Comme c'est le cas pour beaucoup de joueurs, Secret of Mana reste pour moi une des références de la Super Nintendo. Le jeu était vendu avec un guide complet et en couleurs de 72 pages, et c'est probablement à cause de lui qu'est née ma collectionnite des guides officiels. J'ai passé des dizaines et des dizaines d'heures à jouer avec un ami (je faisais l'homme, il faisait l'elfe, et personne ne faisait la femme), à monter toutes les armes et toutes les magies au niveau 8. Le monde de Mana recelait de nombreux secrets et malgré la linéarité de l'aventure, on avait vraiment l'impression d'explorer mille et une contrées inconnues. Voyager par-delà les océans sur le dos de Flammy grâce au mode 7 était déjà un plaisir en soi.
Evidemment, on retrouve les lieux communs du genre, que ce soit dans l'histoire (la quête initiatique de l'orphelin chaperonné par un chevalier) ou dans les pays traversés (le monde de glace, le désert de sable, la forêt sombre, le château hanté). Secret of Mana n'hésite cependant pas à inclure quelques clins d'oeil originaux : la rencontre avec Socrate, la ville dorée du roi Midas ou encore le village du Père Noël. L'aventure part dans tous les sens et utilise un grand nombre de références issues d'horizons très différents les uns des autres, mais le jeu parvient sans problème à unir tout cela.
Une quinzaine d'années plus tard, qu'en reste-t-il ? Secret of Mana n'a pas perdu de son charme : les graphismes colorés et leur souci du détail, les orchestrations d'Hiroki Kikuta, le gameplay vif quoiqu'un peu saccadé, les magies et les esprits aussi marquants que les invocations d'un Final Fantasy. La cosmogonie animiste écolo-élémentaire du jeu, composée d'Ondine, Gnome, Sylphide, Athanor, Lumina, Ombre (mon esprit préféré), Luna et Dryade, m'avait à l'époque fortement marqué. Tout semble intact, bien que poussiéreux.
Evidemment, aujourd'hui, on peut trouver ça un peu lourd de devoir bloquer l'action et passer par des menus pour lancer des magies, surtout quand on sait que l'on est souvent amené à les utiliser dans Secret of Mana. Et puis, quand même, le jeu, qui était déjà drôlement facile à l'époque (sauf peut-être le combat contre Tigror, le troisième boss, que l'on trouve dans le château de Sorcia), est devenu pour les joueurs de maintenant une véritable petite promenade de santé.
C'est toujours aussi agréable de le refaire, mais est-ce agréable pour un joueur de 2009 de le faire pour la première fois ? Ami lecteur, je ne peux pas répondre, mais peut-être que toi, tu peux. Ma seule vraie déception, qui est cependant de taille, c'est bien la traduction française. Une véritable catastrophe qui parvient presque à démantibuler le scénario qui n'a pourtant rien de très compliqué. Tout peut se résumer par le rire de Thanatos, un des premiers opposants au héros et ses deux compagnons : "Hihihi !" J'en frémis encore.
Des dialogues décousus, des pronoms féminins pour des personnages masculins et hétérosexuels, des mots d'une pauvreté et d'une platitude sinistre. Avec le recul, on se rend compte à quel point le jeu vidéo n'était pas pris au sérieux à l'époque, et l'on se demande si Google Trad n'était pas déjà à l'oeuvre.
A part Seiken Densetsu 3, les nombreux enfants de la famille Mana ne parviennent pas à frôler l'aura mythique de leur illustre ancêtre et ont perdu de leur magie. En attendant un nouvel épisode que l'on espère plus inspiré que les Children, les Dawn et les Heroes of Mana, on peut toujours ressortir sa SNES ou télécharger Secret of Mana sur la Console Virtuelle. Et croisons les doigts : peut-être y verrons-nous un jour Seiken Densetsu 3.