Marathomb Raider : 5/16
Quand on met le doigt dans un engrenage, généralement la main suit. Les équipes de Core Design l’ont appris à leurs dépends puisqu’après le succès de Tomb Raider 2 (qui s’est encore mieux vendu que le premier), Eidos leur demande immédiatement une suite pour Noël prochain. Nos braves pisseurs de code ont donc travaillé d’arrache-pied (et probablement consommé de multiples substances plus ou moins légales histoire de tenir le coup) pour sortir Tomb Raider 3 dans les délais, exactement 12 mois plus tard.
Deux anecdotes personnelles cette fois-ci : le premier niveau du jeu commence juste devant une pente glissante dans une jungle, avec des pics cachés et un tronc d’arbre suspendu. J’ai tout de suite reconnu la zone où je jouais quand j’étais gosse ! L’un des objectifs de mon Marathomb était de déterminer à quel TR j’avais joué sur la PS1 de mon frangin, je peux donc affirmer avec certitude que c’était cet épisode 3 qui tournait en boucle dans sa console. Et au cas où vous vous le demandiez, non je n’ai jamais dépassé les premiers mètres du jeu, après la glissade je me faisais bouffer par les tigres ou par les sables mouvants.
Seconde anecdote : ce jeu a été désigné par Picsou Magazine (dans leur numéro de novembre ou décembre 1998) comme un gros tas de bugs quasi-injouable, je me rappelle que ça m’avait marqué. Si même un magazine pour gosses très indulgent en temps normal le considère ainsi, je ne cache pas que j’avais un peu d’appréhension au moment de cliquer sur l'icône de lancement du jeu. Bon, après ils ont aussi dit qu’Ecrémeuh était un nouveau Pokémon introduit dans la version Emeraude, donc leurs analyses ne sont pas toujours très correctes.
Commençons tout de suite par notre traditionnelle rubrique : "Comment Square Enix a fait pour foirer le portage Steam du jeu ?". Eh bien c’est très simple, après un Tomb Raider 2 à l’image dégueulasse, la suite logique était de faire un Tomb Raider 3 sans son. Oui, en-dehors des cinématiques en CGI, il n’y a ni musique ni bruitages dans ce jeu. C’est un bug qui a été reporté en 2012 (si ce n’est plus tôt) et qui n’a jamais été patché en 10 ans, bravo les gars !
Heureusement, le problème se résout assez facilement, mais osez me dire que ce n’est pas du foutage de gueule.
Ah, et si vous vous posiez la question, comme pour les précédents jeux TR3 a eu droit à son extension, The Lost Artifact, mais visiblement personne n’a pris la peine d’en faire un mod pour la version Steam (il semble y avoir des moyens détournés d’y accéder, mais j’ai la flemme de trifouiller mes fichiers je vous avoue). Je me contenterai donc de tester la version vanilla pour le moment.
Ces petits désagréments Squarenixesques passés, on est plongé dans la nouvelle aventure de Miss Croft. Une aventure assez originale puisque, passé le premier pays (l’Inde), on peut choisir l’ordre dans lequel explorer les trois lieux suivants (Londres, le Pacifique et le Nevada). Ca donne au jeu un petit aspect Mega Man qui n’est pas pour me déplaire, même si malheureusement on ne peut pas suspendre l’exploration d’un pays en cours pour basculer sur un autre à notre guise. C’est parfaitement justifié scénaristiquement parlant, tu ne vas pas interrompre l’exploration de la Zone 51 pour aller visiter un musée londonien, mais c’est dommage de devoir se taper les 4 niveaux grisonnants de Londres à la suite par exemple, on pourrait les entrecouper avec des niveaux dans le Pacifique pour respirer un peu.
Détail amusant : Lara explore donc l’Inde et Londres dans ce jeu, ce sont deux lieux qu’elle visitait déjà dans TR1, mais seulement dans des cinématiques.
Une fois les 3 lieux pillés en bonne et due forme (et un alarmant nombre de cadavres laissé derrière nous), on accède au cinquième et dernier pays, l’Antarctique. Et Lara finit l'aventure en tuant de sang froid un pilote d'hélicoptère désarmé, mais à part ça elle n'est pas du tout psychopathe.
Si on a trouvé tous les secrets du jeu, on accède à un (court) niveau supplémentaire, situé à Londres. J’avais déjà vu ce système dans l’extension Golden Mask de TR2, et comme je le craignais il a donc été intégré à la série principale. Heureusement qu’on peut toujours aller chopper une sauvegarde sur le net pour accéder à ce niveau bonus malgré tout, parce que fouiller chaque recoin de chaque niveau juste pour ça, c’est peut-être l’ADN de la série mais c’est quand même laborieux.
D’autant plus laborieux que les niveaux sont gigantesques, beaucoup plus que dans les précédents jeux. Dans certains cas on manque carrément d’indices pour nous mettre sur la bonne voie, et c’est là qu’on ressent le rush du développement.
Les niveaux à Londres sont particulièrement concernés par ce problème. Le musée ou la station de métro pourraient être coupés en 2 voire 3 niveaux chacun, vu leur taille et tous les thèmes qu’ils brassent (dans le métro par exemple, on visite certes les quais mais aussi un entrepôt et une loge maçonnique, c’était quoi la ligne directrice du niveau ?).
Le jeu a aussi la réputation d’être le plus difficile de la série. Je ne suis pas vraiment d’accord avec ce constat, sauf si on parle de la version PS1 qui renoue avec le système de sauvegardes limitées de TR1, sauf que vu que le jeu est beaucoup plus long et que les cristaux de sauvegarde sont relativement rares, ça induit plus de stress pour le joueur sonyste. J’avoue que je ne pige pas pourquoi ils ont fait marche arrière sur ce point alors que TR2 sur PS1 avait aboli ce système et s’alignait sur la version PC.
Sur PC donc, on a bien les habituelles sauvegardes illimitées. Et maintenant qu’on n’a plus à se soucier de ça, je ne vois pas trop où le jeu est plus difficile que ses prédécesseurs, en particulier TR2.
Alors entendons-nous bien, le jeu est très dur, mais c’est la marque de fabrique de la série.
De plus, TR2 proposait beaucoup d’ennemis avec des armes à feu qui étaient super chiants à affronter. Ceux-ci sont beaucoup plus rares ici, donc on perd beaucoup moins de santé de façon gratuite. Notons toutefois un gros ennemi de merde exclusif à TR3, les statues indiennes qui sont super résistantes, qui bloquent nos attaques et qu’on affronte dés le DEUXIEME NIVEAU, alors qu’on n’a même pas débloqué le quart de notre arsenal. Elles sont lentes donc peu menaçantes, mais elles font perdre beaucoup trop de temps pour pas grand-chose.
En revanche, TR3 a parfois des énigmes plus cryptiques que ses prédécesseurs. Un exemple parmi d’autres (ce n’est pas la pire énigme du jeu, mais elle m’a bien fait chier) : dans le premier niveau de l'Antarctique, on doit ouvrir un portail. Je trouve donc un objet qui permet d’accéder à la cabine où se trouve l’interrupteur, j’appuie dessus et…rien. Il se trouve qu’il faut rétablir le courant, donc on retourne sur nos pas et on active le générateur (en s'aidant d'un code qu'on trouve à l'autre bout du niveau) et…le portail n’est toujours pas ouvert. En fait il fallait aussi une clé, accessible dans un bâtiment qui était condamné avant qu’on remette le courant, donc rebelotte… C’est laborieux et c’est très mal communiqué au joueur, sans parler du fait qu’il n’est absolument pas logique qu’il faille appuyer sur un bouton ET utiliser une clé pour ouvrir une seule porte. Et tout ça dans des niveaux qui durent parfois 1h30 (temps in-game, donc facilement 3h en temps réel si vous relancez souvent une sauvegarde), la lassitude peut arriver très vite.
En revanche, s’il y a un point où TR3 est une réussite, c’est dans ses bossfights. Jusque-là, la série avait été très mauvaise sur ce point, en-dehors du boss final de TR2 on pouvait en général s’en sortir avec les flingues de base et en se contentant de sauter dans tous les sens ou en se planquant dans un coin. Ici, les boss ont un réel pattern, sont affrontés dans des arènes où on ne peut pas abuser du saut, et le boss de Londres est même affronté dans un défi de plate-forme qui colle parfaitement au gameplay du jeu. Petit bémol sur le boss final toutefois, qui a une attaque littéralement inesquivable et qui one-shot, c’est juste débile (et bonne chance pour le vaincre si vous avez choisi de garder le Nevada pour la fin).
Même le T-rex, ennemi certes emblématique de la licence mais qui n’avait jamais été plus qu’un sac à PV jusque-là, est ici une réelle menace qu’on affronte à découvert. C’est de loin le plus imposant de la série, grâce à son attaque qui one-shot.
Etrangement, le scénario est une repompe de celui du premier épisode. On retrouve un personnage qui embauche Lara au début du jeu pour retrouver des artefacts disséminés partout dans le monde, et qui finit par la trahir à la fin. C’est dommage de commencer à recycler aussi vite des trames narratives, d’autant que l’antagoniste (dont j’ai déjà oublié le nom) est moins convaincant que l’était Jacqueline Natla, mais bon.
Cela dit, le jeu renoue un peu avec l’exploration de terres sauvages, en opposition aux décors plus urbanisés de TR2. L’Inde, le Pacifique et certaines sections de l’Antarctique et du Nevada donnent une très bonne impression de solitude et d’isolement à notre héroïne. C’est d’ailleurs assez chouette que l’aventure ait lieu sur 5 continents différents, ça donne une grande variété aux environnements visités (d’ailleurs, depuis 24 ans Lara n’a jamais remis les pieds dans le Pacifique ou au Pôle Sud). J’en profite au passage pour applaudir l’aspect graphique du jeu qui est encore plus beau que TR2, avec des structures toujours plus détaillées et des effets de lumière plus travaillés qu’auparavant. Rien n’égale toutefois l’ambiance unique du paquebot retourné de TR2.
L’OST est toujours très cool, je pense même que c’est ma préférée de la série pour l’instant. Elle est un peu plus variée que dans les précédents jeux mais conserve l’ambiance unique de la série.
Revenons aux fameux bugs dont parlait Picsou Mag. Si je n’irai pas jusqu’à dire que le jeu est injouable, loin de là, il faut admettre que ceux-ci ont pas mal interféré dans mon expérience. Par exemple, deux cinématiques ne se sont jamais lancées, ce qui fait que ma Lara est passée sans transition du désert du Nevada à une prison. Même si la série n’a jamais brillé pour la qualité de son scénario, le storytelling est généralement bon et ce changement était donc trop abrupt pour être honnête. Idem à Londres, où Lara a mentionné à un moment des cobayes que je n’avais jamais rencontrés, oups !
Mais le bug le plus embêtant que j’ai subi était justement dans le niveau du métro de Londres, où une porte a purement et simplement refusé de s’ouvrir après que j’aie utilisé sa clé, me bloquant l’accès à un objet indispensable. Sachant que ce niveau est débilement long, je ne vous cache pas que ça m’a bien pété les couilles de devoir le recommencer (et heureusement que j’ai pris l’habitude de faire des backups de mes sauvegardes au début de chaque niveau, sans ça j’étais bon pour recommencer TOUT LE JEU !).
Il y a aussi quelques bugs de collision, en particulier lors des phases en véhicule, mais ce n’est pas trop gênant. C’est même plutôt rigolo de voir un quad se téléporter quand il longe un mur.
Si j’ai plutôt apprécié cette troisième aventure de Lara Croft, il faut admettre que ses défauts en font la moins bonne expérience de cette première trilogie. Entre les niveaux trop longs, les énigmes parfois tordues et les bugs, je ne le recommande surtout pas aux débutants, en particulier dans sa version PS1. Dommage pour ce dernier épisode exclusif à la console de Sony, mais ça n’est toutefois pas la dernière aventure de Lara sur ce support, loin de là.
Hop hop hop Core Design, il faut sortir un jeu pour Noël 1999 maintenant !