Sakuna. Que dire de toi? Tu m'avais très longuement intéressé lorsque tu t'étais révélé en 2018 avant ta sortie en 2020. On s'est perdu de vue toi et moi. Pourtant, tes premières images, elles datent de 2016. Il faut dire que le studio Edelweiss qui portait ce jeu et qui était coutumier de réaliser des productions à la chaine, allait devoir prendre prendre son temps pour réaliser un jeu aussi ambitieux que Sakuna ! Parce que mon dieu, que le jeu est ambitieux !! Et si on met de côté tout ce qui est marketing et voice acting, ce sont environ 20 personnes qui auront travaillé sur le jeu. Le réalisateur du jeu, Nal étant par exemple également au Game Design, à la programmation, au VFX, au Sound Design et à l'UI Design !
Et quand on voit la qualité du jeu, sa proposition, sa sincérité, on ne peut qu'applaudir. On se retrouve effectivement devant un jeu qui voulait se raconter. Un jeu que les développeurs voulaient faire et qu'ils voulaient bien faire. Et tout cela nous amène à raconter l'histoire de Sakuna, déesse de la fertilité qui se retrouve puni, banni du royaume des dieux et envoyer sur l'île des démons afin d'y accomplir le même devoir que sa mère et ainsi aider une "famille" humaine à bien vivre. Le postulat de départ est on ne peut plus simple et justifie les deux principales branches de gameplay qui vont alterner : la gestion de sa ferme et le côté combat.
On va rapidement passer sur le système de combat, s'inspirant dans les grandes lignes, et selon Nal, de Devil May Cry. Les plus attentifs auront sans doute dans le collimateur le fameux Muramasa qui sévissait sur Wii et PS Vita. On se retrouve avec différents coups, des parades, des attaques magiques et pour plus de légèreté, une écharpe qui fera office de grappin permettant de gérer verticalement les combats. Le jeu offre une grande variété de combos à débloquer au fur et à mesure de l'aventure, d'une plutôt grande variété même, bien que le joueur sera bien paresseux de n'en essayer que quelques uns. Si au premier abord, le jeu peut paraitre répétitif pour un joueur vraiment mauvais dans l'exercice (genre moi), il se dégage de Sakuna une certaine profondeur et un vrai bon joueur (donc pas moi) saura apprécier ce système de combat simple mais plus complexe qu'il n'y parait.
Cela dit, le jeu évite l'écueil des arènes ou des longs couloirs à la Odin's Sphere vraiment imbuvable. La plupart des zones de jeux sont restreintes en terme de tailles donc courtes à parcourir. Et quand celles-ci sont vraiment imposantes, le jeu à la politesse de mettre en place des points de passages sous la forme de Torii pour éviter de tout se retaper. Un choix vraiment bienvenue selon moi qui évite une grande frustration, qui aurait été un vrai défaut avec son rythme circadien (j'y reviens vite). Un choix cohérent avec le système de progression du jeu qui demande de remplir divers objectifs pour déverrouiller des nouvelles zones. Parfois, cela consistera à sécuriser une ligne, traverser un niveau et parfois, ce seront des objectifs plus flous comme rentrer dans un niveau avec un objet particulier. On pourrait craindre qu'avec ce système, la progression soit un peu pénible mais l'obtention de ses objectifs est généralement peu contraignant, nécessitant parfois un aller retour pour obtenir ces précieux points. De plus, il n'est pas nécessaire de tous les finir pour accéder à la fin du jeu ni même de finir le niveau en cours.
Cette plasticité se retrouve dans les différents lieux. Vous serez amené à partir à la découverte d'une forêt luxuriante ou d'un ensemble de cascades possédant leur propre règles et leur propre terrain. Certaines zones favorisant l'horizontalité, d'autres jouant davantage sur un profil verticale. Il est très très rares de voir les endroits se ressembler. On a réellement l'impression de parcourir des zones réellement différentes même si, même si, le bestiaire manque un peu de variété. Les zones changent en fonction de la régions mais aussi de la saison et c'est ainsi qu'un filet de neige va couvrir votre exploration en hiver et que des feuilles mortes se trouveront à vos pieds.
Plus que des choix esthétiques, les saisons sont également responsables de plusieurs changements. Si certains sont mineurs comme les objets que vous pourriez trouver dans les zones ou l'octroi de divers bonus à Sakuna, le principal donne la caractéristique principal du jeu : la cueillette de Riz. En effet, en tant que déesse, c'est à vous de vous assurer de la bonne récolte. Et pour être sûr que vous ne preniez pas ça à la légère, les développeurs ont eu la formidable idée de lier votre progression à celle de votre récolte. Pour faire simple, plus votre riz est de qualité, plus le niveau de votre personnage sera élevé. Mais avant de récolter les grains de votre gloire, il va falloir retourner la terre, planter vos grains, faire attention à tout ce qui pourrait parasiter votre récolte et prendre le soin de broyer consciemment. Le jeu procède alors par étape, et par saison, pour être sûr que vous internalisiez l'intégralité du processus qui se verra simplifier plus vous le pratiquerez.
Si au départ, vous planterez grain par grain votre riz, vous les planteraient par deux, par quatre puis en grappe au fur et à mesure de votre aventure. Comme le cycle des saisons est court ( 3x4 jours), le jeu arrive à tenir un rythme engageant et la progression que vous intégrez est plus ou moins continue ce qui rend les choses encore plus appréciables. Dans son extrême, le jeu propose, moyennant une moins bonne qualité de la récolte, de laisser le contrôle à l'intelligence artificielle représenté par le groupe d'humain que vous devez protéger sur l'île des démons. Un ensemble de personnages que vous apprendrez à connaitre au fur et à mesure du temps, certains avec un passé plus ou moins tragique.
La situation de départ raconte l'histoire d'un ancien samouraï, d'une femme venant d'un pays lointain, de deux enfants (une fille et un garçon) et un très jeune enfant arrivant au royaume des dieux, ayant tout perdu. Leur salut vient donc d'une infiltration dans le palais impérial sous la coiffe de Sakuna qui va se retrouver responsable de l'explosion de la réserve de riz des kamis. Ce qui entrainera son excommunions. Un autre personnage du nom d'Ashigame, ayant connu les parents de Sakuna, fera aussi parti du caste mais il sera bien plus effacé. D'une certaine manière, certains personnages sont finalement assez peu développé tandis que d'autres reposent de manière assez maligne sur l'appui de la mythologie japonaise.
Et même si le jeu se permet d'illustrer certains passages en cinématiques, il a la formidable idée (encore une fois) de sacraliser le repas du soir qui, à de très nombreuses reprises, deviendra un lieu d'échange entre les différents protagonistes. Manger aura qui plus est un rôle important puisque cela vous octroiera des bonus pour la partie combat illustrer plus tôt. L'ensemble boucle formidablement bien et boucle encore mieux quand on apprend que les ressources que l'on récupèrent dans le jeu sont pour certaines périssables et qu'une cuisson de ces derniers permet de relever leur date limite de consommation. Mon dieu mais encore une excellente idée !!
Le jeune forgeron et la jeune tisseuse vous fourniront nouvelles armes et vêtements qui seront gratifiés de divers bonus si vous vous montrez plutôt curieux dans votre exploration ou si vous êtes assidus à votre plantation. L'un des tours de forces du jeu aura été de rendre les deux parties du jeu connectés et même interconnectés de manière à justifier l'une puis l'autre. La météo jouera également son rôle inondant ou asséchant votre plantation et c'est un paramètre qu'il faudra prendre en compte dans certaines parties du processus de cultivation. À prendre en compte également le cycle jour/nuit qui aura pour influence de rendre les lieux plus sombres et les ennemis démons plus puissants.
Le jeu n'est pas avare en explication toutefois pour vous aider au mieux dans votre quête par l'intermédiaire de parchemins qui renverront bien évidement au formidable Okami. Vous y trouverez par exemple des recettes de cuisines ou des explications sur les différents fléaux pouvant toucher votre plantation mais aussi comment y faire tel type de riz. Ce qui augmentera plus ou moins certaines statistiques en fonctions de vos choix. On regrettera toutefois l'absence d'un compendium permettant de retrouver certains produits qui ne peuvent être obtenus que sous certaines conditions spécifiques comme illustrer précédemment.
Ce jeu est donc rempli de petites idées qui deviennent grandes misent ensemble et si je dois adresser une principale critique à l'ensemble, ce serait de donner plus de budget à l'équipe !
En effet, je pense que bons nombres de soucis auraient pu être atténué par ce biais. En plus du bestiaire restreint, j'ai constaté quelques soucis de jouabilité avec des imputs qui ne partaient pas, je ne suis pas très convaincu par le système de compétences spéciales qui venait à se déclencher quand ça lui chantait, certains bugs et certaines transitions pas très très jolies entre les plans et la dernière partie tombe dans le syndrome Metroid Prime avec lieux et boss répétés malgré une très bonne idée derrière encore une fois. Il est aussi dommage que l'apparence physique des personnages ne changent pas au fur et à mesure du temps (notamment pour les enfants) mais là encore, je pense que le budget était trop restreint pour ça. Et ce sera tout ce qui, pour être honnête, est un bilan très très positif.
Il voulait en vendre 30 000 exemplaires, ils en ont vendu plus d'un million. Et c'est un succès mérité pour Edelweiss qui nous sort un jeu malin, d'une très très grande générosité, très bien réalisé, avec une belle identité aussi bien visuelle que sonore (avec un thème final magnifique). On pourra reprocher quelques points au jeu mais cessons les palabres : Sakuna est un jeu vraiment excellent, cultivant des bases solides et augure d'une suite (teasé dans le jeu et dans des interviews) plus que prometteuse sur le papier. Il est en tout cas un jeu qui mérite que l'on s'y attarde et j'espère que cette note vous en conviendra. Il faut laisser maintenant à Edelweiss le soin de réaliser son prochain titre, qui, s'il poursuit sur cette lancée, pourrait constituer une fantastique surprise.