore lorsque que l'on décide d'améliorer un véhicule en jeu avant de s'apercevoir qu'il est possible de démonter et remonter son alter ego physique pour lui attribuer sa nouvelle forme. Car oui, les figurines et toutes les pièces constituant le portail, les véhicules et autres accessoires sont de vrais Lego, avec tout ce que ça implique en matière de qualité, de créativité et de collection. Retour en enfance garanti.
Mais l'utilisation du Toy Pad ne s'arrête pas au plaisir simple de jouer avec les briques, c'est une véritable mécanique de gameplay utilisée pour résoudre les différents puzzles du jeu. Divisées en trois sections, le portail permet l'utilisation simultanée de sept personnages ou véhicules. Ces trois parties sont rétroéclairées et permettent d’interagir avec le jeu suivant l'endroit où sont placées les figurines. Par exemple, à certains moments du jeu il sera possible de téléporter les personnages à des endroits inaccessibles simplement en les déplaçant physiquement sur la section du socle éclairé de la couleur adéquate. On pourra aussi localiser des objets cachés en observant le Toy Pad virer au vert lorsque l'on s'en approche ou au rouge lorsque l'on s'en éloigne. Les fonctionnalités sont nombreuses, surprenantes et apportent un véritable vent de fraîcheur à une formule qui avait fait ses preuves mais qui commençait à montrer ses limites. D'autant plus que les spécificités de chaque univers se traduisent par une variété plus que bienvenue. À noter aussi que chaque personnage débloque un mini open world associé à son univers (un seul par franchise, ainsi le simple fait de posséder Gandalf débloque l'accès complet à la Terre du Milieu). Indépendamment de l'aventure linéaire et malgré leur intérêt relativement limité, ces mondes permettent d'étendre un peu plus la durée de vie du titre en permettant d'explorer à sa guise les versions Lego de ses univers préférés (avec leur lot de quêtes annexes et d'easter eggs savoureux). L'immersion sonore est assurée par les OST cultissimes de la plupart des franchises et un casting vocal cinq étoiles. Outre un Gary Oldman en roue libre en tant que grand méchant, de nombreux acteurs de renom tels que Chris Pratt, Elizabeth Banks, Peter Capaldi, J. K. Simmons ou encore Michael J. Fox et Christopher Lloyd sont venus reprendre leurs personnages.
En s'adressant autant aux enfants qu'aux adultes grâce à son fan service débridé, les interactions hilarantes entres des personnages dont seul le prisme Lego pouvait permettre la rencontre et l'utilisation intelligente de sa composante matérielle, LEGO Dimensions marque l'aboutissement de l'incontournable série vidéoludique Lego et se place en adversaire de poids sur le marché tout récent des jouets vidéo. Machine commerciale bien huilée qui videra sans pitié le compte en banque des plus faibles, Dimensions n'en oublie pas pour autant d'être un vrai jeu qui, à défaut d'être exigeant, fait la part belle à la créativité. Difficile d'imaginer Lego et Warner se priver d'intégrer de nouvelles licences à la fête dans le futur, le support du titre ayant d'ores et déjà été confirmé pour les trois années à venir avec des ajouts réguliers de contenus. À condition évidemment de passer à la caisse...
EDIT : La saison 2 arrive avec un mode Battle Arena permettant de s'affronter à quatre joueurs dans différentes arènes aux règles variées et surtout son lot de nouvelles licences allant de Harry Potter à Adventure Time en passant par l'Agence tous risques et les Gremlins, le tout étant bien évidemment entièrement compatible avec le contenu de la saison 1. Pour une liste complète de tous les personnages qu'il est maintenant possible de faire cohabiter, c'est ici que ça se passe : http://www.senscritique.com/liste/LEGO_Dimensions_l_incroyable_cross_over/1363385