Découverte d'un jeu culte
J'ai joué pour la 1ère fois à Myst avec ce remake. J'ai du me résoudre à utiliser une soluce pour quelques éléments où les feedbacks donnés par le jeu n'étaient pas suffisants
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le 31 août 2021
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Il n’est jamais trop tard pour découvrir les grands classiques du jeu vidéo. Trente ans après sa sortie, je me lance donc sur l’ancêtre des puzzle games narratifs, succès critique resté dix ans meilleure vente PC, ayant donné son nom à tout un genre : Myst. Alors que vaut ce remake, et comment ça vieillit ?
Découvrir Myst en 2020, c’est comme déterrer un vieux trésor d’enfance du grenier de la maison familiale : la magie opère instantanément… mais ça sent quand même un peu la poussière.
La magie opère car il faut bien l’avouer, Myst développe un univers poétique assez unique. Lettre d’amour à l’objet que constitue le livre, c’est littéralement à l’intérieur de ces derniers que le jeu nous plonge. On débarque dans des mondes mystérieux rappelant l’imagerie de Jules Verne, mondes avec leur propre histoire que l’on peut parcourir afin d’y trouver des traces des événements passés. Avec la solitude pour compagne, une musique discrète perçant occasionnellement les sonorités de l’environnement, parcourir les îles de Myst est une expérience teintée d’une certaine mélancolie.
En matière de game design en revanche, le jeu alterne entre le bon et le moins bon. Parmi les qualités, on est surpris de découvrir qu’il est possible de le boucler en quelques minutes seulement pour peu qu’on connaisse la marche à suivre. Un petit rappel que ce qu’on a tous trouvé brillant dans Outer Wilds, le premier jeu du genre l’avait déjà fait il y a longtemps !
Mais de l’eau à couler sous les ponts depuis 1993, autant d’années durant lesquelles les Myst-like se sont multipliés, tous plus passionnants et intelligents les uns que les autres. Et autant le dire, Myst semble parfois bien archaïque à côté. Les frères Miller y ont fait leurs premières armes sans être encore en totale maitrise de leur sujet ; ce qui ajoute parfois une couche de difficulté malvenue à ce premier jet.
Difficile à ce stade de ne pas mentionner le célèbre puzzle de la tour de l’horloge :
Il consiste à actionner des leviers pour faire tourner des roues crantées et chiffrées afin d’afficher le code adéquat. Seulement les roues tournent de concert et il semble que seule une séquence précise dans l’activation des leviers puisse fournir la solution. Sauf que non. Aucune séquence ne vous aidera. La clé de l’énigme c’est de maintenir un levier sans le relâcher pour voir les roues se désynchroniser subitement. Et où trouve-t-on l’info dans le jeu ? Nulle part. Soit vous en avez la curieuse intuition, soit vous le découvrez par hasard en tâtonnant, soit… bah vous bloquez.
Voilà le genre de diableries auxquelles Myst vous confrontera.
Alors ne soyons pas mauvais perdants, la plupart des énigmes sont équitables, plutôt logiques — voire même relativement faciles en réalité — et la plus grosse partie du jeu peut être résolue sans soluce. Mais il suffit de quelques curiosités comme celle-ci pour vous faire tourner en rond de longues heures durant. En fait, la difficulté de Myst ne réside pas tant dans l’aspect réflexif de ses puzzles que dans les éléments un peu gratuits, arbitraires et pas toujours intuitifs qui permettent de les résoudre. Et on manque d’indices concernant ces éléments.
C’est donc un game design d’un autre âge qui vous posera parfois problème. Chercher pendant une heure quel mécanisme permet de débloquer cet ascenseur qui ne répond pas à la commande monter pour réaliser bien plus tard qu’il suffisait de fermer manuellement la porte de l’appareil pour qu’il daigne bouger, c’est le genre de mésaventure qui risque de vous arriver dans un jeu de 1993.
Pour ce qui concerne la partie remake, le jeu a été entièrement redéveloppé sous Unreal Engine pour être compatible avec la VR et les écrans traditionnels. La conséquence la plus notable étant l’upgrade graphique dont bénéficie le jeu ; Myst n’a jamais été aussi beau, ce qui rend véritablement honneur à l’univers déployé par ses créateurs. On ajoute à cela le déplacement libre plutôt que la téléportation image par image de l’original, et on peut pleinement profiter des décors réactualisés grâce aux technologies actuelles. Ce remake ajoute également quelques options appréciables comme un appareil photo nous épargnant la prise de note ou un mode aléatoire qui redéfinit certains codes et éléments de puzzle pour que les connaisseurs puissent s’y remettre sans trop se reposer sur leurs vieux souvenirs.
C’est franchement pas mal, mais le remake n’est hélas pas exempt de défauts.
Parmi les sujets qui fâchent, le jeu a beau afficher une compatibilité manette à la vente, aucun effort n’a été fait quant à son ergonomie, ce qui la rend quasi-obsolète. Selon les puzzles, les touches d’interactions peuvent être L1, R1, X, le stick gauche, le droit, ou le D-pad. Ça dépend des mécanismes, démerdez-vous. Parfois, il faut rester appuyé sur X et faire tourner le stick droit en même temps (hyper confort, essayez !), d’autres fois c’est carrément une interaction qui ne fonctionne pas à la manette… bref, privilégiez clavier/souris et, puisqu’on parle d’ergonomie, pensez bien à basculer en QWERTY avant de lancer.
En second lieu, on mentionnera les traductions textuelles qui s’affichent en Arial sur de grossiers aplats gris surimprimés par-dessus les livres et autres notes du jeu. Cassage d’immersion garanti ! Même constat pour les personnages qui apparaissent brièvement dans le jeu, anciennement des captures vidéo des auteurs jouant la comédie, ici remplacées par des modèles 3D dégueulasses qui jurent méchamment à côté des environnements du remake.
D’une certaine manière, tous les efforts de ce remake semblent avoir été concentrés dans le rendu graphique des décors de Myst. Pour ce qui est de l’ergonomie cependant, ça sent un peu la flemme, au point qu’on se demande si tout a vraiment été testé avant la mise sur le marché.
Malgré des défauts notables en termes d’ergonomie et d’UX, ce remake 2020 de Myst reste sans doute la version à privilégier pour le découvrir trente ans après sa sortie, notamment car elle permet de profiter mieux que jamais de son univers si particulier avec des graphismes remis au gout du jour.
Quant au jeu lui-même, il est encore aujourd’hui une expérience singulière et touchante qui vaut le détour. Mais pensez tout de même à vous armer de patience face à quelques archaïsmes (heureusement pas trop nombreux) qui parsèmeront cette courte aventure et pourraient entamer votre pugnacité.
On attend désormais le futur remake de Riven qui, si l’on en croit l’avis des amateurs, corrige la plupart des soucis de son ainé sans pour autant le dépouiller de son charme.
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Créée
le 19 févr. 2024
Critique lue 148 fois
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