Critique de Way of the Samurai 3 par Mickaël Barbato
Un gameplay approximatif, une technique d'un autre âge, un scénario certes très "manipulable" mais tellement banal...
le 3 mai 2010
Un jeu qui propose de multiples choix à conséquences et qui offre en même temps un véritable gameplay, c'est vraiment pas courant. Et attention, on parle de conséquences réelles, hein ? Rien à voir avec les illusions des jeux de Cage ou les Telltales. « Way of the Samurai 3 » propose quand même pas moins de 21 fins différentes, dont certaines peuvent se décider dès les premiers choix de l'aventure.
Le scénario, classique histoire de samurai, se paye le luxe d'être tout de même plutôt bien écrit. On a envie de s'y investir dans ce jeu, on sent que notre avatar peut vraiment changer les choses, en bien, en mal ou en gris. Ou ne rien foutre du tout. En fait, le scénario est tellement malléable qu'une partie isolée peut se boucler en très peu de temps. Deux ou trois heures pour les plus pressés, mais une dizaine d'heures tout de même pour les gros lambins comme moi qui souhaitent approfondir les différents aspects du jeu. Et après on peut recommencer, encore et encore, pour tenter de voir l'histoire sous de multiples points de vue et en découvrir tous les secrets. Le jeu est en lui-même assez fourni pour nous donner l'envie de le recommencer plusieurs fois.
Il faut pourtant s'accrocher un peu au début, car le titre d'Acquire ne prend pas du tout le joueur par la main. Et ça, c'est juste jouissif à l'ère des jeux grand public qui font toujours un peu plus passer les joueurs pour des cons. Lors des premières minutes, on ne sait rien. Pas de tuto, tu arrives dans un village et tu te démerdes. Tu ne sais même pas comment sauvegarder. Heureusement, les développeurs n'étant pas non plus sadiques, nous sommes invités (il est possible de refuser) à sauver une jeune femme qui nous enseignera les commandes principales du jeu. Mais ce sera loin d'être suffisant ! Car pour apprendre à se battre, il faudra aller faire un tour du côté du dojo, lieu que des tas de joueurs ont apparemment du mal à trouver lors de la première partie !
Aucun objectif clair, la possibilité de devenir tout et rien à la fois, une arme vraiment merdique pour se défendre... De nombreux néophytes biberonnés aux films interactifs ultra-dirigistes perdent un peu la tête à ce moment et déclarent: « Way of the Samurai, c'est de la merde. ». Non mais attendez, continuez encore un peu avant de « Et en plus c'est moche » Oui, ok, c'est une réalisation à petit budget et « La carte est toute petite et... » ON A COMPRIS, bordel ! On se trouve bel et bien devant ce type de jeu, vous savez, celui qui a une sale gueule mais qui est cool quand on finit par le comprendre. Vous devez commencer à le connaitre si vous avez déjà lu quelques unes de mes critiques jeux vidéo...
Je voudrais que tout le monde lui donne sa chance parce que c'est un vrai jeu bien couillu, tout simplement. A force de ne plus donner voix qu'aux gros budgets ou aux jeux d'auteur dématérialisés, on en oublie qu'il y a une troisième voie: des jeux sincères, un peu expérimentaux, qui, malgré leurs petits budgets, sortent en boite. Ces jeux-là en chient et je pense qu'il faut les soutenir. WOTS 3 est indéniablement de cette espèce.
Revenons-en aux premières heures de galère. Vous ferez très vite le tour des 8 hubs assez étriqués (le village, la ville, le temple,...). La pauvreté des décors et le manque de variété des PNJs lasse. Les combats sont une horreur avec vos premières armes, tout simplement parce que, à part les péquenots inutiles, tout le monde semble plus fort que vous. Le défilement du temps, bien trop rapide, vous donne des journées d'une douzaine de minutes et tout cela semble bien frustrant.
Mais lorsque vous mourrez, vous recommencez avec tous vos acquis des précédentes parties, vous rendant rapidement de plus en plus riches et puissants dès le début du jeu. Et lorsque vous aurez enfin forgé votre première arme personnelle... le jeu paraitra presque trop facile ! Il faut savoir qu'il y a deux moyens d'aborder les combats: superficiellement ou en profondeur. Une fois bien armés, vous pourrez vaincre facilement 90% des PNJs du jeu. Mais certains ennemis resteront imbattables de la sorte. Vous devrez alors impérativement vous rendre au dojo apprendre les subtilités du combat. Et autant vous dire que c'est extrêmement prise de tête. Les joueurs les plus exigeants seront aux anges. Les réflexes à acquérir et les innombrables techniques de combats pourront vous occuper à eux seuls pendant des heures. La richesse du jeu à cet égard est assez sidérante. Des dizaines d'armes et des centaines de techniques différentes. Respect.
Personnellement, j'ai abandonné cet aspect-là. Pour la bonne raison que la voie superficielle vous permet de presque toujours vous en sortir facilement. Dans ce cas, alors oui, les combats deviennent un peu chiants. Mais c'est un choix. On ne peut pas en tenir le jeu pour responsable. Sauf pour une chose: l'apprentissage du combat est très mal foutu et vous demandera une bonne dose de patience. Au lieu de vous permettre d'essayer une à une les fonctions de base du combat, les trois maitres du dojo vous sautent dessus sans autre forme de procès. Et ces salopards sont tellement forts que le combat peut se terminer en dix secondes sans que vous n'ayez rien appris.
« Tu es vraiment trop nul ! » vous lâchera alors ce satané bushi qui ne voudra plus rien vous apprendre avant le lendemain, vous obligeant à des allers-retours vraiment lourdingues, même avec la fonction de téléportation. Ne pas prendre le joueur par la main, ok, mais rendre frustrant l'apprentissage de certaines mécaniques du combat, c'est vraiment très mal pensé. Pour les autres rouages du jeu, c'est beaucoup plus fluide. On apprend à s'immerger dans cet univers japonais féodal avec beaucoup de plaisir, particulièrement, bien sûr, si la période historique concernée nous intéresse, ce qui était totalement mon cas. Le jeu oscille entre sérieux, tragique, humour fin et ridicule. Plusieurs niveaux de lecture, plusieurs façons d'aborder les choses, tant dans le gameplay que dans son rôleplay, c'est vraiment très très bon.
Ma première fin m'a entièrement satisfait. Limite si je n'adorais pas le jeu. Mais avant d'écrire cette critique, il m'a semblé plus honnête de vraiment tenter le trip des développeurs et de changer mon histoire pour un second run. Il me faut avouer que les quelques défauts d'ergonomie m'ont alors davantage sauté à la gueule. Certains cheminements narratifs paraissent bien obscurs. On est trop tributaires d’événements aléatoires pour faire avancer l'histoire. Si vous avez le malheur d'aller à tel endroit avant tel autre, vous n'aurez jamais la fin que vous auriez souhaité, même si tous vos autres choix étaient bien vus. L'immersion dans une histoire dont vous êtes le héros a alors tendance à se transformer en une espèce de puzzle narratif, ce qui m'a amené à revoir un peu mon enthousiasme à la baisse.
Malgré tout, ce voyage nippon à l'époque du bushido vaut largement le coup. « Way of the samurai 3 », c'est le jeu qui a été fait avec les tripes mais qui est parfois un peu maladroit. L'avoir sous nos latitudes en voix japonaises sous-titrées français est à mon sens une véritable chance que je vous invite à saisir. Sinon, je me ferai seppuku de honte.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Jouer autrement, Un parcours PS3, L'amour du scénario, Hé, tu m'as pas oublié, gros con ? et Les meilleurs jeux dans lesquels nos choix influent sur le scénario
Créée
le 16 mars 2015
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