Raymarathon : 4/22
Vous pouvez courir, mais vous n’échapperez pas à Ed ! Que vous soyez possesseur d’une N64, d’un PC ou d’une Game Boy Color, il sera toujours là pour défendre la planète Terre des vilains pollueurs qui jettent des canettes dans la nature ! Enfin, en l’occurrence le pollueur c’est lui, mais au moins il a une conscience écolo qui lui est venue sur à posteriori, un peu comme le MEDEF.
Bref, Tonic Trouble sur GBC est évidemment l’adaptation du jeu 3D sorti un an plus tôt. Limitations obliges, on se retrouve face à un plateformer en 2D reprenant grossièrement le déroulé du jeu de base, mais en supprimant pas mal d’éléments. Il n’y a que 7 niveaux contre 11 dans l'original (Dieu merci, le niveau en planeur fait partie des supprimés), le hubworld a été remplacé par un bête écran de transition et la petite amie d’Ed est absente de l’histoire. Vous me direz peut-être que la GBC ne pouvait pas accueillir ses voluptueuses formes, mais je vous rappelle que deux Tomb Raider ont vu le jour sur la console.
La folie du jeu n’est pas perdue pour autant, les ennemis étant tout aussi loufoques que sur 64-bits, mais elle est tout de même très amoindrie. On obtient moins d’upgrades, le temps de parole du Professeur est grandement réduit, les animations de mort d’Ed sont beaucoup moins trash (je n'en ai pas parlé, mais lorsqu'Ed tombe KO il a carrément les yeux qui s'injectent de sang dans la version 3D)…
En général, on sent que le jeu a été confié à une équipe B (d’ailleurs il n’y a que 5 ou 6 noms dans les crédits). Beaucoup d’animations sont manquantes donc, mais il y a aussi des bugs de collision (la hurtbox de l’attaque d’Ed est absurdement grande), le level-design est ultra-chaotique par moment (en même temps, quelle idée de faire un collectathon en 2D), les boss n’ont qu’un seul pattern, la course-poursuite avec Grögh dure plus de 3 minutes alors qu’elle est super plate et chiante…
Tiens, un truc tout con qui prouve que le jeu est mal fini : vous devez récolter 6 McGuffin dans chaque monde, eux-mêmes divisés en 3 niveaux. Si jamais lors de votre première visite vous n’en ramassez que 5, bonne chance pour savoir où se trouve celui que vous avez manqué (chaque niveau contient 2 McGuffin, mais il n’y a pas d’indicateur pour savoir celui où vous n’avez pas tout récolté), mais surtout si vous le ramassez vous ne pouvez pas retourner directement à l’atelier du Professeur (ou alors j’ai pas trouvé). Il faut donc refaire le troisième niveau et rebattre le boss du monde pour enfin pouvoir progresser dans l’histoire, c’est vachement lourd.
Heureusement le jeu est assez généreux sur les Vies et les Continues, la mort n’est jamais une grosse punition. En revanche, la sauvegarde se fait par mots de passe, et ils sont donnés par le Prof. Donc vous l’aurez compris, impossible de "sauvegarder" sa progression pendant l’exploration d’un monde, il faut forcément le finir pour pouvoir noter le précieux sésame.
Le gameplay est fonctionnel, on finit par s’habituer au maniement d’Ed et à sa physique d’enclume, mais on note que le clown chargé de la programmation a inversé les boutons A et B. Donc, contrairement à 99% des jeux du monde, B sert à sauter et à valider une option dans le menu tandis que A sert à frapper et revenir en arrière. Lors des quelques moments de panique du jeu, vous êtes assurés de confondre les deux à cause de vos vieux réflexes de joueur rodé par 27 ans de plateformers.
Un autre truc chiant, c’est qu’Ed n’a accès qu’à une attaque spéciale à la fois, il faut donc passer dans un menu pour intervertir le bâton, la sarbacane, la baguette magique et le pogo alors que tout se faisait naturellement sur console de salon. A mon avis il y avait plein de façons possibles de faire ça sans interrompre le flow du jeu, mais bon, je ne suis pas programmeur chez Ubisoft (et tant mieux).
Au final, le jeu se boucle en environ deux heures et seuls quelques passages vous poseront vraiment problèmes, je pense à ce niveau où l’eau monte (qui fait beaucoup penser au niveau similaire de Rayman 1) ou aux deux niveaux avant le boss final qui requièrent un usage intensif de la sarbacane. C’est loin d’être une expérience mémorable sur cette petite console haute en couleur, le portage/demake de Rayman sur la même plate-forme lui met 100 à 0 sans forcer puisqu'il est plus beau, plus maniable et plus long, sans être aussi redondant.
Tonic Trouble rejoint la longue liste des portages GB faits à la va-vite car ça ne coûtait rien à produire et que ça pouvait potentiellement toucher une large audience. Objectif moyennement atteint vu que cette version du jeu n'est disponible qu'en Europe, mais bon.
Comment ? Vous n’êtes toujours pas rassasiés et vous voulez encore plus d'Ed dans votre vie ? C’est bien normal, alors pourquoi ne pas vous tourner vers Tonic Trouble Special Edition, une version béta du jeu PC (avec des tank controls et un level-design différent) qui a été offerte dans des paquets de céréales à l’époque ? Sûrement le stagiaire de chez Ubi Montréal qui s’est gouré au moment d’envoyer le fichier du jeu à la fabrique de CD-roms.
Il paraît qu’il est nul à chier et à la limite de l’injouable, donc allez-y, je vous regarde.