Oh Jo !
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Yasunari Kawabata ...
16 livres
créée il y a plus de 7 ans · modifiée il y a environ 4 ansLa Marche de Radetzky (1932)
Radetzkymarsch
Sortie : 1934 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 9/10.
La Crypte des capucins (1938)
Die Kapuzinergruft
Sortie : 1940 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 9/10.
Zipper et son père (1928)
Zipper und sein Vater
Sortie : 1928 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 9/10.
Annotation :
Un Joseph Roth en pleine forme, qui tente de raconter la difficile position de sa génération, partie faire la guerre à 20 ans et de retour dans un monde sans repère avec la tenace impression que d’avoir survécu à la barberie est un hasard bien lourd à porter au vu du nombre de camarades décimés. L’histoire d’Arnold et de son père, un tartarin de Vienne plein de faconde mais sans envergure réelle, est racontée par un narrateur qui observe avec humour et nostalgie ces deux êtres perdus dans une vie trop grande et trop cruelle pour eux. C’est amusant et tragique, léger et profond, animé par une écriture acérée et inventive qui ne lâche pas d’une semelle l’attention du lecteur. Les portraits s’enchainent, plus merveilleux les uns que les autres, et forment une mosaïque finalement poignante et pleine d’humanité.
« Je me souvenais que j’avais continuellement cherché à éviter P., par peur de la hauteur où il se trouvait et du vent glacé qui en soufflait. On est jeune, pour tout dire, on a des espérances, on voudrait être éternel, l’on se sent heureux sous un carré de ciel tendu au-dessus de quelques décennies d’une vie d’homme et l’on préfère ne rien savoir de l’insignifiance - voire de l’absence de signification d’un mot que l’on prononce, d’un acte que l’on commet, d’une souffrance que l’on éprouve. On avait l’impression, lorsqu’on parlait avec lui, de regarder la Voie lactée et de partager, au contact de cent milles soleils et de millions de planètes, le destin imposé, une fois pour toutes, à notre soleil et à notre terre. Mais il fallait sans doute être très vieux pour parler avec lui. »
La Légende du saint buveur (1939)
Die Legende vom heiligen Trinker
Sortie : décembre 2016 (France). Roman, Conte
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 9/10.
Annotation :
Alors que réfugié à Paris après avoir fui l’Allemagne nazie, il s’enfonce peu à peu dans la maladie, l’alcoolisme et l’oubli, Roth parvient tout de même à écrire quelque mois avant sa mort ce petit conte étonnant, trouvant la force de transformer le désespoir en éclats lumineux et moqueurs. Il y a comme un petit miracle de transfiguration qui opère tout au long de cette courte histoire d’un clochard silésien à qui soudain le sort sourit. Pas de larmes sans joie, et pas non plus de bonheur sans drame, le carousel de Roth tourne pour une dernière petite virée, sur un air tragi-comique d’accordéon, avec une naïveté assumée – une sorte de dépouillement tendrement amusé auquel seul peut arriver celui qui est déjà passé de l’autre côté de l’espoir.
« Et ils ne surent plus que faire l’un de l’autre. Ils avaient gaspillé ce moment essentiel qui est donné en partage à l’homme et à la femme. Aussi décidèrent-ils de faire ce à quoi se résolvent les hommes de notre temps sitôt qu’ils ne savent plus que faire. Ils allèrent au cinéma. Et ils demeurèrent assis là, côte à côte. Mais, pour eux, il n’y eut ni ténèbres ni obscurité et c’est dans un pauvre demi-jour qu’ils se donnèrent la main, notre ami Andreas et la jeune fille. Il lui serrait la main, mais sans aucun plaisir et cela le faisait souffrir. Lui, Andreas. Alors à l’entracte, il décida de sortir dans le hall avec la jolie fille et de boire ; et ils sortirent tous deux et ils burent. »
Le Roman des Cent-Jours (1937)
Die hundert Tage
Sortie : 1937. Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 9/10.
Annotation :
J’ai longtemps repoussé la lecture de ce livre vu le peu de sympathie (attention, euphémisme !) que je porte à Napoléon, me disant à chaque fois que de me taper tout un roman sur les affres du gars coincé entre deux défaites serait au-delà de mes forces. Mais conscient de celles de Roth en toutes occasions, j’ai su faire taire mes craintes, et bien m’en a pris. Car la règle fonctionne admirablement bien : un auteur admirable peut tout transformer dès lors qu’un sujet l’inspire profondément, et ce que fait Jojo de ces quelques jours en apesanteur est encore une fois une petite merveille de douceur, de violence et de profondeur. Suivant deux destins qui sont à l’opposé - un empereur en voie de déchéance et une soubrette amoureuse d’une figure mythique - il dresse un tableau d’une finesse extrême autour de l’idée du destin historique et de la confrontation du rêve, qu’il soit d’amour ou d’ambition, et de la réalité. Adroit psychologue et peintre attentif de la réalité, il trouve là l’occasion de mêler le petit et l’énorme, l’intime et le politique, avec une élégance et une intelligence rare.
La Rébellion (1924)
Die Rebellion
Sortie : 1988 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Annotation :
Oh ça fait sacrément la blague, cette affaire. Parce que ça commence comme une histoire un peu légère - oui bon à cela près que le héros a perdu une jambe à la guerre, mais ça ne le dérange pas plus que ça - avec un fond de subtile ironie, et qu’on se dit, ok compris. Sauf que pas du tout, Joseph veille, et le Destin avec. Il emmène son récit sur des pentes de plus en plus escarpées, et soudain la fin explose, qui donne une toute autre coloration à ce petit roman cruel comme la vie.
Gauche et droite (1929)
Rechts und Links
Sortie : octobre 2000 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Annotation :
Si on veut pinailler, c'est vrai que "Gauche et Droite" pourrait être plus long, plus développé, plus creusé. Mais bon, Joseph Roth est plutôt adepte du concentré, du dense, comme s'il laissait le lecteur remplir les trous. Facilité ou respect, à chacun d'en décider. Il n'en reste pas moins que le roman gagne ainsi en force : les trajectoires de ces personnages perdus sont d'autant plus mélancoliques et désespérées. Et puis, par dessus tout, il y a le style de Roth, sa façon de se balader, de raconter, d'analyser, d'ironiser. Il a la rapidité de celui qui a tout compris, il ne démontre rien, il infuse, par petites touches. C'est risqué, certes, mais c'est de la très très belle ouvrage.
Le Poids de la grâce (1930)
Hiob, Roman eines einfachen Mannes
Sortie : 1930. Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Annotation :
Comme l’indique le titre allemand, le roman de Roth est une réécriture de l’histoire de Job, transposée dans la Russie du début du XXe siècle et inversée puisque ici la colère de Dieu semble s’acharner non sur un homme heureux et comblé, mais sur un pauvre juif qui n’a rien d’autre à perdre que ses enfants et sa femme. Mendel est pieux, et poursuit son existence misérable courageusement, de son shletl à New York, balloté par la destinée, d’abord résigné, puis révolté, sans que cela ne change grand chose au cours des événements. Car le récit de Roth ne se pose pas sur un plan moral, et plus l’histoire pourrait devenir édifiante, plus l’auteur s’attache aux gestes quotidiens, avec un naturalisme précis, doux et tranquille. Mendel aurait pu se transformer en Figure, mais tout le travail d’écriture consiste à le laisser être un homme, face à la violence sans explication de la Réalité. Une corde raide sur laquelle beaucoup auraient trébuché, mais que Roth pince avec son talent hors pair, afin de faire résonner une petite note discrète mais entêtante.
Le Prophète muet (1929)
Der stumme Prophet
Sortie : 1 janvier 1972 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Annotation :
Ecrit en 1927-1928, ce roman d’une désillusion ne fut pas publié du vivant de Roth, et disparut pendant plus de trente ans, laissant aller bon train les spéculations selon lesquelles il s’agissait du projet de l’écrivain autour de la figure de Trotsky. Si Kargan est effectivement un révolutionnaire professionnel balloté par l’histoire, on est pourtant assez loin de la destinée du bouillant Léon. Le héros de Roth est certes animé d’une fougue idéaliste dans ses jeunes années, mais la guerre, la prise du pouvoir par les soviets, les luttes intestines, l’exil vont peu à peu éroder les convictions de cet homme solitaire et désenchanté, traversant les années avec toujours plus de mélancolie. Avec ce très beau portrait d’une âme noble incapable de se raccrocher aux wagons de la réalité, Roth utilise son écriture à la fois précise et lyrique pour creuser une nouvelle fois les plaies de son siècle et de sa génération, trop lucide pour ne pas voir les combats qui s’imposent, mais trop abîmée pour les mener jusqu’à leur terme.
« Ils traversèrent de grandes villes blanches, ils vécurent dans de grands ports, ils virent des bateaux longer des côtes étrangères ; ils croisèrent les trains qui partent pour l’inconnu et ils ne pouvaient jamais regarder un bateau ou un train sans se voir eux-même partir pour des pays lointains et imprécis, pour l’avenir. Ils comptaient anxieusement les jours qu’ils avaient encore à vivre ensemble et plus le nombre en diminuait, plus ceux qui restaient devant eux semblaient devoir être riches d’événements extraordinaires. Alors que la première semaine avait été une unité de temps indivisible, la seconde déjà se divisa en jours et la troisième en heures. Pendant la quatrième, ils commencèrent à regarder chaque minute qui passait comme une journée entière pleine de richesse et ils souffrirent d’avoir prodigué le temps de la première semaine. »
Notre assassin
Beichte eines Mörders, erzählt in einer Nacht
Sortie : 1936 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Tarabas (1934)
Tarabas, ein Gast auf dieser Erde
Sortie : 1985 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Annotation :
Dans ce roman publié cinq ans avant sa mort, Roth tente semble-t-il de relever, avec une certaine patience et une indéniable fougue, le défi du « déjà écrit ». A un double niveau d’ailleurs, aussi bien structurel que thématique : toute l’histoire de son héros, jeune exilé à New York devenant colonel pendant la guerre civile russe, est annoncé, via une diseuse de bonne aventure, dès le début du livre (« vous serez un meurtrier et un saint. Il n’y a pas de destin plus malheureux en ce monde. Vous pêcherez et vous expierez, et tout cela ici bas »), et rejoint des situations ou des personnages déjà traités par Roth dans ses oeuvres précédentes. Mais l’auteur n’est pas de ceux qui aiment se répéter, tout au contraire je crois qu’il ne fait ça que pour pouvoir trouver autre chose à dire sur la même chose, ou du moins selon un point de vue différent, avec des méthodes stylistiques renouvelées. Et l’aventure de Tarabas, plombée par la prophétie de le Gitane, devient comme par magie un tableau sensuel, sensitif de la nature, de la violence, de la brutalité, de la rugosité, très loin de l’allégorie qui semblait annoncée. Foncièrement, en terme d’utilité, de rachat, de trajectoire morale, Tarabas est mort pour rien, et n’a vécu pour rien. Mais reste le reste, qui ne se quantifie pas, mais se dépose sur les pages de Roth : la chaleur du soleil et des souvenirs, le froid de la neige et des regrets, le souffle du vent, le bruissement d’un cuir, bref le monde dans sa si curieuse matérialité évanescente.
La Fuite sans fin (1927)
Die Flucht ohne Ende
Sortie : 1929 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Conte de la 1002e nuit (1939)
Die Geschichte von der 1002. Nacht
Sortie : 1973 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 8/10.
Annotation :
Ecrit dans les dernières années de sa vie, ce roman de Roth a tout de l’oeuvre crépusculaire, et si effectivement elle fait d’abord mine d’avoir la légèreté d’un conte oriental, c’est pour très vite s’attacher à raconter l’étrange errance de quelques viennois « qui se sont fourvoyés dans cette vie » comme le résume un personnage à la fin de l’histoire. Une histoire dérisoire mais tragique, futile mais délicate, où Roth fait le pari de se mettre à la place de personnages qui ne comprennent rien à ce qui se passe autour d’eux. Un monde s’effondre, tout doucement, sans faire de bruit, recouvert déjà par la neige et les cendres.
La Toile d'araignée (1923)
Das Spinnennetz
Sortie : 1923 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 7/10.
Annotation :
Le roman de Roth ressemble à pas mal d’autres écrits à la fin des années 30 pour retracer les parcours glaçants de jeunes désoeuvrés sans convictions tombés dans les pièges du parti national-socialiste, devenus nazis presque par défaut, plutôt comme possibilité de s’élever dans une hiérarchie que par militantisme politique. Et cette communauté de thème dessert un peu la courte oeuvre de Roth si on ne prend pas en compte un point capital : elle ne date pas de la veille de la guerre mais de 1923, dix ans avant la prise du pouvoir par Hitler, alors que la bête était encore dans l’oeuf. Du coup on comprend mieux la fin qui n’en est pas une (l’oeuvre est inachevée), et le manque de relief qui menace parfois cette chronique d’une damnation : il ne s’agit pas encore pour Roth de tirer dans ce premier roman des leçons, mais plus de documenter, quasi sismographiquement, ce qui est en train de prendre forme sous ses yeux de jeune journaliste à Berlin, pour pouvoir aller au fond du problème : les ressorts psychologiques et sociaux de tout embrigadement.
Hotel Savoy (1924)
Hotel Savoy - Ein Roman
Sortie : 1924 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 7/10.
Annotation :
Hotel Savoy fait partie de la première période de Roth, assez différente de ce que deviendront ses romans après 1930. Plus personnel, plus intime même, il relate le séjour dans une petite ville germanophone (probablement autrichienne, mais tout est flou dans cette histoire) que fait le narrateur sur le chemin du retour, après 4 années de guerre et autant d’errance après sa fuite de Russie. Dans un univers qui a perdu tout repère, Gabriel lui aussi erre. Il pose son maigre bagage dans le luxueux hôtel Savoy, dont les derniers étages sont habités par des pauvres en rupture de ban (même si Anderson semble mettre son Grand Budapest Hotel sous l’égide de Zweig, moi je trouve que le palace de Roth offre beaucoup plus de similitudes). La nuit, la pluie, le brouillard, et des personnages fantomatiques, on est parfois chez Kafka dans ce roman d’une vie qui ne vaut plus grand chose, entre deux catastrophes.
Les Fausses Mesures (1937)
Das falsche Gewicht. Die Geschichte eines Eichmeisters
Sortie : 1946 (France). Roman
livre de Joseph Roth
Chaiev a mis 7/10.
Annotation :
Plus qu’un roman, Roth au bout du rouleau parvient à arracher au silence et à la détresse un conte, aux phrases glacées. Il n’y a plus beaucoup d’espoir dans son écriture, à moins que d’écrire, même d’aussi loin, soit le dernier trait de foi qu’il parvient à garder en lui, ou en la littérature ? Portrait d’un homme qui chute, très lentement pris dans un engrenage silencieux, au fond d’un pays de neige et d’ennui, qui laisse venir à lui sa destruction. Portrait sans romantisme aucun, et même je crois sans moralité. Un tableau sans cadre, dont la toile est friable et la peinture si délayée qu’elle s’efface à peine posée : Roth pousse son œuvre tellement aux frontières d’elle même, qu’on la sent prête à disparaitre à chaque nouvelle page tournée.