Rétrospective Rare après DK : 5/5
Imaginez… Vous êtes Microsoft et vous venez de racheter plusieurs studios de jeux. Bien sûr, les licences produites par ces studios vont sortir en priorité sur votre console, mais ne serait-ce pas ingénieux d'également les publier chez les autres constructeurs, histoire de brasser un large public ?
Si cette situation vous rappelle l'année 2023, Microsoft n'en est pourtant pas à son coup d'essai puisque cette idée était déjà à l'oeuvre sur GBA et même DS, plus de 15 ans plus tôt. Point d'orgue de cette stratégie : la sortie d'une adaptation de Viva Piñata sur la petite portable de Nintendo, licence qui a été débutée sur Xbox 360 deux ans plus tôt.
Dans Pocket Paradise (on va appeler le jeu comme ça désormais, le ñ c'est chiant à faire), on est dans la peau d'un jardinier qui, tel un Sacha Ketchum casanier, va devoir faire venir des dizaines d'espèces de piñatas (zut) dans son jardin. Prédation, rivalité et amour seront les maîtres-mots de cette nouvelle vie.
La vie de vos bestioles va se diviser en trois phases : il faut tout d'abord attirer deux individus de la même espèce dans votre jardin, en général en leur donnant à manger une proie ou un légume spécifique, puis monter leur bonheur assez haut en accomplissant une autre tâche, ce qui déclenchera leur envie de procréer. Par chance, vos bestioles sont asexuées, comme les escargots ou les étudiants en L3 sociologie à Rennes 2, donc vous n'avez même pas besoin de vous prendre la tête à chercher un mâle et une femelle, il vous suffit de tracer un trait entre vos deux individus. La reproduction sera alors lancée et créera un oeuf, puis quelques minutes après son éclosion, le petit sera apte à se reproduire lui aussi (quitte à baiser un de ses parents) ou à servir de nourriture à un prédateur. C'est le cycle de la vie.
Plus mercantile, vous pouvez également vendre vos créatures afin d'acheter de nouveaux outils ou des graines de plantes. Sachez aussi que certaines créatures ont des aptitudes spéciales (comme créer de l'engrais) et qu'il faudra ponctuellement défendre votre jardin contre des autochtones peu recommandables et voilà, vous avez toutes les infos nécessaires pour progresser dans le jeu et atteindre le tant convoité niveau 10 de jardinier. C'est un peu comme un Maître Pokémon, mais avec des ampoules aux mains. Une très chouette bande-son, un peu banjo-kazooesque sur les bords, vous accompagnera pendant votre périple.
Le jeu a un petit problème de clarté au niveau des objectifs à accomplir pour grimper de niveau. Il n'est pas rare d'avoir l'impression d'avoir tout accompli, jusqu'au moment où l'on découvre par hasard que l'on n'avait pas testé une interaction spécifique pour attirer une nouvelle créature dans le jardin, qui débloquera elle-même l'accès à d'autres. J'imagine que c'est volontaire et que ça n'a pas gêné les enfants qui s'y sont essayés à l'époque, mais clairement il faut y aller en tâtonnant.
Dans la catégorie des choses que le jeu n'incite pas à faire, il y a la vente de créatures, qui se révèle très lucrative donc indispensable à la progression, mais qui n'est pas beaucoup mise en avant. J'ai mis facilement deux heures à galérer et à vendre des légumes pour 25 malheureuses pièces avant de me rendre compte qu'une seule bestiole m'en rapportait presque 200.
Etrangement, le jeu a des tutoriels plutôt bien construits, mais ils sont cachés dans un sous-menu qui s'appelle "Episodes". Allez comprendre…
On a aussi parfois droit à des extraits de la série animée (parce que oui, il y a eu une série animée Viva Piñata, si je me rappelle bien elle était même diffusée sur France 3), mais ceux-ci sont uniquement en anglais et sans sous-titres. La compression sonore de la DS étant ce qu'elle est, c'est assez étrange d'avoir fait ce choix de non-traduction pour un public enfantin et qui ne maîtrise pas forcément la langue de Nicki Minaj.
J'aime beaucoup le chara-design des créatures, il est vraiment très mignon, et cette version DS contient même 7 bestioles de plus que la version 360, ce qui est décidément très ambitieux pour un si petit jeu. Les graphismes de la DS ne font malheureusement pas trop honneur au bestiaire, qui apparaît tout petit sur notre portable à deux écrans. Je pense que l'élevage devait être plus gratifiant sur console HD.
Cela dit, je trouve que le concept d'élever des piñatas est finalement peu exploité, la seule chose qui distingue nos êtres de papier mâché de vrais animaux est le fait que des bonbons tombent lorsqu'ils meurent. Même la chaîne alimentaire est logique et peu originale (la piñata serpent mange la piñata souris, la piñata oiseau mange la piñata chenille…), il y avait peut-être moyen de trouver des idées un peu plus folles ?
Au final, même si les possibilités d'interactions augmentent (lentement) avec le temps (avoir de l'eau, un plus grand jardin, de nouveaux outils…), une certaine répétitivité se fait vite ressentir. Ce n'est pas un jeu qu'il faut tenter de faire d'une traite, c'est plutôt une sorte de petite distraction qu'on lance de temps en temps, avec la télé en bruit de fond ou entre deux sessions de jeu plus exigeantes. Qui n'a jamais rêvé d'élever des piñatas entre deux boss de Dark Souls ?
Personnellement, je vous avoue que j'ai lâché l'affaire au niveau 4, et un Wiki consulté rapidement me montre que je n'ai plus grand-chose de nouveau à découvrir. Aujourd'hui, cette manière de consommer un jeu à petites doses a été plutôt reléguée aux jeux smartphones, Pocket Paradise n'a plus vraiment sa place parmi nous. D'ailleurs, le jeu pourrait presque ressortir tel quel sur Android et IOS puisqu'il inclut beaucoup d'éléments faisant penser à des farming sims mobiles, à commencer par l'interface entièrement tactile.
Ce serait peut-être un moyen de relancer cette franchise colorée, qui malgré un départ en fanfare (série animée, spin-offs…) n'a plus connu de jeu depuis 15 ans ?