Un jeu qui fout les boules (et c'est vrai)

Toujours développé par la ACE Team, avec toujours les frères Bordeu à la tête du projet (Andrès, Carlos et Edmundo, d'où le ACE), Rock of Ages 3 est un jeu qui, je dirai, m'a conquis, car il m'a brossé dans le sens du poil. Aïe ! Cette remarque semble sonner comme une sorte de baiser de la mort… et c'est le cas. Parce qu'autant j'ai beaucoup apprécié ce Rock of Ages 3, autant je serais tenté de dire qu'en plus de stagner ou de trop peu évolués sur certains points, qu'il finit même par régresser sur d'autres.

Commençons par rappeler les bases, ce qui fait la force de la série : son originalité, son humour, ses cinématiques (mention spéciale à la bête de La Belle et la Bête et à la Fontaine de Marcel Duchamp qui se mettent à nous parler en français), son OST et sa direction artistique. Ça fait déjà de nombreuses qualités, qualités que ce Rock of Ages 3, fort heureusement, a conservé. Après Sisyphe dans le premier épisode et Atlas dans le deuxième, c'est au tour d'Elpénor de venir faire s'écraser d'énormes boulets sur les portes des châteaux ennemis. Forcément, inutile de vous rappeler qui est Elpénor, ce médiocre compagnon d'Ulysse que tout le monde connaît, réputé pour sa mort à cause d'une trop grande consommation d'alcool, ainsi que pour avoir donné son nom au syndrome d'Elpénor (merci Wikipédia).

Pas de grands changements au niveau de la structure du jeu donc : le mode guerre reste (heureusement) le mode le plus mis en avant, on retrouve aussi de la course d'obstacle et des boss. La seule différence avec le 2 au niveau des modes de jeux étant que le contre-la-montre et le skee boulet sont désormais accessibles à partir du mode histoire, alors qu'ils étaient cantonnés au menu dans l'épisode précédent. On retrouve par contre deux nouveaux modes de jeux : le défi d'unités et le Humpty Dumpty. Le premier étant le seul mode de la série dans lequel nous ne contrôlons pas de boulet, mais sommes restreint à la pose d'obstacles et d'unités afin de devoir détruire les boulets ennemis avant qu'ils n'atteignent les portes de notre château. Le second, Humpty Dumpty, est un mode de jeu qui nous fait contrôler le personnage éponyme inventé par Lewis Carroll à travers quelques niveaux solos sur des cartes spécifiquement pour ce mode de jeu là : Humpty Dumpty étant un œuf se brisant facilement, forcément, le but est de challenger le joueur en lui demandant d'aller à l'autre bout du niveau avec un nombre de vies limitées.

Premier hic concernant les modes de jeux : c'est beaucoup trop facile. Même en mode de difficulté difficile, on roule (vous l'avez ?) sur tout le jeu. La faute à une IA maladroite sur la plupart d'entre eux, notamment dans les modes course d'obstacles et défi d'unités, mais surtout inexistante dans le skee boulet, où elle ne gagne que quelques dizaines de points à tout casser. Pour cacher ça, les développeurs ont inclus des défis supplémentaires si on termine les niveaux sous certaines conditions : finir une partie de guerre avec l'état des portes de notre château au-delà des 50 %, atteindre le multiplicateur 5 ou 6 dans le skee boulet, finir premier deux fois d'affilée dans la course d'obstacle ou encore garder l'état des portes de son château au niveau initial dans le défi d'unités. Vous l'avez deviné, ça donne plutôt l'impression que les développeurs ont préférées cacher la poussière sous le tapis plutôt que d'améliorer l'IA, plutôt que de proposer une vraie difficulté. Finalement, reste le contre-la-montre et le Humpty Dumpty, les deux seuls modes qui vous proposeront un minimum (et je dis bien un minimum) de challenge. C'est assez faiblard, surtout qu'il y a une grosse vibe Getting Over It dans le mode Humpty Dumpty : en tous cas, dans sa construction, il y avait clairement moyen de faire des niveaux bien hardcores et bien énervants pour le joueur.

Je veux bien admettre le fait que j'ai déjà terminé Rock of Ages 1 et 2 et que, par conséquent, je « maîtrise » le jeu. Le truc, c'est que je vois mal quelqu'un commencer la saga avec le troisième épisode, et pour tout vous dire, j'aurais du mal à conseiller cet épisode-ci pour un nouveau joueur.

Heureusement, ce Rock of Ages 3 apporte quelques nouveautés. On notera déjà l'arrivée de 8 nouveaux boulets, notamment la meule de fromage que j'apprécie beaucoup (ça va, on contrôle un boulet qui affronte Raspoutine et le dieu pastafariste à travers le temps, vous n'allez quand même pas gueuler pour une meule de fromage en plus ?!), ou encore la boule de neige… j'ose espérer que Rock of Ages 4 inclura la boule quies et la boule de Noël. À noter aussi l'arrivée de 8 nouvelles unités, et surtout l'arrivée de notre fameuse guillotine (Vive la France et notre soft power). Toujours concernant les unités, certaines d'entre elles peuvent désormais être améliorées : les tours peuvent désormais déverser de l'huile sur les boulets adverses et un dragon peut venir protéger notre banque par exemple.

Mais la plus grosse nouveauté de ce Rock of Ages 3 est sans nul doute l'arrivée de l'éditeur de cartes. Là, pour le coup, je vais botter en touche, car ce n'est pas un outil que j'ai l'habitude d'utiliser, et que je n'aime pas utiliser non plus généralement. Mon ressenti : ça demande un certain temps d'adaptation, mais on s'y fait. En tous cas, j'ai réussi à créer ma propre carte, « ultrasurf_meloni.mp4 », accessible grâce à l'ID 3ENHX : une carte qui, je l'espère, reflète bien ma sociopathie et mon état d'esprit. M'enfin, bref, des retours que j'ai pu lire des joueurs, beaucoup ne sont pas satisfaits de cet éditeur de cartes, le trouvant trop limité (et c'est probablement parce qu'il est limité qu'un type limité comme moi a pu faire sa propre carte). Après, si on s'en tient à celles de la communauté, malheureusement, les quelques-unes que j'ai parcouru ne m'ont pas tant satisfaits que ça : on sent que ce sont des cartes de la commu' dans le sens où il manque toujours quelque chose, il y a toujours du vide ou des problèmes de level design. Très franchement, je n'en ai trouvé qu'une ou deux vraiment sympas à faire, et pourtant, j'ai pioché dans les mieux notées et les plus populaires. Ce qui m'amène à apporter une nouvelle critique : j'ai l'impression que l'éditeur a très vite été abandonné par la communauté du jeu. Pour preuve, parmi les cartes les plus populaires, on retrouve essentiellement des cartes conçues pour débloquer les succès le plus rapidement possible. Ça la fout un peu mal. Surtout qu'en plus de ça, il faut noter trois autres défauts : la présence de quelques bogues avec les cartes créées par ce même éditeur de carte (avec des boulets qui peuvent passer à travers le décor ou se voir détruire comme ça sans aucune raison), le fait que l'IA soit tout autant nul à chier sur les cartes créées à partir de l'éditeur que dans le monde skee boulet (c'est-à-dire inexistante). Et enfin, dernier défaut : les cartes de la communauté ont quand même vachement tendance à ramer pour rien.

Ah bah tiens ! Parlons-en de l'optimisation justement. Qu'est-ce que vous avez fait ACE ? Pourquoi ça rame comme ça ? Pourquoi l'écran se fige pendant quelques secondes ? Certes, j'ai encore ma GTX 970 (que je prévois de remplacer cette année ou l'année prochaine comme chaque année depuis 5 ans), mais quand même, vous n'allez pas me faire croire que votre Rock of Ages 3 nécessite une carte graphique dernier cri ? Surtout que, même en baissant les paramètres, ça rame toujours autant à certains endroits.

À ce moment-là, j'ai fait un truc un peu spécial : j'ai retéléchargé puis relancé Rock of Ages 2. Et y rejouer a confirmé mes craintes. Mis à part le hub du mode histoire, que je trouve plus réussi dans le 3 (quand tu te retrouves à parler du hub, c'est que tu sais qu'il n'y a pas grand-chose à sauver), j'ai trouvé ce deuxième épisode mieux en tout : je l'ai trouvé sensiblement plus beau, que ce soit au niveau des graphismes ou de la direction artistique, moins bogué, mieux optimisé, et j'ai même trouvé ses cartes mieux designées… mais le pire, c'est que j'ai remployé exactement la tactique que j'utilisais dans Rock of Ages 3 (et donc que j'avais probablement employé par le passé dans ce même Rock of Ages 2) et ça marche : du premier coup je me suis mis à rouler (désolé, je ne peux pas m'en empêcher) sur les niveaux.

Et c'est là où il y a un truc qui m'emmerde beaucoup avec Rock of Ages 3. Globalement, il régresse légèrement face au 2 et l'ajout le plus intéressant à noter est l'éditeur de cartes… éditeur de cartes qui aurait gagné en intérêt avec une communauté importante derrière… communauté qui, par conséquent, s'est retrouvé dispatché entre Rock of Ages 2 et 3. Si un petit tour sur SteamCharts ou une visite des serveurs permet de se rendre compte qu'il n'y a qu'un ou deux lobbys à tout casser par jeu, ce même SteamCharts m'a permis de constater quelque chose d'un poil déprimant : là où Rock of Ages 2 a réussi à atteindre le pic de 2236 joueurs en simultané sur Steam, l'épisode 3 n'a jamais dépassé les 129. Confirmant définitivement ce que je pensais depuis le début : Rock of Ages 3 n'a pas réussi à fédérer. Il est certes une suite amusante, qui reprend la plupart des qualités de son aîné, mais qui en aucun cas n'arrive à évoluer, en tous cas comme le 2 avait pu évoluer par rapport à son aîné.

Ai-je vraiment besoin de vous rappeler que je vous recommande davantage ce même épisode 2 que le jeu dont il est question ici ? Par contre, j'insiste, jouez-y ! Rock of Ages c'est très sympa, et autant le 2 est loin d'être parfait, autant ça reste un indispensable pour les raisons déjà évoquées plus haut : c'est drôle, original, les cinématiques sont à mourir de rire, il y a une direction artistique forte et les réorchestrations sont très bonnes. Ce serait dommage de passer à côté de cette saga. Dommage que le 3 n'ait pas tant évolué que ça.

De toute façon, l'évolution ne nous a-t-elle pas appris que deux boules, c'était déjà amplement suffisant ?