Vous êtes un poulpe. Vous crachez de l'encre. Vous êtes mignon tout plein. Et vous allez salement CREVER !
Voilà. Save me Mr Tako est sans problème l'un des jeux les plus durs auquel j'ai joué (en difficulté normale, celle que le jeu lui-même m'a gentiment recommandé). Et au vu des critiques lues à droite et à gauche, je pense que peu de gens sont arrivés au bout. Et j'ai vraiment besoin d'exorciser tout ça :p.
Bon. Il s'agit donc d'un jeu de plate-forme que l'on pourrait qualifier de Kirby-like, et dans un pur style gameboy. Une touche pour sauter, une touche pour cracher de l'encre, des power-ups sous la forme de chapeaux, et une succession de niveaux avec de temps en temps un boss. Au nombre de 50, certains chapeaux vous confèrent des capacités spéciales essentielles à la progression (sauter plus haut, tirer des flèches, etc...), tandis que d'autres sont purement cosmétiques. Un premier point frustrant est que l'on ne peut changer de chapeau qu'à des endroits précis, soit au checkpoint d'un niveau, soit chez un marchand. Il aurait été intéressant de pouvoir les obtenir par exemple en battant certains ennemis, ça aurait d'autant plus diversifié un peu le level design. En pratique, on est la plupart du temps sans aucun chapeau et on se contente de l'encre de base, qui reste parfait pour immobiliser les ennemis et les transformer en plate-forme.
Si le début du jeu est plutôt cool et attrayant, les choses se gâtent à partir du deuxième tiers du jeu. Le deuxième acte commence en effet avec un vrai cran de difficulté supplémentaire, même si il n'y a rien d'insurmontable. Mais c'est à ce moment-là que le level design commence à s'essouffler et qu'un certain aspect die and retry s'installe tranquillement. Les niveaux contiennent de plus en plus de pièges et de passages délicats. Un conseil d'ailleurs à ceux qui veulent tenter l'aventure : vous pouvez faire descendre la caméra en laissant appuyer sur la flèche du bas ! Dommage qu'il n'y pas l'équivalent vers le haut… De manière générale, le jeu va finir par vous faire apprendre la patience.
Car si il est bien un élément que j'ai omis de mentionner, c'est qu'il n'y a pas de barre de vie. Si vous avez un chapeau, vous pouvez généralement prendre un dégât, mais comme il n'y a pas de frame d'invulnérabilité, la plupart du temps, c'est la mort instantanée au moindre coup. Après une mort, vous retournez au dernier checkpoint ou à la dernière porte franchie. En mode normal, vous avez au maximum 10 vies, et une fois épuisées, c'est le retour à la sélection de niveaux. Et très franchement, les troisièmes et quatrièmes actes m'ont rendu dingues. Certains niveaux sont vraiment très longs, voire labyrinthiques, et il faut les apprendre par cœur pour espérer en voir le bout, en plus de ramasser toutes les vies possibles. Les 6 derniers niveaux sont un best-of de tous les pièges les plus vicieux du jeu, et m'ont tenu à eux seuls, en plus du boss de fin, plus de 8h de jeu.
Et c'est vraiment dommage je pense d'avoir mis une aussi grande difficulté, car le reste est de qualité. L'aspect gameboy est magnifique, les musiques sont cools, les protagonistes sont attachants et l'histoire est étonnamment mature et prenante. Il y a de plus une blinde de quêtes annexes et de secrets à trouver, et autant de références plus ou moins subtiles aux grands classiques (Zelda II, Metroid…) et aux collègues indés (Shovel Knight entre autres). Quand on sait que le jeu a été développé par une seule personne, ça reste impressionnant.
Bref, j'aimerais pouvoir vous conseiller Save me Mr Tako, mais il est clair qu'en difficulté normale, le level design qui ne se renouvelle pas beaucoup et les paliers sidérant de difficulté en feront abandonner plus d'un. Par contre, ceux que ça ne rebute pas seront éventuellement conquis, et en auront pour leur argent (j'ai mis 22h pour finir le jeu avec 85% de progression). Et j'ai peur qu'en difficulté facile, le jeu le soit un peu trop (et du coup bien plus ennuyeux), mais je ne sais pas exactement ce que ça change. Si vous aimez Dark Souls, l'injustice, et les poulpes, foncez.
[EDIT AVRIL 2021]
Suite à quelques démêlés avec l'éditeur, le jeu avait été retiré des e-shops à un certain moment (pour ma part, je l'avais dans ma bibliothèque depuis un bon moment). Le jeu n'avait d'ailleurs jamais pu être mis à jour à cause de ces soucis.
Mais le développeur va finalement ressortir le jeu en tant que "Definitive Edition", cette fois-ci en auto-édition. D'après son long post sur Patreon (que vous pouvez lire ici), la plupart des défauts que j'ai évoqué semblent avoir été corrigés (et même ceux que je n'avais pas mentionné :p). En vrac : une meilleure gestion de la caméra (on pourra maintenant regarder en haut !) ; un système de changement de chapeaux plus clair ; un level design moins punitif ; un mode de difficulté plus facile avec des points de vie (le mode "Classic" est conservé pour ceux qui voudraient l'expérience originale) ; la possibilité de changer de difficulté au cours du jeu ; un système ingénieux in-game permettant de se rappeler de notre progression au niveau des quêtes annexes ; et d'autres détails appréciables comme l'ajout d'une flèche aux boîtes de dialogues pour savoir quel personnage parle.
Bref, ces corrections et ajouts vont je pense dans le bon sens pour ceux qui n'ont pas déjà joué au jeu, ce dernier devenant bien plus accessible à tous les profils de joueurs. Pour ceux qui ont déjà joué à la version de base, moi y compris, difficile de dire si le rachat vaut le coup (car malheureusement obligé de racheter le jeu plein pot, hors période de soldes), mais je me laisserais éventuellement tenté, ne serait-ce que pour finir les quelques quêtes annexes qui me manquaient...