Années 1920 : les livres
Top des tops : les incontournables de la décennie. La littérature a droit aussi à son palmarès !
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Années 1930 ...
30 livres
créée il y a plus de 11 ans · modifiée il y a 4 moisL'Ange exilé (1929)
Une histoire de la vie ensevelie
Look Homeward, Angel
Sortie : 1989 (France). Roman
livre de Thomas Wolfe
bilouaustria a mis 10/10.
Annotation :
Quelle poésie ! Quelle force ! Quel souffle romanesque ! Le premier roman de Thomas Wolfe, écrit à 28 ans, ressemble à l'accomplissement d'une vie, dans sa fougue, sa démesure, sa colère à faire trembler les murs. Tout à la fois une explosion des sens et une nature triomphante, et puis un règlement de compte au plus près d'une famille à la dérive. Parfois c'est Shakespeare au pays des névroses. Wolfe a une vision. Son amour des livres transpire dans ses récits d'apprentissage. Il sait faire jaillir du langage les émotions les plus profondes : ici pas de coupures superficielles : Eugène Grant (puisque c'est lui) se construit dans la souffrance, au milieu d'une meute de frères et sœurs. Il doit tout mériter. Arracher à la vie ce qu'elle veut bien lui céder. "L'ange exilé" embrasse dans un même geste la beauté et la cruauté de l'existence. La tendresse et la folie des hommes. C'est le roman ultime d'apprentissage. Où l'on apprend surtout l'amertume. Thomas Wolfe est mort jeune mais l'esprit libre : tout ce qu'il avait il l'a donné à la littérature.
Berlin Alexanderplatz (1929)
(traduction Olivier Le Lay)
Sortie : 2009 (France). Roman
livre de Alfred Döblin
bilouaustria a mis 9/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Journal
Sortie : 15 mai 2002 (France). Journal & carnet
livre de Franz Kafka
bilouaustria a mis 9/10.
Annotation :
Je prends les années 1920 (je pourrais prendre une autre décennie).
À l'Ouest, rien de nouveau (1929)
Im Westen nichts Neues
Sortie : 1929 (Allemagne). Roman
livre de Erich Maria Remarque
bilouaustria a mis 9/10.
Annotation :
Le roman se concentre naturellement sur la guerre, mais avant tout la vie en temps de guerre, tous les petits à côtés, les filles, les permissions, la peur, l'humanité au coeur de l'inhumain. C'est probablement de ce contraste et du fait que les émotions dans ces circonstances sont démultipiées qui font de ce texte un roman si spécial : terrible, émouvant, personnel. On sent l'expérience de première main dans les détails. La guerre y est une oppressante toile de fond, un théâtre devant lequel nos personnages s'animent, à la vie, à l'amour, à la mort.
Le Destin de Mr Crump (1926)
The Case of Mr. Crump
Sortie : 1948 (France). Roman
livre de Ludwig Lewisohn
bilouaustria a mis 9/10.
Annotation :
Rarement un roman aura mis son lecteur dans de tels états : rage, stupéfaction, mépris, empathie... Il faut dire que les sentiments sont décuplés devant le personnage incroyable de cette furie de femme, un des "méchants" les plus géniaux et malheureusement ordinaires de la littérature. Les stratagèmes les plus tordus sont pour elle routiniers. Surtout la volonté de fer de cette femme force, malgré la haine, un certain respect. Destin écrasant que celui de Crump, qui parle de création, d'art, des soucis quotidiens bien sûr mais il y a une grandeur dans ce décalage entre la petitesse infime de ces problèmes matériels et l'élévation que promet la composition d'une symphonie. On sent partout le récit autobiographique, il y a des détails qui sont presque trop vrais pour être inventés. Une perfection dans la méchanceté gratuite. L'horreur a souvent quelque chose de fascinant. La cruauté est parfaitement tenue par l'écriture précise et légèrement distante de Lewisohn. Un grand grand livre.
Nous autres (1920)
(traduction B. Cauvet-Duhamel)
Sortie : 1929 (France). Roman
livre de Evguéni Zamiatine
bilouaustria a mis 8/10.
Moravagine (1926)
Sortie : 1926 (France). Roman
livre de Blaise Cendrars
bilouaustria a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
L'énergie folle de Cendrars ressemble à une fièvre, son roman à un manifeste pour vivre plus intensément. La poésie foudroie, les lieux en appellent à tous nos sens, des couleurs jaillissent, des odeurs nous rebutent, on crie, on crache, on tue. La langue est parfois attirée du côté du Céline gouailleur, vers une oralité de voyou, mais toujours elle se redresse, droite et fière. Moravagine, lui, a beaucoup voyagé, il a tout vu du monde et vient tout droit d'un pays lointain qui s'appelle Maldoror. L'immensité du premier tiers laisse quelque peu sur sa faim, parce qu'on sait tôt que la beauté des promesses qu'il contient ne peuvent être tenues. Cendrars s'éparpille peut-être, manque de souffle à brailler comme un démon. On lui pardonnera. On pardonne tout aux génies.
Le Procès (1925)
(traduction Alexandre Vialatte)
Der Prozess
Sortie : 1933 (France). Roman
livre de Franz Kafka
bilouaustria a mis 8/10.
Récits d'un jeune médecin (1926)
Записки юного врача
Sortie : 1977 (France). Recueil de nouvelles
livre de Mikhaïl Boulgakov
bilouaustria a mis 8/10.
Femmes amoureuses (1920)
Women in love
Sortie : 1932 (France).
livre de D. H. Lawrence
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Encore un roman moderne et malaimable. Pas du tout le roman dix-neuvièmiste dans lequel les britanniques ont excellé mais un livre mordant, qui détruit et impose un regard nouveau, plein d'insolence et de sensualité. Chez Lawrence, le désir est partout et les personnages philosophent parce que c'est leur éducation qui essaye de raisonner sauf que le désir pense plus fort. Il y a des scènes qui sont d'une suggestion quasi insoutenables, notamment celle où Gerald impose sa volonté et sa force physique à un cheval en l'écrasant de ses cuisses, les éperons dans la chair jusqu'au sang, devant les soeurs révulsées et en même temps en pâmoison devant lui. C'est tout le livre : comment l'amour (et le sexe) est un mélange irrésistible d'attirance et de dégoût, les paradoxes se multiplient tout au long de 700 pages surprenantes. Les couples se forment après une gifle, un mariage se scelle après une dispute terrible, et le voyage de noce tourne au carnage. Eros et Thanatos tout du long. La nature elle, est toute puissante et restée inviolée, insensible aux hommes qui se corrompent pour un rien. Il y a aussi des pages magnifiques sur la mine que dirige Gerald d'une main de fer, que son père a longtemps tenue avec un certain respect pour ses employés... mais le vieux n'y comprend plus rien. Lawrence déploie ici en quelques pages une violence et un amour entre les générations, une incompréhension qui traverse toutes les relations de "Femmes amoureuses". Livre renversant et trop longtemps censuré - en avance sur son temps.
Les Thibault I
Le Cahier gris · Le Pénitencier · La Belle saison · La Consultation · La Sorellina
Roman
livre de Roger Martin du Gard
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Un premier tome de près de 900 pages pour nous plonger chez les Thibault et la relation complexe entre deux frères, l’aîné médecin, premier de la classe, toujours propre sur lui, et le benjamin, plus torturé, indomptable, poète à ses heures, qui fugue et se fait remarquer à l’école. Ajoutons un père autoritaire et colérique qui prend une place folle. Et vous commencez à obtenir une recette pour un mélange explosif. Roger Martin du Gard nous régale d’entrée dans Les cahiers gris et Le pénitencier, centrés sur les frères. Ensuite on suit de plus près l’aîné (Jacques) dans sa vie, entre travail et romances mais il manque quelque chose. Heureusement l’élément perturbateur et enfant terrible (Antoine) réapparaît dans La Sorellina et tout de suite le roman nous captive et capture pour ne plus relâcher la tension. RMdG est fort à évoquer les émotions retenues et dissimulées, à tenir le plus longtemps possible la tension d’une scène. Ses personnages sont attachants, on tremble pour eux. Antoine est un personnage-écrivain qu’on devine souvent proche de l’auteur lui-même. La saga familiale, on le sent, prendra de nouveaux tournants avec l’arrivée prochaine de la première guerre mondiale. Tout gravite autour d’Antoine, personnage mystérieux, charismatique et secret, qui pourrait sortir de chez Steinbeck - il est destructeur et on espère toujours le voir devenir la meilleure version de lui-même.
Climats (1928)
Sortie : 1928 (France). Roman
livre de André Maurois
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Maurois trace tôt des lignes parallèles : il travaillera ensuite strictement dans ce cadre, celui du (splendide) drame bourgeois. Le deuxième récit apparaît ainsi comme une variation sur le premier thème, renforcée par l'expérience première - pas étonnant que les références musicales soient si nombreuses. L'écriture de Maurois fait des merveilles, tout en aphorismes et en petites touches sur la psychologie amoureuse. Bien que l'auteur ait sa voix propre, il semble parfois que "Climats" soit comme une délicieuse mise en bouche annonçant "Aurélien". Peut-être une affaire d'élégance, de dandysme tout parisien, de douce résignation.
Route des Indes (1924)
A Passage to India
Sortie : 1927 (France). Roman
livre de E.M. Forster
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Magnifique roman de l'Inde colonisée et des malentendus entre la haute-société blanche et les hindous, comme miss Quested qui veut "voir l'Inde" (elle recherche l'exotisme que précisément le roman, lui, évite habilement). Ici les personnages ne sont jamais figés, ils existent, ils ont une chance : qu'un professeur anglais prenne le parti des locaux puis change son fusil d'épaule, qu'une anglaise pimbêche fraîchement débarquée accuse un docteur hindou pour revenir ensuite sur ses mots, qu'une amitié naissante se transforme en règlement de comptes. Il faut dire que les philosophies diffèrent, comme l'explique un personnage au moment du procès - les anglais veulent séparer le bien du mal, le grain de l'ivraie, les indiens expliquent que le bien est un tout dont tous sont responsables, que le mal est un tout dont chacun doit assumer une part etc). D'ailleurs Forster élève doucement les enjeux à des questions plus existentielles. Riche de personnages complexés et de dialogues pleins de sous-entendus, "A Passage to India" réussit à dépeindre parfaitement deux mondes séparés condamnés à vivre ensemble, laissant le sentiment amer que les bonnes intentions ne changent rien à l'affaire : les colons sont condamnés à faire les choses de travers.
Zonzon Pépette (1923)
Fille de Londres
Sortie : 1923 (France). Roman
livre de André Baillon
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Zonzon pépette, c’est de la dentelle, Et Baillon un artiste de la petite phrase, un jongleur qui passe de l’argot du truand à l’imparfait du subjonctif sans aucun effort. Sa Zonzon n’est pas sympathique, c’est rien de le dire, mais on s’attache, on n’y peut rien, et derrière l’énormité et la vulgarité, il y a de belles choses que Baillon révèle peu à peu avec une dextérité épatante. La galerie des personnages secondaires donne des couleurs à son texte et des airs de vécus mais c’est la langue et le style qui font vraiment la différence. Élégance désinvolte, petite musique des bas-fonds, comment dire ? Rien n’est évident, il n’y a pas de sens de la formule mais une beauté plus délicate, plus raffinée dans le verbe de cet écrivain suicidé et oublié. Que celui qui a redécouvert Baillon et l’a sorti de son oubli littéraire soit béni ! Texte court qui se lit lentement - et peut-être à haute-voix.
Le Vaisseau des morts (1926)
Das Totenschiff
Sortie : 1926. Roman
livre de B. Traven
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Chez B.Traven, la littérature, aussi fort soit-elle, semble être presque par moments dépassée par la portée politique du texte. On tient presque un nouveau Thoreau, où "Le vaisseau des morts" serait le "Walden" des années 1920 : un cri (de rage, de désespoir, là ou Thoreau murmure) pour une nouvelle humanité. Bien sûr la première partie évoque fortement l’absurdité d´un Kafka (sans votre passeport ou votre livret de marin je n’ai pas de preuve de votre naissance, dit en substance le Consul !). Puis on embarque à bord du Yorikee, l’aventure rappelle alors Cendrars, les marins, la débrouillardise mais le trip tourne à une visite guidée des enfers. Si ce n’était l’humour toujours présent, cette manière grand seigneur de sourire devant la mort, de refuser un destin tragique en ayant un dernier fou rire.
Mademoiselle Else (1924)
Fräulein Else
Sortie : 1924 (France). Nouvelle
livre de Arthur Schnitzler
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Ça chauffe, ça bouillonne dans la tête de cette pauvre petite Else, victime des dettes de ses parents. Elle doit convaincre un riche ami de la famille d'avancer l'argent, mais ce dernier ne l'entend pas de cette oreille et voudrait en échange pourvoir profiter de la beauté de la jeune femme... Le désordre intérieur, qu'on reconnait comme une exercice de style très Schnitzlerien ("Vienne au crépuscule", ou "Le lieutenant Gustel" qui est joint à juste titre dans ce recueil à "Mademoiselle Else" dans la version originale) est ici encore traduit par des phrases courtes et interrompues, des sauts de la pensée, un grand-écart entre le paraître et le penser - parce que nous sommes dans la haute-société où l'hypocrisie règne. Ce trouble des idées se transformerait presque en ivresse ("comme du champagne dans l'air"). "Fräulein Else" est un texte tardif, 1924, et on sent la maîtrise, le plaisir à jouer avec le lecteur, à tourner autour de son personnage comme d'une proie. Schnitzler obtient avec des moyens simples des résultats inespérés. On retient son souffle, le dénouement approchant, sachant que le bon Arthur est capable de tout, de sauver cette mademoiselle attachante qui apparaît malgré elle comme orgueilleuse. Ou de la perdre. Quand enfin vient le final grandiose, on se dit que, pour une fois, le mot "cauchemar" n'est pas galvaudé.
Le Loup des steppes (1927)
Der Steppenwolf
Sortie : 1931 (France). Roman
livre de Hermann Hesse
bilouaustria a mis 8/10.
Le Bal du comte d'Orgel (1924)
Sortie : 1924 (France). Roman
livre de Raymond Radiguet
bilouaustria a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Zipper et son père (1928)
Zipper und sein Vater
Sortie : 1928 (France). Roman
livre de Joseph Roth
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Un petit roman surprenant qui change plusieurs fois de cible en route, parce qu'il s'attarde d'abord sur le père, avant de se centrer sur le fils, et de prendre encore une autre direction. Il y a une ligne narrative assez claire pourtant, un style très vivant, mais Roth nous cache des choses et nous trimbale par ici et par là et j'ai eu le sentiment seulement dans les dernières pages de vraiment comprendre où il nous menait. Parce que Zipper et son père partagent les mêmes gènes et fondamentalement la même couleur mais ils sont pourtant de deux teintes bien distinctes : l'un a été marqué au fer rouge par la guerre et l'autre non. C'est aussi simple que ça mais écrit avec une finesse exquise. L'histoire d'une génération sacrifiée, morte née. Comme dans "La crypte des capucins", Joseph Roth excelle sur une centaine de pages. Ses personnages vivent dans un présent bien rendu mais ses textes sont imprégnés d'une nostalgie, du sentiment du temps qui passe, qui leur donne le supplément d'âme qui distingue les bons des grands écrivains. Et ce "petit texte" dépasse de la tête et des épaules beaucoup de grands romans plus ambitieux et moins achevés.
Souvenirs du futur (1989)
Vospominanija o buduŝem
Sortie : 2010 (France). Roman
livre de Sigismund Krzyzanowski
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Encore un beau roman russe qui a passé soixante ans dans le tiroir d'un bureau de censure. Écrit en 1929 et interdit, "Souvenirs du futur" sera finalement publié en 1989 près de quarante ans après la mort de l'auteur. Et Krzyzanowski mérite largement d'être redécouvert aujourd'hui parce que sa langue est étrange et précise, il choisit souvent des mots et des métaphores inattendus et déroutants. La partie scientifique du livre est belle et complexe mais donne un sentiment de crédibilité absolue, une machine à "couper" le temps (c'est le parti, la vraie machine à couper le temps) mais la beauté du livre, c'est de faire mine de nous raconter ce projet et sa réalisation alors que ce sont les à côtés qui sont les plus passionnants. Comment en 1929 en URSS, année où Staline arrive au pouvoir, rien ne voit le jour, comment on fait du surplace, comment le temps est comme figé, comment l'on parle du futur alors qu'on vit dans le passé. Prison, camp de concentration, police, les aléas de notre génie Sterer ne sont pas ceux d'un mathématicien lambda. Un esprit créatif dans un monde aussi glacial ne peut être qu'étouffé dans l'oeuf, ou utilisé à des fins détournées. Écriture fascinante du détail, du mot juste. Très belle traduction. Verdier continue son travail remarquable.
Chez les fous
Sortie : 1925 (France). Récit
livre de Albert Londres
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Albert Londres est une référence pour tout journaliste, et il convenait enfin de venir se frotter de plus près à ses textes, en l'occurrence cette enquête dans les asiles de France. Ce qui saute aux yeux, c'est la façon dont le texte vit et reste tout à la fois extrêmement bien pensé. Il y adresse, chapitre après chapitre, toutes les questions attendues sur le thèmes des fous, les conditions d'internement, les méthodes, la réinsertion, le diagnostique, l'avenir du fou, ce qu'il dit de notre société etc. C'est plus ou moins un chapitre-une idée pour caricaturer mais c'est fait remarquablement, Londres n'hésite pas à se mettre lui-même en scène (ce que j'ai trouvé assez moderne), il a aussi une haute idée du journalisme qui rien ne doit venir contrarier. Il s'intéresse pour autant sincèrement à ses fous, il y a de l'humanité et une grande violence dans ces pages, et le ton de fausse légèreté qu'il adopte lui permet de dire aussi quelques horreurs sans passer pour un monstre. Intéressant d'un point de vue de l'écriture comment il capture dans sa première phrase le lecteur et termine toujours sur une habile et élégante pirouette - comme tout bon journaliste qui a perfectionné patiemment son métier. C'est une autre époque mais les choses ont-elles fondamentalement changées ?
La Nouvelle rêvée (1926)
Traumnovelle
Sortie : 1991 (France). Roman
livre de Arthur Schnitzler
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Le plaisir de retrouver Schnitzler et son écriture racée, directe. Ses thématiques sont bien là : Vienne, la musique, les femmes... Mais l'inconscient s'en mêle là où les personnages de Schnitzler aiment tout contrôler. Les rêves se mêlent aux évenements les plus étranges, la nuit, l'érotisme, la jalousie, et Schnitzler brouille délicieusement les pistes. Où se situe la frontière entre ce qui est rêvé et vécu ? (Et par là même la question de la culpabilité : celle du noctambule comme celle du rêveur...). Fridolin croit connaître sa femme comme il croit se connaître lui-même mais les désirs enfouis, les rêves, les fantasmes font de nos proches des étrangers. "Un glaive entre nous" : comme un métal froid et coupant qui sépare deux esprits. Le texte est de bout en bout parfaitement maîtrisé, dosé, balance entre psychologie et fantastique et souffle ce parfum qui nous avait tant intrigué dans "Eyes Wide Shut".
Le Diable au corps (1923)
Sortie : 1923 (France). Roman
livre de Raymond Radiguet
bilouaustria a mis 8/10.
Poésies (1929)
Sortie : 1929 (France). Poésie
livre de Paul Valéry
bilouaustria a mis 8/10.
Annotation :
Je ne lis pas de poésie, je ne connais rien, je n'ai peut-être pas d'oreille pour ces choses-là, mais le Cimetière marin, au-dessus de tous les textes, m'a été lu et relu pendant des années. Ma grand-mère qui le connaissait entièrement par coeur nous le récitait. J'ai gardé une faiblesse particulière pour ce texte immense.
La Garden-party et autres nouvelles (1922)
The Garden Party and Other Stories
Sortie : 1922 (France). Recueil de nouvelles
livre de Katherine Mansfield
bilouaustria a mis 7/10.
Grandeur et Décadence (1928)
Decline and Fall
Sortie : octobre 2006 (France). Roman
livre de Evelyn Waugh
bilouaustria a mis 7/10.
Annotation :
Pour ma première incursion chez Evelyn Waugh, j’ai été surpris par la vitalité et vivacité de son écriture et des dialogues, sa "vitesse" peut-être. Notre pauvre héros traîne sa poisse d’un bout à l’autre (virée de l’université sur un malentendu dans les premières pages), baladé un peu malgré lui, mais il rencontre toutes sortes de personnages secondaires hauts en couleurs qui laissent imaginer l’état des institutions anglaises dans les années 1920 (les écoles, les prisons etc). Un premier roman percutant qui dénonce certaines aberrations en gardant toujours un ton enlevé et un humour piquant et charriant aussi avec ces marginaux un esprit de bande. Ce mélange est parfaitement maîtrisé et on comprend combien l’argent change tout, corrompt tout et tout le monde. Sans doute moins puissant qu’un D.H.Lawrence à même époque mais très réussi dans un autre registre.
Léviathan (1929)
Sortie : 1929 (France). Roman
livre de Julien Green
bilouaustria a mis 7/10.
Annotation :
Le monde dépeint par Julien Green est repoussant, tous les personnages sont monstrueux et on pourrait tomber dans un univers à la Haneke si Green n’était pas bienveillant. En fait, l‘est-il ? Pas si sûr, mais dans la deuxième moitié du roman, après un événement traumatique qui va tout changer, apparaît alors comme la face B de cet horrible monde et la beauté surgit soudain là où on l‘attend pas, de sentiments complexes, comme une fleur splendide qui pousserait au milieu d’immondices et de boue. Un Freak Show déroutant qui peut repousser quelques lecteurs mais un texte hors du commun sur une humanité peu reluisante. L’amour et ses extrêmes. L‘argent et la morale. On veut à la fois regarder ailleurs et poursuivre la lecture. Il faudra revenir à Green dont il parait que le Journal est son chef d’œuvre.
Le Temps de l'innocence (1920)
The Age of Innocence
Sortie : 1921 (France). Roman
livre de Edith Wharton
bilouaustria a mis 7/10.
Annotation :
On a pu comparer Edith Wharton à Henry James (avec qui elle a tenu une correspondance). Son étude de l’aristocratie new-yorkaise qui met ici en marge une comtesse qui a le mauvais goût d’être en instance de divorce, est impitoyable. Le raffinement psychologique est peut-être moins sophistiqué mais son personnage de la comtesse Oleska (que l‘on qualifie avec dédain d’européenne) est intrigante puisqu‘elle est la seule à refuser cette vie uniforme. Newland Archer est irrésistiblement attiré vers celle qui incarne la vie, envers et contre toute cette société consanguine figée dans son snobisme et engoncée dans ses préjugés. Le roman monte en puissance à mesure précisément que l’impuissance d‘Archer à échapper à son destin bourgeois se renferme sur lui. Face à la sensualité obsédante de la comtesse, la petite société élitiste et étriquée oppose un mur impossible à franchir. Reste l‘amertume de son mariage.
La Conscience de Zeno (1923)
La Coscienza di Zeno
Sortie : 1954 (France). Roman
livre de Italo Svevo
bilouaustria a mis 7/10.