1983
A revoir avant de confirmer leur place et d'en parler ici :
- Furyo
- Golgo 13, the professional
Mises à jour :
(Aucune)
9 films
créée il y a presque 7 ans · modifiée il y a environ 3 ansLe Retour du Jedi (1983)
Star Wars Episode VI: Return of the Jedi
2 h 14 min. Sortie : 19 octobre 1983 (France). Aventure, Science-fiction, Action
Film de Richard Marquand
Omael a mis 10/10 et a écrit une critique.
Annotation :
L'Empire contre-attaque était une tumultueuse pétrification, une fascinante et tortueuse formation de carbonite, une sculpture endolorie, figeant les tourments, les passions et les incertitudes à leur paroxysme. Le Retour du Jedi s'emploie alors à fondre ces glaises noires métallisées, à dénouer les tourments, à désengourdir les héros (et les "jeunes spectateurs" de tout âge) pris dans les boues paralysantes que les sinistres rebondissements ont fait éclabousser. Tel un fleuve bravant les derniers remouds pour en revenir à l'océan cosmique, ce merveilleux opus final dessine un grand mouvement serein, adopte un rythme paradoxalement apaisé, alors qu'il porte dans le même temps la célérité des corps à des sommets jamais atteints avant lui, et rarement atteints après. Les méandres et les ramifications tranchantes initiés par l'épisode précédent sont ici recentrés vers quelque chose de plus doux et de plus feutré, la narration ample et chahutée laisse place à la simplicité d'une bedtime story chaleureuse, où les dialogues autrefois vifs ont fait place à des incantations berçantes. Cette forme de tranquillité nouvelle et chevaleresque qui émane de cet épilogue est la peau du magnifique élan de mansuétude qui s'incarne dans tout le film. Une sorte de bienveillance absolue semble être arrivée à maturité, et envahit progressivement tout le métrage. Elle fait tomber les masques noirs pour révéler le sourire aimant d'un père, elle engloutit les sorciers maléfiques dans des ondées bleues et les vieux sages dans un fondu murmurant, elle fait trébucher dans les rires et les hourras tout un empire avec l'inventivité de petits guerriers à la fourrure câline. Elle réunit frère et sœur, jadis séparés, autours du souvenir d'une mère oubliée... Le père rejoint la trinité des pairs, des feux de joies illuminent les cimes d'une lune forestière à l'écart des hauts lieux de la galaxie, et nos héros, adorés entre tous, prennent la pose d'un bonheur que l'iris vient marquer du sceau de l'éternité. Soit la plus belle fin possible, pour la plus belle histoire qui m’ait jamais été contée.
Christine (1983)
1 h 50 min. Sortie : 25 janvier 1984 (France). Épouvante-Horreur, Thriller, Fantastique
Film de John Carpenter
Omael a mis 10/10.
Annotation :
Jaspes rouges et ivoire cerclé de chrome, Christine arbore les couleurs du sang et de l'os, de la passion et de la mort, et baptise de son nom l’œuvre la plus poignante de Carpenter. Aboutissement de son style à la fois sec et virtuose, le cinéaste porte ici sa mise en scène à une sorte d'acmé fulgurante, tout en conservant une grande humilité. Fluidité des mouvements, limpidité du montage, scope supérieurement maitrisé, Christine est l'incarnation d'une mécanique où s’articulent à la perfection les talents, où se chaînent l'incroyable savoir-faire de techniciens à l'apogée de leur art, tous mobilisés autour de la conduite d'un récit mené avec un sens de la narration parfaitement rôdé. Ce faisant, ils impriment dans le métal des motifs puissants, préfigurant les Terminator de Cameron au passage : machine cabossée se reconstituant dans un langoureux strip-tease, bolide infernal émergeant des flammes, torsion et écrasement de la chair invulnérable de Christine,... A ces mécanismes foudroyants, parfaitement huilés, Carpenter appose la grippe d'une sensibilité nouvelle chez lui, une poigne au cœur caché derrière les rouages qui rend d'autant plus prenante et cruelle la tragédie dépeinte. De mémoire, Christine est sans doute le premier film à m'avoir raconté ce glissement d'un héros, vers la folie et le malheur, et il faut toute la force et la subtilité qu'il déploie pour qu'elle reste encore pour moi un mètre-étalon dans le domaine. Le trop rare Keith Gordon est magnifique dans ce qu'il incarne le gouffre d'une passion dévorante, dosant détresse et désir, fragilité et charisme étrange avec une épatante justesse, réussissant l'exploit de rendre aussi attachant qu'inquiétant son jeune Arnie. Il participe de beaucoup à la puissance émotionnelle du film qui, même après 30 visionnages, m'achève toujours d'un éclat de pare-brise en plein cœur.
Rusty James (1983)
Rumble Fish
1 h 34 min. Sortie : 15 février 1984 (France). Drame, Action
Film de Francis Ford Coppola
Omael a mis 10/10.
Annotation :
Rusty James, c'est la face caché d'Outsiders, sa face B, son versant ombragé, impénétrable, expérimental, déconstruit. C'est une déambulation mentale où contrastent les légendes et les désillusions, la balade circulaire et la fugue fantasmée, les carcans et les aspirations, l'inéluctabilité et la suspension du temps, aussi bien que le noir et le blanc. A la manière du disque lune dont la face blanche et rêveuse dissimule son envers caché dans les ténèbres, les éclats dans Rusty James ne sont là que pour renforcer les ombres. Ainsi, la réapparition d'un frère légendaire n'est en fait qu'une disparition programmée, un retour inexorable aux ombres pour payer le tribut à la lumière. Sublime Mickey Rourke hantant la pellicule comme son personnage hante le récit : tout en charisme fragile, en jeunesse sage, en virilité angélique, l'acteur porte à bout de bras le cœur mélancolique du film. Ses yeux noirs velours laissent entrevoir une tristesse abyssale en même temps qu'une bienveillance chaleureuse et paisible. La caméra épouse son regard achrome dans un enchevêtrement de zébrures expressionnistes époustouflantes, tout de noirs-suie et de blancs électriques. La bande son capte l'étouffement des paroles dû à sa surdité et l'étrange cacophonie urbaine composée par Copeland. Motorcycle Boy, même absent, est sur tous les murs et dans toutes les pensées, et, plus que tout, constitue le centre de gravité du film, son ancre émotionnelle. Il est LE grand frère, son incarnation ultime, bouleversant dans son refus de passer le relais de la violence et de l'inertie, poignant dans ses regards - plein d'affection - qui ne quittent jamais son petit frère. Au rayon des histoires d'amour fraternel, la poésie dévastatrice de Rusty James domine tout.
Dead Zone (1983)
The Dead Zone
1 h 43 min. Sortie : 7 mars 1984 (France). Épouvante-Horreur, Science-fiction, Thriller
Film de David Cronenberg
Omael a mis 9/10.
Annotation :
Blotti dans les tonalités hivernales qui siéent si bien à son style, le réalisateur canadien témoigne ici pour la première fois d'une poignante sensibilité, discrète, chaleureuse, qui ne vient pour autant pas oblitérer la sécheresse de sa mise en scène ni travestir l'identité singulière qu'il appose à ses œuvres. Avec Dead Zone, Cronenberg déploie le magnifique récit d'un amour accidenté, des sentiments empêchés par la vie suspendue d'un homme qui se réveille hors du monde. Le postulat surnaturel est intégré avec une telle habileté qu'il n'apparaît que comme un composant naturel du mélodrame, que le cinéaste déroule à la manière d'une tragédie ouatée comme le sont les bruits atténués par le manteau neigeux. Gravitant autour d'un Christopher Walken magnifique, une pléiade de personnages vient former une constellation bienveillante, soufflant le chaud dans les tons froids de l'image, du père aimant au thérapeute dévoué, de l'élève introverti à la promise éconduite par le destin.
L'Étoffe des héros (1983)
The Right Stuff
3 h 13 min. Sortie : 25 avril 1984 (France). Aventure, Biopic, Drame
Film de Philip Kaufman
Omael a mis 9/10.
Annotation :
Le film s'entame dans les poussières sépia, évoquant les grands westerns, les horizons de pierres brunes et de sables chaud. S'il part de ce terreau mythologique inépuisable, c'est pour mieux faire éclore sa propre structure, immense verticale érigée pour atteindre les étoiles, le ciel-frontière, Ouest ultime. Kaufman élabore avec minutie tout un réseau d'êtres, dirige avec une grande justesse une chorale d'intimités, célèbre la collectivité des efforts et la multitude des rôles rassemblés en une pyramide humaine qui porte nos héros toujours plus haut, jusqu'à la voute céleste. Et au-delà. Drôle, enchanteresse, haletante, émouvante, l'épopée est ample, plurielle mais d'une grande cohérence, reflet de la cohésion des âmes autours d'une quête commune qu'elle dépeint avec une efficacité sereine. Kaufman n'en oublie pas de capter les vibrations individuelles, avec une acuité égale à celle qu'il accorde au "chœur" des métiers. C'est l'inquiétude silencieuse et le soutien aimant d'une épouse. C'est le regard plein de mélancolie et d'admiration porté sur celui resté à Terre, l'ancêtre contemporain, taiseux sublime, quelque part entre le cow-boy et le cosmonaute, continuant seul sa quête de la limite des cieux. C'est l'émotion d'un pionnier face au spectacle qui s'offre à lui seul, inédit à l'humanité entière. C'est la connivence poignante des conquérants revenus au pays, partageant d'un regard leur nostalgie sous le clair de lune de Debussy. C'est enfin (et encore) Yeager, Icare victorieux, phœnix héroïque, incarnation vivante du dépassement, magnifique Sam Shepard.
Outsiders (1983)
The Outsiders
1 h 54 min. Sortie : 7 septembre 1983 (France). Drame
Film de Francis Ford Coppola
Omael a mis 9/10.
Annotation :
Panoramas peints à l'ombre sur la toile d'un ciel doré, beauté d'un crépuscule révélant soudain la poésie des mots à deux enfants brûlés par la misère, sublime intermède champêtre à la Mark Twain, nostalgie bleue comme les jeans, rock & roll rutilant comme la gomina, Coppola réinvestit le passé immédiat de son pays, de sa jeunesse et du cinéma, entremêlant les contraires avec l'équilibre miraculeux que son talent immense lui permet. Dur et tendre, moderne et classique, tragique et insouciant, Outsiders est une épopée tout de charbon et d'or, l'une des plus belles odes à ce fleuve intranquille qu'est l'adolescence. Innocence résistant vaillamment à l'érosion de la violence, courage et bonté systématiquement répondus à l'adversité, soubresauts d’émerveillement rongés par la maturité précoce, amitié rendue immortelle par les larmes et les brûlures : Johnny et Ponyboy, magnifiquement incarnés par deux acteurs bouleversants, sont les amis éternels, cœurs candides trempés dans un or qui bravera encore longtemps toutes les flammes cyniques du monde. Et Coppola y muait sa splendide majesté en une humilité seigneuriale, et y révélait toute sa belle sensibilité, généreuse, douce et libre.
Scarface (1983)
2 h 50 min. Sortie : 7 mars 1984 (France). Drame, Gangster
Film de Brian De Palma
Omael a mis 9/10.
Annotation :
Déjà, De Palma image une œuvre à la mesure de son héros : Scarface est un film profondément voyou. Récit déroulé comme une traînée de poudre, cadre fringué de couleurs obscènes, grandeur et virtuosité viciées par le clinquant, musique tapageuse, décorum outré, le cinéaste s'amuse à composer une esthétique décadente et mal-aimable, accumule tout un bric à brac de signes extérieurs de pouvoir, comme un margoulin agence sa vitrine racoleuse. Ensuite, il se met à égale distance du réalisme pur et de la farce grinçante, adopte le regard déformant du grand angle, prend la hauteur qui lui permet de capter le vide entre les marbres noirs, les dorures immondes et les poudres blanches. A travers ce recul, Tony Montana, monstre d'assurance, de charisme nerveux, devient un pantin pathétique, gesticulant et vociférant jusqu'à l'absurde, comme pour conjurer le néant béant qui l'aspire. Sur le fil tendu entre la caricature et le vrai, le pathétique et l'antipathique, Pacino réalise un parcours de funambule époustouflant, alternant crispation et éruption avec le génie qu'on lui sait.
Vidéodrome (1983)
Videodrome
1 h 29 min. Sortie : 16 mai 1984 (France). Épouvante-Horreur, Science-fiction, Thriller
Film de David Cronenberg
Omael a mis 8/10.
Annotation :
Prophétie d'une acuité troublante, Cronenberg invoque les arts obscurs de la divination, engendre une matière hybride, lit dans les lignes de la chair du futur. Son vidéodrome fait d'autant plus froid dans le dos qu'il apparaît comme la parfaite synthèse de notre présent, à des décennies d'intervalle de sa conception. Qu'il se soit "trompé" d'objet n'enlève en rien la clairvoyance dérangeante de sa prémonition. Il suffit de remplacer la télé par les smartphones, les chaînes câblées par les channels web plus ou moins confidentielles (et douteuses), les signaux d'émissions par le réseau du web, et on y est : nous sommes déjà dans l'enfer vidéodrome. C'est une expérience totale, déconcertante et fascinante, que le maître canadien nous donne à ressentir ici. A mesure que le récit se déploie, il s'opacifie. La plupart du temps, la beauté est éjectée de l'image, devenu catalogue de décors mornes et théâtre de visions répugnantes. Et lorsque la beauté s'infiltre dans le cadre, elle n'est que surface insondable, peau glamour d'un vertige inquiétant, qu'une aiguille chauffée à blanc ou l'incandescence d'une cigarette ne parviennent pas à percer. Œuvre mal-aimable, malade, déviante, Videodrome est une ensorcelante séance d'hypnose qui résiste à l'esprit autant qu'elle soulève le cœur.
Un fauteuil pour deux (1983)
Trading Places
1 h 56 min. Sortie : 16 novembre 1983 (France). Comédie
Film de John Landis
Omael a mis 8/10.
Annotation :
"Les premiers seront les derniers". Reprenant à son compte la célèbre formule biblique, Landis s'amuse délicieusement à renverser la hiérarchie des classes, à permuter deux corps et deux environnements, à plonger ses héros dans une farce minutieusement orchestrée, une expérience ontologique et sociale grandeur nature, manigancée par deux frangins aussi richissimes que cruels pour tromper leur ennui. La comédie est fine, acide mais chaleureuse, disposant d'un rythme curieusement serein, se laissant porter par ces deux parcours, parallèles mais contraires, avec une fluidité hors pair, une discrète malice, tout en conservant ce qu'il faut de premier degré. La déchéance de l'un se pare alors d'atours presque kafkaïens, tandis que l'ascension de l'autre captive par la suspension savamment entretenue de la découverte de toute la supercherie. L'attente, génialement attisée par Landis tout au long du métrage, de la rencontre entre les deux cobayes à qui l'on a substitué la peau de l'un à celle de l'autre agrippe un suspense diablement efficace. Le nanti né avec une cuillère d'argent dans la bouche peut alors goûter la chaleureuse solidarité d'une fille de joie sans le sou. Et le fauché comme les blés passé maître dans la débrouille s'approprie rapidement les codes d'une certaine aristocratie de la finance, les bousculant un peu au passage, et trouve un terrain à la mesure de son intelligence vive. Les formidables comédiens animent tout cela avec une belle énergie, mention spéciale à une Jamie Lee Curtis aussi attachante que savoureuse.