Sorti au cours de l'été 2007 "The Darkness" était une bonne surprise grâce à son ambiance unique, mélangeant mafia et horreur, et à son approche lancinante du FPS. Presque 4 ans et un changement de développeur plus tard (on troque en effet les suédois de Starbeeze pour les canadiens de Digital Extremes) Jackie Estocado revient pour agiter ses gros tentacules dans les petits recoins sombres.
Les bases restent les mêmes : on dirige Jackie à la première personne et on alterne entre les armes à feu et les pouvoirs offerts par le Darkness pour se débarrasser de la vermine. Mais l'orientation du gameplay mise beaucoup plus sur l'action qu'auparavant. En effet les phases d'explorations et de discussion sont réduite à leur portion congrue. On oublie donc les balades dans les rues et les flâneries au milieu des passants. Ici on parle à 4/5 mafieux sans intérêt dans un penthouse confiné. Ca sera peut-être un soulagement pour certain mais l'équilibre entre les bains de sang et les passages presque contemplatifs jouait beaucoup dans le charme du premier titre.
On jette à la poubelle toute tentative d'approche furtive ou un peu sournoise. Tout au plus incarnera t'on le Darkling lors de passages dirigistes et anecdotiques. Dans "The Darkness II" on fonce dans le tas et nos deux tentacules s'utilisent dans le feu de l'action.
Chaque tentacule est attribué à une touche. Le gauche sert à agripper des objets en tout genre (tuyau, pneu, inénarrable bidon rouge, pale de ventilateur,etc...) pour les envoyer sur nos adversaires. Il sert aussi à attraper lesdits adversaires une fois ceux-ci affaiblis (généralement avec une bonne rafale de plomb dans le bide) pour procéder à des exécutions pour le moins spectaculaires. Selon le bouton utilisé lors de l'exécution on bénéficiera d'un bouclier temporaire, d'un bonus de santé, d'un bonus de munitions ou d'un bonus pour la recharge de capacités spéciales. Des bénéfices qui encouragent à user et abuser de ces exécutions.
Le tentacule droit, quant à lui, sert à frapper les obstacles et les malandrins qui se dressent sur notre passage. Simple. Efficace.
La nervosité des fusillades est aussi appuyée par la violence paroxystique du jeu. Le moindre impact de balle occasionnera de gigantesques gerbes de sang, et nos tentacules tranchent, littéralement, dans le vif. Les bras volent, les têtes explosent, les tripes giclent, les viscères s'éparpillent. Les exécutions participent aussi beaucoup à ce déluge d'hémoglobine, les développeurs déploient des trésors d'imagination sadique. Ce n'est en effet pas tous les jours qu'un jeu nous offre la possibilité d'extraire la colonne vertébrale d'un homme par son anus. Oui oui, vous avez bien lu, c'est fou ce qu'on peut s'amuser avec un anus et un peu d'imagination.
Cependant le jeu semble un peu piégé entre son héritage et sa nouvelle orientation. En effet le gameplay s'oriente vers l'action mais la maniabilité a conservée une importante lenteur. Même avec la sensibilité réglée à fond on a la sensation pénible de diriger un char d'assaut. Certaines situations occasionnent ainsi une bonne dose de frustration face à cette inertie inexplicable. Le décalage entre la mollesse perçue manette en main et le déluge d'effets affiché à l'écran se révèle parfois pénible.
Les ennemis arrivent par vague et ils montent au feu pour offrir des gunfights nerveux. Nerveux à défaut d'être particulièrement mémorables, à cause de ce gameplay mou, à cause d'un level design quelconque et à cause d'une facilité déconcertante, même en difficulté maximale. La surenchère de gore apparaît donc comme un moyen de camoufler toutes ces petites lacunes agaçantes, le fait est qu'on se marre bien à démembrer du sbire à la chaîne. Mais le fait est, aussi, que l'on termine "The Darkness II" très vite et ce n'est pas le ridicule mode Vendetta qui prolongera l'expérience de façon pertinente.
S'il se révèle être un FPS gore assez basique et bancale dans son gameplay le jeu de Digital Extremes se sauve avec son univers.
Son univers visuel tout d'abord avec une direction artistique en Cell-Shading très stylisée. D'abord déroutant ce choix se révèle tout à fait agréable. Nous rappelant ainsi les racines Comic Book de The Darkness cette orientation esthétique offre de jolis décors et de jolies ambiances. On regrettera simplement que certains personnages, dont Jackie, soient aussi ridicules.
Et puis il y a son univers narratif. Le scénario de "The Darkness II" est assez simple et prévisible (le twist de fin est cramée à des kilomètres) mais il nous est raconté de façon suffisamment habile pour rester prenant. On navigue ainsi entre deux univers antinomiques qui se répondent, tout le long du jeu le joueur est ballotté de l'un à l'autre et cette astuce confère à Jackie une vraie profondeur, le rendant ainsi attachant malgré son charisme de pacotille. Rêve ou réalité ? Vrai ou faux ? Darkness ou Jackie ?
Rien de renversant mais ça fonctionne plutôt bien.
A l'heure où les FPS génériques et décérébrés inondent les rayons, ce genre d'effort apporte une fraîcheur bienvenue. Moins fin, moins subtil, moins agréable que son aîné, "The Darkness II" tire son épingle du jeu avec son univers original et intéressant. Une atmosphère unique au service d'un jeu que l'on prend plaisir à parcourir malgré quelques frustrations. Un plaisir aussi réel que fugace et passager. Malgré toute sa bonne volonté "The Darkness II" ne dépasse jamais son statut de "petit jeu sympa". Mais ce n'est peut-être pas si mal que ça, être sympa...