The Silver Case 2425
5.6
The Silver Case 2425

Compilation de Nippon Ichi Software et Grasshopper Manufacture (2018Nintendo Switch)

Bundle comprenant deux visual novel adventure games du célèbre auteur japonais Suda51 (No More Heroes, Killer 7...), The Silver Case 2425 vous plonge dans une ambiance policière sordide pétrie du style années 2000. Avec des dialogues à profusion, une jouabilité sommaire et des enchevêtrements narratifs à foison, ce portage vaut-il la peine de plonger plus de vingt ans en arrière dans l'univers vidéoludique de l'enquête novellisée ? La hype qui semble se dégager du titre et de son auteur est-elle justifiée ? L'esprit torturé des personnages va-t-il progressivement contaminer le vôtre ? Pour le savoir, appuyez sur le bouton A.



L'histoire



Dans le premier opus sorti en 1999 (The Silver Case), vous incarnez un jeune flic dont la première mission tourne mal. Seul survivant de votre escouade, le choc que vous avez subi vous plonge dans un mutisme absolu. L'impact sur l'histoire est fort : vous participez de loin aux échanges entre vos collègues, qui vous trimbalent de scène de crime en salle de réunion, pour vous envoyer ensuite en première ligne et vous guider par radio sans jamais se soucier de ce que vous pouvez exprimer. Les cas s'enchaînent autour d'un mystérieux tueur en série, véritable légende du commissariat ayant sévi deux décennies auparavant, tandis que vos collègues forment une unité d'élite capable de traquer ce genre de personnage. Les enquêtes sont cependant déroutantes par le raisonnement et leurs rebondissements typiques des jeux qui s'appuient sur un scénario à trous, avec une post-rationalisation presque magique sur la base d'un détail qui, évidemment, arrive en bout de course. Le second opus (The 25th Ward : The Silver Case) sorti en épisodes en 2005, poursuit l'histoire initiée, avec toujours le même tueur au centre des enquêtes. Il entérine les poncifs du genre avec des dialogues de comptoir, à base de réflexions sur la mort, la vie ("kill the life"), le passé qui sera toujours le passé, le tout sans corriger les faiblesses de son grand frère en termes de rythme. Les enquêtes policières peuvent dans le fond susciter un certain intérêt, mais leur découpage et les trames parallèles les rendent particulièrement difficiles à suivre.


L'ambiance de The Silver Case 2425 témoigne d'un improbable mix de différents styles : des vue 3D pour les transitions et l'exploration de lieux, des personnages détaillés en illustration dans certains dialogues, ou griffonnés au crayon dans d'autres, des mots-clés technologiques en incessante permutation en fond d'écran, des effets laser stroboscopiques à chaque prise de parole d'un personnage... le tout au sein d'une même séquence. Comme si l'équipe avait voulu panacher tous les styles qu'elle trouvait cool, dans le but de créer un ensemble encore plus cool. Le résultat est plutôt une formidable expression du kitsch, globalement indigeste, et rassemble un superbe éventail de clichés graphiques et sonores. Accompagner tout texte qui s'affiche d'un bruit de machine à écrire : l'exemple parfait de la fausse bonne idée, détail agaçant à la longue qui finit par ridiculiser une ambiance qui se veut grave.



Le principe



Le titre alterne scènes de dialogue auxquelles vous assistez passivement et séquences d'exploration cadrée en vue subjective. Dans ces phases, vous vous déplacez de case en case en suivant les directions disponibles. Des énigmes vous ouvrent des portes, des objets sont à ramasser, le tout faisant avancer l'histoire et déclencher des transitions parfois involontaires. Par exemple, tant que vous n'avez pas asséché toutes les répliques d'un personnage, vous ne pourrez pas vous déplacer d'un pas. Sur ce principe, le jeu assume son aspect déroutant. Dès les premières minutes, l'un des personnages s'adresse à vous et s'excuse, deux fois de suite, pour les contrôles alambiqués. « C'est un peu compliqué, mais tu vas finir par y arriver » vous dit-il. Eh ben mon gars, tu ne crois pas si bien dire. Une mollette d'action vous permet de choisir entre votre inventaire, les mouvements, les interactions et le menu principal (pourquoi pas) ; tout cela avec un seul bouton évidemment, au lieu de les répartir sur la manette. Une fois dans le mode de déplacement, un raccourci autorise à déclencher des actions. À un bouton (ou raccourci) près vous aviez également à disposition l'inventaire, dommage. Dans le second opus, cette mollette laisse place à un tétraèdre en 3D qui apporte une confusion absolument dispensable à la navigation, notamment dans les phases de dialogue où il vous faudra systématiquement rouvrir le tétraèdre pour relancer votre interlocuteur. Une lourdeur dont vous vous passeriez bien.


The Silver Case 2425 s'appuie sur un minimum d'interactions, recouvertes d'attributs graphiques destinés à faire illusion. La majeure partie du temps de jeu du premier opus est consacrée à lire les dialogues des personnages, le vôtre étant muet, rappelez-vous. C'est donc de manière complètement passive que vous assistez à des conversations qui se résument parfois à des points de suspensions échangés entre deux protagonistes, suivis de « Oui ? » puis d'un « Quoi ? » et d'un « Rien ». Certes, ces moments de creux aident à construire le profil des personnages. Mais la nuance entre abus et profil semble fine. Et gare à vous si vous décrochez, car évidemment les dialogues permettent de faire avancer la réflexion sur le cas étudié. Des bribes d'indices sont à déceler dans ces échanges inondés d'informations non essentielles et si vous les loupez, tant pis pour vous. Aucun choix ne vous est demandé, aucune piste n'est explorée à votre initiative. Par ailleurs, tant que vous n'avez pas épuisé tous les dialogues sans pouvoir les enchaîner, une action de "voir" un indice pourtant sous vos yeux ne se déclenchera pas. Et à l'exact opposé du rythme extrêmement lent de ces échanges et investigations, l'écran vous bombarde d'animations sur les dialogues, pour pallier une interface des plus pauvres incapable de vous faire distinguer sans cela clairement qui prend la parole.



En conclusion



Pourquoi s'infliger des contrôles inaboutis, des dialogues interminables, une trame alambiquée, le tout dans une interface qui ferait pâlir d'envie les néons de Las Vegas ? The Silver Case 2425 regroupe deux titres qui ont connu un succès vraisemblablement grandissant au fil des rééditions, pour s'échouer sur Switch sans prendre la peine d'améliorer quelques basiques de prise en main. S'il est possible de surpasser le manque d'ergonomie des contrôles, restent les scénarios diablement riches, bourrés d'histoires et de personnages destinés à parasiter votre attention, et surtout segmentés de manière à créer des trous dans la compréhension générale. Le découragement vous gagne plus vite que prévu, rendant l'expérience particulièrement pénible, très loin de ce qu'un visual novel peut a minima proposer de manière décente et respectueuse à ses joueurs.


Test intégral écrit et publié sur Gamatomic.com

gaetan
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le 22 juil. 2021

Critique lue 131 fois

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