Après-midi de chien à Okinawa
C'est pas parce que je suis rangé, et qu'on m'a émasculé en version européenne, que je ne suis plus un affranchi. Ex-yakuza, ça tient de l'oxymore. Je reste un chien enragé, à peine assagi par l'âge. A moins que vous ne trouviez un moyen d'effacer les souvenirs et le tatouage qui me colle au dos. Je dois avoir une aura : j'attire les embrouilles. D'abord je sauve un caniche enlevé par l'amant jaloux de sa maîtresse. Me demandez pas. Un caïd du coin de rue, genre peroxydé et boutonneux, me cherche des noises. J'ai beau lui expliquer, il ne comprend qu'après que je lui ai claqué la tronche contre le mur. En voyant ses deux compères faisant tapis sur la chaussée, il réalise à qui il a affaire, il bée et m'offre 1000 yens. Ca fera l'affaire. Une petite affaire, la liasse de billets avec laquelle j'ai débuté la partie me brûle les poches. Je traverse le boulevard. Le centre est petit, écrasé de chaleur comme partout ici. Naha joue à la grande ville avec ses vitrines tatouées d'idéogrammes qui dansent au Soleil.